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Lois anti-grève, répression syndicale : le mouvement ouvrier dans le viseur du régime

En prenant appui sur le bashing anti-cheminots, la droite sénatoriale propose une loi qui autoriserait le gouvernement à interdire les grèves 60 jours par an sur décret. Sur fond d’ambiance de chasse aux syndicalistes combatifs, ce sont tous les droits des travailleurs qui sont visés.

Joël Malo

15 février

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Lois anti-grève, répression syndicale : le mouvement ouvrier dans le viseur du régime

La grève des contrôleurs SNCF appelée du 15 au 19 février pour des augmentations de salaire est l’occasion d’un déchaînement de haine de classe médiatique. Tous les mensonges sont bons pour s’en prendre au mouvement ouvrier. Sur TF1, on pouvait par exemple apprendre qu’un contrôleur commence sa carrière à 2900€ bruts et la finit à 4400€. A se demander pourquoi ceux qui nous gouvernent font DRH, conseillers d’administration de grands groupes, députés et pas cheminot et pourquoi la SNCF fait face à tant de démissions et de difficultés à recruter…

Des menaces brutales contre le droit de grève sur fond de répression syndicale

Cette propagande est le point d’appui pour des menaces brutales contre le droit de grève de tous les travailleurs. Alors qu’Eric Ciotti (LR) promet de nouvelles loi anti-grèves, au Sénat l’UDI a déjà proposé une loi qui vise à donner 60 jours par an au gouvernement lors desquels il pourrait interdire le droit de grève par décret ! La langue de bois de Gérard Larcher (LR), le Président du Sénat, a abondé en ce sens : « Je ne dis pas qu’il faut interdire [le droit de grève pendant les vacances], je dis qu’il faut prendre des dispositifs qui fassent que cet usage de la grève ne soit pas une prise d’otage ».

Cherchant à jouer les amis des travailleurs, le Rassemblement National a exprimé plusieurs sons de cloche mais une même tonalité : l’offensive anti-syndicale. Si d’un côté, le vice-président du parti, Sébastien Chenu, affirmait sur Franceinfo ne pas être « favorable à ce qu’on interdise le droit de grève dans notre pays », il dénonce « la forme » à savoir une grève en pleines vacances scolaires. De son côté, le député Jean-Philippe Tanguy a condamné les « syndicats [qui] choisissent toujours le conflit direct et pénalisent les usagers ». Un discours et plusieurs voix qui, s’il illustre la tentative du RN de ne pas s’aliéner des secteurs de sa base sociale, montre bien que dans le fond, le parti d’extrême-droite s’oppose frontalement aux travailleurs, à ses méthodes et à ses organisations.

Du côté du macronisme, la peur d’une nouvelle crise aiguise les ardeurs anti-grève. « La question n’est pas le droit de grève, mais de savoir jusqu’où on n’en abuse pas », expliquait sur Sud Radio, le ministre de la Transition écologique Christophe Béchu. Le président des sénateurs macronistes François Patriat a expliqué de son côté qu’une réflexion était en cours quant à « toutes les évolutions » qui permettraient d’encadrer « ces grèves intempestives, redondantes et renouvelées ». Chistian Estrosi et Renaud Muselier jouant la surenchère, appellent à mobiliser les contrôleurs retraités pour briser la grève.

Gabriel Attal a lui « salué les cheminots qui ne rentrent pas dans le mouvement social ». S’il a affirmé pour la forme que « la grève est un droit », notre Premier ministre qui n’a jamais travaillé a surtout déclaré que « travailler est un devoir ». Or, travailler n’est pas un devoir : c’est une nécessité pour ceux qui, à l’inverse de notre gouvernement de millionnaires, ne vivent pas du travail des autres. Et quand les conditions de travail ne sont plus tolérables, ils s’organisent, font grève et rappellent à tous que sans eux rien ne fonctionne. Voilà ce que ne peuvent pas tolérer le gouvernement et la droite qui répondent par des amendes, des licenciements, des poursuites pénales et des interventions policières.

C’est ce qu’a fait le gouvernement lors des grandes grèves contre les retraites en envoyant ses flics réquisitionner des raffineurs chez eux à 6 heures du matin devant leurs enfants, en envoyant des CRS obliger les éboueurs parisiens à remonter dans leurs camions. A la fin de l’année 2023, le gouvernement a également limité le droit de grève des aiguilleurs du ciel, en obligeant les salariés à se déclarer gréviste deux jours à l’avance.

Ces derniers mois ont également vu s’installer une ambiance de chasse aux syndicalistes dans tout le pays. Un revanchisme patronal post-réforme des retraites qui a pris la forme de tentatives de licenciement et de poursuites pénales notamment dans l’énergie. 1000 syndiqués CGT seraient ainsi poursuivis en justice pour des faits liés à la réforme des retraites. En parallèle les cas de répression syndicale s’enchaînent dans les entreprises, à l’image du secrétaire de l’UL CGT de Roissy licencié par Transdev, ou de l’offensive contre Christian Porta, délégué syndical CGT chez Neuhauser. Accusé de « harceler » sa direction, ce dernier est un exemple particulièrement brutal de cette tendance.

Unité de tous les travailleurs contre les attaques du gouvernement et du patronat

Les premières mesures de la future loi « France Travail » qui va tronçonner les droits sociaux commencent à être connues. L’une d’elle propose de relever les seuils de déclenchement des obligations sociales (la création d’un CSE par exemple et l’élection de représentants du personnel) de 50 à 250 salariés ! La volonté est limpide : accentuer l’offensive contre les syndicats combatifs dans les entreprises, éviter les négociations annuelles obligatoires, ne plus contraindre les entreprises à communiquer un certain nombre d’informations aux élus du personnel. Les plans sociaux seront ainsi facilités et d’une manière générale la dictature patronale quotidienne avec son lot d’humiliations et de dégradation brutale des conditions de travail, alors que 38 personnes sont déjà mortes au travail en 2024.

Lire aussi : « Relèvement des seuils » : une bombe surprise de Macron contre les travailleurs ?

La crise du système capitaliste promet, à court terme, toujours plus de crises économiques et sociales que le gouvernement et le patronat feront payer aux travailleurs. Cette ambiance de chasse aux syndicalistes et aux droits des travailleurs, c’est le travail patient et quotidien du patronat qui veut aborder les prochaines grandes batailles dans les positions les plus favorables : avec une classe ouvrière plus exploitée, moins organisée, avec la tête sous l’eau et divisée entreprise par entreprise, secteur par secteur.

Nous ne pouvons pas nous permettre de les laisser mettre en place leurs manœuvres. Dès à présent, il faut travailler à l’unité de notre classe contre la propagande patronale et contre toute remise en cause de nos droits. De manière immédiate, une campagne nationale de toutes les organisations du mouvement ouvrier est nécessaire pour la défense unitaire, et non pas en ordre dispersé, de tous les travailleurs menacés par le patronat et sa justice ! De ce point de vue, la dénonciation par la confédération CGT des procès de syndicalistes en cours ces dernières semaines est un point d’appui. Cependant, pour faire reculer l’État et les patrons, elle doit aller de pair avec un plan de bataille.

Sur ce terrain, la posture des directions syndicales, arrimées au dialogue social avec l’Etat et le patronat, est très éloignée des nécessités du moment et de l’offensive prévue par le camp d’en face. L’assurance apparente de Macron ou des LR pour dégainer de nouvelles attaques tranche pourtant avec les signes de fébrilité qu’ils ont montrés ces derniers mois, marqués par les crises. C’est qu’un des rares éléments de stabilité qu’ils ont pu trouver dans la situation est l’absence de toute perspective de lutte des sommets syndicaux, qui ne semblent capables que de demander de manière aussi polie qu’impuissante au gouvernement de retirer ses contre-réformes. Or, et ces derniers mois nous l’ont prouvé avec la loi immigration, les attaques contre le RSA et les menaces actuelles contre la grève et le syndicalisme : lorsque le mouvement ouvrier n’avance pas, le gouvernement profite du répit pour le faire reculer !


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