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Santé et droits reproductifs

Maternité des Lilas : soignants et LGBT mobilisés pour sauver un établissement pas comme les autres

Ce samedi 21 octobre, le personnel soignant de la maternité des Lilas avait appelé à un rassemblement contre les menaces de fermeture qui pèsent depuis plus de dix ans sur cet établissement de santé féministe, qui propose un accompagnement de qualité gratuit, au cœur du département de Seine-Saint-Denis, à toutes les personnes souhaitant ou pas donner naissance.

Mathias Lecourbe

23 octobre 2023

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Maternité des Lilas : soignants et LGBT mobilisés pour sauver un établissement pas comme les autres

Ce samedi 21 octobre, le personnel soignant de la maternité des Lilas appelait à un rassemblement contre le risque de fermeture partielle du service. En effet, la maternité des Lilas, petite structure du département de Seine-Saint-Denis, est menacée, comme beaucoup de petites structures, du fait de la volonté des pouvoirs publics de concentrer les services de santé au sein d’établissements plus gros afin de réduire les coûts de ces services. Le projet de l’ARS Île-de-France est notamment de « transférer » les salles de naissances de la maternité des Lilas vers l’hôpital de Montreuil, plus grosse structure hospitalière publique de la moitié Est de la Seine-Saint-Denis.

Les pratiques humaines et avant-gardistes de l’équipe des Lilas en font une des seules maternités dans le pays à offrir de façon gratuite un accompagnement adapté aux personnes trans et LGBT. Cet engagement est reconnu par les patient.e.s qui ont pu bénéficier d’un tel accompagnement. Un collectif de personnes trans et queer s’est même constitué pour défendre la maternité des Lilas. Le collectif a produit des visuels pour appeler au rassemblement de soutien à Lilas avec des slogans comme « On s’est battu-e contre la stérilisation, on se battra pour donner naissance dans de bonnes conditions ! » ou encore « Queer et trans, on veut des sages femmes en conséquence, pas des usines à naissance ». La composante trans et LGBT était d’ailleurs très visible lors du rassemblement du 21 octobre devant la mairie des Lilas avec les collectifs Front Transmasc et Inverti-es présents avec leurs banderoles et drapeaux, alors que l’appel au rassemblement a été relayé par XY Media, un média transféministe.

Au-delà des tensions budgétaires que partagent beaucoup de petits établissements de santé bénéficiant de financements publics, la maternité des Lilas est aussi menacée du fait des pratiques de soin défendues par l’équipe soignante. Inspirées par des pratiques critiques qui ont émergé à la fin des années 1960, réfléchissant à l’asymétrie de pouvoir favorisée par le système de santé capitaliste entre soignant et patient, les sages-femmes et autres soignantes des Lilas ont à coeur d’être attentives aux besoins des patient.e.s, de ne pas médicaliser l’accompagnement de la grossesse et de l’accouchement au-delà de ce qui est médicalement nécessaire ou de ce que souhaite la personne enceinte...

Or ces pratiques doivent faire face à l’organisation du financement du système de santé publique en France, dont une grande partie dépend de « l’activité » des établissements, calculée sur la base du nombre d’actes médicaux effectués et facturés à la sécurité sociale. De ce fait, les accouchements peu médicalisés, laissant du temps aux parturient.e.s, au sein d’une structure à taille humaine génèrent peu « d’activité », ce qui expose la maternité des Lilas à des pressions financières de la part de l’ARS.

Cela fait déjà près de dix ans que la maternité est régulièrement menacée de fermeture à cause de ses pratiques non conformes aux attentes néolibérales de l’État concernant le fonctionnement d’un établissement de santé. La maternité parvient toutefois à se maintenir, toujours en sursis, grâce à la mobilisation constante des soignantes, très attachées à leur structure et à leurs conditions d’exercice humaines, et au soutien des habitants des Lilas, des personnes qui ont fait l’expérience, directe ou indirecte, d’un accouchement à la maternité des Lilas.

Ainsi, la pétition initiée en mars 2022 contre la fermeture de maternité a reçu plus de 75 mille signatures sur Change.org. Mais comme en témoignent les soignantes, aujourd’hui, même ce large soutien local ne suffit plus pour arrêter les intentions de l’ARS. En effet, la tendance à la fermeture des maternités est nationale : comme l’évaluait DREES en 2018, c’est près de deux tiers des maternités qui sont fermées en France en 40 ans. Une politique de santé publique qui fait en sorte qu’aujourd’hui, par rapport aux années 70, on compte trois fois moins de maternités pour autant de naissances.

La mobilisation en défense de la maternité des Lilas menée par les soignant.e.s qui sont accompagné.e.s dans leur lutte par des patient.e.s, dont de nombreuses personnes trans et queer, montre des prémices d’une alliance qui sera nécessaire pour défendre le système de soins face aux plans du gouvernement. C’est un combat auquel doit se joindre l’ensemble du mouvement féministe et LGBTQI+ car la casse néolibérale du système de santé c’est une véritable menace aux droits trans et reproductifs.

La lutte contre la fermeture de la maternité des Lilas concerne tous.tes les habitant.e.s de Seine-Saint-Denis, département de France métropolitaine où le taux de natalité est le plus élevé, alors qu’il s’agit dans le même temps d’un désert médical, et d’un département populaire, où le besoin d’un accès aux soins gratuit est d’autant plus grand. Mais il s’agit aussi d’une lutte pour un autre système de santé, qui remette les besoins des patient.e.s au centre de la prise en charge médicale plutôt que les profits de la classe capitaliste.


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