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Edito

Mouvement des agriculteurs : les blocages se poursuivent, le gouvernement cherche une porte de sortie

La déclaration de politique générale de Gabriel Attal n’a pas calmé la colère, loin s’en faut. Les agriculteurs continuent de bloquer plusieurs axes majeurs, tandis que des convois progressent vers Paris.

Nathan Deas

31 janvier

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Mouvement des agriculteurs : les blocages se poursuivent, le gouvernement cherche une porte de sortie

Crédit photo : Révolution Permanente

Mardi, à l’Assemblée nationale, à l’occasion de son discours de « politique générale », Gabriel Attal s’était pourtant efforcé de commenter le moins possible l’embrasement du monde agricole. Très attendu sur le sujet, le nouveau chef de l’exécutif a pris grand soin en effet à ne pas dévier du projet de « guerre sociale » fixé pour l’occasion. Une politique de l’autruche qui, sans surprise, n’a pas permis de calmer la colère des agriculteurs, et qui a surtout fait signe vers les fragilités du macronisme.

Comme un symbole des difficultés auxquelles pourrait s’affronter l’autosatisfecit gouvernemental sur sa capacité à détricoter encore le code du travail et les droits des chômeurs, ce mercredi, le maintien de la mobilisation des agriculteurs a fait office de premier « choc de réalité » pour le tout nouveau chef de l’exécutif. Sur les autoroutes A6 (entre Savigny sur Orge et Antony), A10 (à Janvry, dans l’Essonne), A1 (dans le Pas-de-Calais), A2 (idem), A16 (dans l’Oise), mais aussi dans les Hauts de France où des agriculteurs français et belges ont bloqué en commun la frontière sur l’A2, ou encore dans le Loiret, sur l’A63, l’A89 et l’A10 (dans le Sud-Ouest), aux environs de Lyon, Nantes, Dijon et Stasbourg, etc., des blocages ont continué en effet de se tenir ce mercredi.

Alors que plusieurs centaines d’agriculteurs tiennent depuis deux jours un « siège » de Paris, les blocages continuent de se renforcer autour de la capitale. Au total en Île-de-France, huit autoroutes étaient concernées par des barrages et fermetures partielles ce mercredi selon le site de suivi du trafic Sytadin. Un convoi venu du Lot et Garonne est lui parvenu, en coupant à travers champs, à échapper à la tentative de blocage policier dans le Loiret, et serait désormais à 30 kilomètres de Rungis. Une situation qui pourrait tendre la situation dans les jours à venir alors que le gouvernement a fixé main dans la main avec la FNSEA des « lignes rouges » tandis que des blindés de la gendarmerie ont entouré toute la journée Rungis et les principaux aéroports franciliens. Selon l’AFP, près de 79 personnes auraient été interpellées cet après-midi, dont plusieurs agriculteurs, notamment du syndicat d’extrême-droite la Coordination rurale, aux alentours du plus grand marché de produits frais au monde.

De premiers éléments de répression qui pourraient en annoncer de suivants, et qui surtout font signe vers la fébrilité grandissante du gouvernement, confronté à une crise dont il est bien en peine de s’extirper. Pour autant, s’il n’est pas exclu que le gouvernement durcisse la répression dans les jours à venir, si le mouvement venait à s’attaquer comme à Rungis plus directement aux profits des capitalistes, le maintien à la direction du mouvement de la FNSEA mène à l’impasse et pourrait également signifier la levée prochaine des blocages. Aussi, la suite du mouvement reste incertaine. Le premier ministre dans cette perspective, s’il n’a rien annoncé de nouveau, n’a pas manqué, à nouveau mardi, de lancer des appels de phare en direction du syndicat patronal.

Prenant l’exemple de Haute-Garonne, où, en quelques jours, quatre arrêtés préfectoraux ont été supprimés, le chef de l’exécutif a indiqué que cette logique serait élargie à l’ensemble des départements. En clair, pour éviter de poser la question des salaires et des conditions de vie des agriculteurs, le gouvernement reprend à son compte les poncifs libéraux de la FNSEA sur les « normes » et promet de « déverrouiller » et « débureaucratiser » davantage dans les jours à venir, dans sa droite lignée de ce qu’il avait annoncé vendredi, depuis une ferme bovine de Haute-Garonne. Et peu importe si ces normes sont là pour protéger la santé des populations et préserver les écosystèmes. Pour répondre à la colère, il faut désormais faire sauter le maximum de règles écologiques comme le demandent la FNSEA et la Coordination rurale.

Une perspective sans issue et à laquelle le mouvement ouvrier aurait une réponse à apporter. Alors que la colère à la base ne désemplit pas, et que la stratégie de la FNSEA qui combine blocages sous protection policière et négociations avec le gouvernement ouvre la voie à ce que les organisations d’extrême-droite jouent la radicalité pour canaliser la colère sur la droite, les directions syndicales ne peuvent pas rester muettes. La semaine dernière, l’appel de la CGT à créer « des convergences sur les moyens de bien vivre au travail » est allé dans le bon sens, il faut désormais un plan concret articulé autour d’un programme en direction des agriculteurs pauvres.

Un programme qui s’oppose à la FNSEA et aux directions actuelles du mouvement et qui cherche à remettre en question le système agraire actuel qui est destiné à servir les grands capitalistes de l’agro-alimentaire, la grande distribution et les banques. Un programme qui profite de la situation ouverte par la colère des agriculteurs pour poser la question des conditions de vie et des revenus de l’ensemble du monde du travail, alors que l’inflation continue de ronger tous les portefeuilles. Un programme d’autant plus urgent et nécessaire, qu’il y a urgence à lutter contre l’influence de l’extrême droite et des syndicats traîtres vendus aux lobbys agroalimentaires et retourner la colère légitime des petits agriculteurs contre les vrais responsables : le grand patronat.


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