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Entretien

Menace de fermeture d’un local syndical : la CGT blanchisserie fait reculer le CHU de Bordeaux

Au début de l’été, la direction du CHU de Bordeaux mettait un ultimatum à la CGT blanchisserie pour quitter son local. Mise sous pression par les réactions du syndicat, des buandiers et de leur soutien, celle-ci s’est vue obligée de reculer. Retour sur cette bataille toujours en cours avec Marie-Laure Charchar, secrétaire générale de la CGT Blanchisserie et militante à Révolution Permanente.

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Menace de fermeture d'un local syndical : la CGT blanchisserie fait reculer le CHU de Bordeaux

Crédits Photo : Révolution Permanente

Le 15 juin dernier, la CGT Blanchisserie du CHU de Bordeaux recevait de la direction du CHU une mise en demeure de quitter leur local syndical avec la menace d’y être exclue de force. Se cachant derrière une volonté de centraliser et « mutualiser » dans un seul local syndical l’ensemble des CGT sur le site hospitalier de Haut-Lévêque, et la création d’une salle de repos pour les buandiers, en réalité, la direction du CHU opérait une attaque antisyndicale et anti-démocratique inédite. En s’attaquant au syndicat de la blanchisserie, le CHU cherchait à s’en prendre à un syndicat combatif, proche des travailleur·euses exerçant dans des conditions de travail rudes. Montrant le caractère politique de cette attaque, celle-ci s’inscrivait déjà plus largement dans un contexte national de répression syndicale à la sortie du mouvement contre la réforme des retraites.

Après cette annonce, la riposte n’a pas tardé du côté de la CGT et des buandiers : avec une pétition qui a trouvé un écho important, un recours gracieux déposé par le syndicat, et une mobilisation de soutien lors d’une journée de grève, ils ont réussi à faire reculer la direction. Dans cette interview, Marie-Laure Charchar, secrétaire générale de la CGT blanchisserie et militante à Révolution Permanente nous explique où en est la situation et ce qu’ils comptent faire pour faire reculer la direction jusqu’au bout.
 
Révolution Permanente : En juin dernier, la direction générale du CHU a décidé de mettre en demeure le local de la CGT Blanchisserie. Une offensive anti-syndicale et antidémocratique contre laquelle vous avez décidé de riposter. Après le succès de la pétition et une première journée de mobilisation le 31 août dernier, comment se trouve la situation aujourd’hui ?
 
Marie-Laure  : À l’heure actuelle, nous sommes toujours dans notre local. Après le rassemblement de fin août, la direction nous a reçu en nous offrant un délai supplémentaire avec une date d’expulsion pour le 30 septembre, ce que nous avons refusé. Nous quitterons notre local quand le nouveau au sein de la nouvelle blanchisserie sera prêt. Cependant, ce projet de construction au sein du site hospitalier Haut-Lévêque est encore très vague, en réalité il n’est pas prêt de voir le jour, et en tout cas nous ne bougerons pas avant.

Après une seconde journée de grève le 1er septembre, nous avons eu une nouvelle réunion avec la direction. Au cours de cette réunion, comme c’est souvent le cas en cas de conflit, la direction a évoqué la possibilité de faire intervenir son cabinet d’avocat. Cependant, étant donné le rapport de force que nous avons réussi à instaurer, en particulier grâce au recours gracieux que nous avons déposé pour remettre en question la légalité de l’expulsion, la direction a une fois de plus repoussé la date d’expulsion au 30 octobre.

Ainsi, nous en sommes là : la direction sait qu’elle marche sur des œufs, consciente que nous sommes prêts à la défier à chaque étape, ce qui la pousse à tergiverser et à repousser l’échéance en quête d’une solution.
 
 RP : Justement, depuis le début, vous vous organisez pour mettre la pression sur la direction qui se voit aujourd’hui contrainte de repousser la date d’expulsion, comment analyses-tu ce recul ?  
 
 Marie-Laure  : Je considère que ce recul n’est pas anodin. Sur le plan juridique, la direction se trouve dans une situation où elle sait très bien qu’elle n’a pas de justification solide pour nous expulser. Bien qu’elle avance l’argument « d’un déménagement » pour tenter de justifier sa position, il est clair qu’elle cherche en réalité à nous priver de notre local, étant donné que la nouvelle blanchisserie n’est pas encore opérationnelle et donc incapable de nous accueillir. Son intention de nous éloigner de la blanchisserie et de nos collègues est claire, elle veut nous couper la proximité avec les buandiers et elle ne peut pas le cacher. Il faut voir cette décision comme une tentative d’intimidation. Je connais très bien le DRH, c’est une personne que je n’ai jamais vu céder du terrain. Si aujourd’hui il fait marche arrière, c’est qu’il n’est pas totalement sûr à 100%.
 
De notre côté nous sommes déterminés et nous refusons de quitter ce local depuis le début. De plus, les nombreux soutiens que nous avons reçus en dehors du CHU, comme la CGT cheminot, le secrétaire départemental de la CGT, les travailleurs de l’énergie ou encore la présence de jeunes lycéens et étudiants autour de l’organisation Le Poing Levé lors du rassemblement de soutien, ont permis d’accentuer le rapport de force, de renforcer notre position et de faire peur à la direction. 
 
RP : Comment ont réagi tes collègues buandiers d’une part à la volonté de la direction de vous exclure du local, et d’une autre, à cette première victoire, après le recul de la direction ?
 
Marie-Laure  : Mes collègues, qu’ils soient syndiqués ou non, n’ont pas compris pourquoi la direction nous menaçait. Enlever un local syndical qui est un lieu ou l’on peut venir pour s’organiser et défendre nos droits au travail, a été inacceptable pour eux. Pratiquement tous les employés de la blanchisserie, soit 120 personnes, ont signé la pétition rejetant cette menace et ont clairement exprimé leur soutien.

En outre, nous étions une vingtaine en grève le 1er septembre pour exprimer notre désaccord. Ce qui a été le pire pour nos collègues, ce sont les explications de la direction qui propose de créer une salle de repos supplémentaire pour «  la qualité de vie au travail » à la place du local syndicale. À la blanchisserie, nous travaillons dans des conditions difficiles au quotidien, la direction n’a jamais rien fait pour les améliorer. Par conséquent, tout le monde a immédiatement perçu à la fois l’hypocrisie de cette proposition, mais surtout le mépris qu’elle manifeste à notre égard.
 
RP : A la veille du 13 octobre, journée nationale de mobilisation appelée par l’intersyndicale, comment vois-tu la suite de ce combat ? 
 
 Marie-Laure  : Le 13 octobre, nous serons en grève pour plusieurs raisons. Tout d’abord, la question des salaires devient urgente, avec une inflation qui continue de précariser notre situation, même si nous n’avons aucune illusion sur le fait qu’une seule journée de grève et de mobilisation ne suffira pas à obtenir des augmentations. Nous en profiterons également pour défendre notre local, mais surtout, de manière plus général, les droits syndicaux.

Le droit de se syndiquer et de s’organiser est fondamental, surtout au moment où on nous annonce que les politiques d’austérité qui détruisent nos hôpitaux vont se renforcer. De plus, depuis plusieurs mois, nous assistons à un renforcement de la répression syndicale partout en France, à l’image du procès à l’encontre de mes camarades énergéticiens à Bordeaux qui se sont mobilisés lors de la bataille contre la réforme des retraites.

Au niveau national, il y a une véritable vague de répression : en septembre, 400 syndicalistes de la CGT étaient visés par des poursuites judiciaires, c’est énorme. Je pense qu’on doit se serrer les coudes, former un front commun contre cette répression qui vise à saper dès maintenant les résistances de demain. Car il y en aura, que ce soit contre l’inflation, les attaques anti-social, sécuritaire ou réactionnaire, on est face à de nombreux défis. Nous devons construire des convergences, en particulier sur la question de la répression, qui dépasse largement le milieu syndical. Que ce soit pour notre local ou pour le procès de mes camarades de l’énergie, nous devons avoir un mot d’ordre unique : "S’ils s’en prennent à l’un d’entre nous, ils s’en prennent à tous !"


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