Dès 7h30 du matin, les lycéens de Paul Robert aux Lilas se sont donnés rendez-vous pour organiser un blocus de leur établissement. Avec poubelles, cadenas et pancartes. Certaines contre Macron et le 49.3 - qui rappellent que la colère et les braises de la lutte contre la réforme des retraites sont toujours là -, les autres affichant un refus net du Service National Universel.

Un blocus qui fait suite à l’appel à la grève et au blocus lancé par le Mouvement National Lycéen (MNL) à l’occasion de la journée de mobilisation intersyndicale du 13 octobre et auquel se sont joints des lycées à Tours, au Mans, ou encore à Lyon.

SNU, Parcoursup, à la poubelle !

Dans leur communiqué, les lycéens de Robert s’emparent des revendications et des craintes de la jeunesse que le gouvernement veut enrégimenter, censurer, opprimer. « On bloque aussi par rapport au SNU : on veut nous obliger à juste respecter des ordres et nous apprendre à porter des armes. Le gouvernement veut utiliser la jeunesse. Et pour le SNU, ils utilisent la tirelire de l’Education, alors qu’ils pourraient augmenter les professeurs », explique M*, lycéen aux Lilas. Pour rétablir la vérité face aux mensonges du ministre Gabriel Attal, et alors que 3000 postes sont encore vacants depuis la rentrée, ils dénoncent notamment le manque d’enseignants “Moi par exemple, depuis la rentrée je n’ai pas de prof d’histoire, car l’éducation a du mal à recruter.”, rappelle M*.

Baisse des budgets de l’Education, détérioration des conditions d’étude, les lycéens sont en colère contre les affectations forcées comme E* qui n’a pas choisi d’être au lycée Paul Robert : “je devais aller en CHAM (classe musique) avec des horaires aménagés mais je n’ai pas été pris, car la classe Cham a fermé. Du coup, j’ai dû abandonner mon orchestre pour cette année et dire stop à la musique”. “En réponse à l’appel du mouvement Lycéen, on s’oppose d’abord à Parcoursup, qui est un système dégueulasse qui trie les lycéens”. Instauré en 2018, Parcoursup compte en cette rentrée 2023 plusieurs centaines de bacheliers non affectés ou affectés dans des formations choisies par défaut (de place ailleurs), et qui fait la part belle aux écoles privées, payantes et sources d’inégalités, et dont les diplômes ne sont parfois mêmes par reconnus.

En pleine organisation des Jeux olympiques 2024, les élèves dénoncent également le manque d’installations sportives. Alors que Paris se prépare à accueillir un événement sportif, les lycéens du 93, eux, se retrouvent toujours confinés dans des installations vétustes ou occupées pour accueillir les jeux.

« On nous crache à la gueule ! »

Une colère qui dépasse les revendications lycéennes, et s’inscrit dans un contexte global de mobilisation pour les salaires et contre la précarité. “On suit l’appel aux mouvements de grève : la question de l’inflation, ça concerne aussi nos familles, et c’est un problème plus général qui touche les lycéens. C’est pourquoi on s’est mobilisés aujourd’hui”, explique A*, lycéenne, qui rappelle l’aggravation de la précarité étudiante. “Les bourses ne décollent pas, les fournitures augmentent : on est aussi touchés par l’augmentation du cout de la vie. Pour nos parents, c’est toujours plus la galère”

Solidarité palestinienne et opposition à l’islamophobie d’Etat

Revendications féministe, anti-islamophobes et pro-palestiniennes se mêlent à la colère lycéenne. L’interdiction de l’abaya est pointée du doigt dans le communiqué publié lors du blocus, qui dénonce “les pressions et le contrôle exercés sur le corps des femmes”. Parmi les poubelles, sur le trottoir, bien accroché entre deux poteaux, un drapeau palestinien rappelle que la colère lycéenne dépasse les frontières nationales. Les lycéens expriment ainsi leur soutien aux habitants de Gaza bombardés au quotidien par Tsahal et le gouvernement israélien.

Au Lilas, une jeunesse qui montre la voie à suivre !

Dans une rentrée sociale marquée par l’atonie, alors même que l’inflation se poursuit et que la précarité augmente, et que l’école est une fois de plus au cœur des offensives autoritaires, sécuritaires et islamophobes du gouvernement, la mobilisation au lycée des Lilas donne à voir un autre son de cloche. A quelques mois des révoltes de juin, elle montre une jeunesse toujours mobilisée malgré la répression, mais aussi une jeunesse qui, dans ses revendications, associe revendications économiques, contre la précarité et l’inflation, contre la casse du service public d’éducation, et revendications féministes, antiracistes et internationalistes, alors que la guerre fait à nouveau rage en Palestine. Un exemple dont devraient s’inspirer les directions syndicales pour construite la mobilisation large et offensive dont nous avons aujourd’hui besoin face aux attaques et aux crises qui ne font que se multiplier et s’amplifier.