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Fonctionnaires. Valls se fout du monde, le gouvernement s’assoit sur ses propres règles

Il n’y a pas que sur la Syrie que Manuel Valls sait se montrer martial. Il est capable, également, de prendre des « décisions exceptionnelles » compte tenu d’une configuration « inédite », lorsque celle-ci prévaut. De quoi s’agit-il ? De Bachar al-Assad ? De dangereux djihadistes qui menaceraient le territoire hexagonal ? Non, simplement de fonctionnaires.

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Jean-Patrick Clech

Depuis le début de l’année 2014, des négociations préalables avaient été engagées entre, d’un côté, le gouvernement et Marylise Lebranchu, ministre de la Fonction publique, et de l’autre, l’ensemble des organisations syndicales siégeant au Conseil commun de la fonction publique. Leur objet ? Le PPCR, le protocole d’accord sur les Parcours Professionnels, les Carrières et Rémunérations. Derrière le sigle bien technocratique se cache une sorte de coup de Trafalgar contre les trois fonctions publiques que seul un gouvernement « de gauche » aurait pu imaginer.

Matignon avance que l’accord permettrait de revaloriser les salaires à l’embauche, notamment pour les catégories situées au bas de l’échelle de la fonction publique, ainsi que les salaires en fin de carrière. En échange de quelques miettes, ce que le PPCR prévoit, surtout, c’est une atomisation des trois fonctions publiques, au nom de la mobilité et du développement des carrières, de même que le gel du point d’indice, le paramètre qui sert à calculer le traitement des agents, qui a été bloqué depuis Sarkozy et qui ne devrait pas être revu avant 2017.

Même si le gouvernement veut faire passer des vessies pour des lanternes, les salariés du public ne sont pas des ânes et on comprend qu’une bonne partie d’entre eux soient loin de vibrer d’enthousiasme pour le projet. Si les directions de Sud et de FO avaient annoncé, la semaine dernière, leur intention de ne pas signer le protocole, la direction de la CGT a attendu jusqu’à la dernière minute pour signaler, mardi, qu’il se ferait sans elle. Le petit problème, pour les socialistes, c’est qu’à elles trois ces organisations pèsent 48,5% aux élections et que, face à elles, les organisations signataires, bons toutous du gouvernement, CFDT, CFE-CGC, CFTC, FA-FP, FSU et UNSA ne représentent que 46,7%. Or, en fonction des accords de Bercy, signées en 2008 et censées être en vigueur depuis 2013, un accord dans la fonction publique ne peut être mis en place que s’il est validé par des organisations qui pèsent, au moins, la moitié des suffrages aux élections.

Qu’importe, donc, les accords de Bercy. Qu’importent, également, les promesses de Lebranchu qui avait prévenu que, même si elle avait engagé sa personne dessus, le projet serait retiré s’il n’était pas paraphé par des organisations représentant au moins 50% des voix aux élections professionnelles. Le gouvernement n’en a cure et à « situation exceptionnelle », il emploie le passage en force. C’est ce qu’a déclaré Valls à l’antenne de France Inter, mercredi 30 septembre, en annonçant que le projet serait, de toute façon, validé. Et en présentant, au passage, une conception assez particulière de la démocratie : les partisans du « oui » ne sont, certes, pas majoritaires (46,7%), mais pas plus que les partisans du « non » (48,5%). Après l’expérience grecque, il est vrai que la « gauche », désormais, prend ses aises avec les résultats des urnes. Avec une bonne dose d’incohérence, néanmoins, Valls s’est également justifié en pointant que les signataires sont « très largement majoritaires » (59%) dans la fonction publique d’Etat, l’une des trois concernées par l’accord. Pour dire les choses autrement, pour reprendre la bonne vieille maxime de tous les putschistes, « les règles n’engagent que ceux qui les respectent ».

« Manuel Valls piétine le dialogue social ». Le titre n’est pas celui d’un article repris dans une feuille d’ultra-gauche, mais d’un papier signé Arnaud Lavorel et publié, hier, dans le très libéral et très pro-patronal journal de droite L’Opinion. Le patronat n’a guère envie, dans le contexte actuel, d’avoir des directions syndicales à cran, à quinze jours de la conférence sociale de l’Elysée. Pas plus que de braquer les syndicats dits « contestataires » dont les directions, en réalité, répondent davantage à la pression de leur base. Alors que le Medef se propose de torpiller le Code du Travail à grands coups de « référendums internes », à l’instar de celui organisé chez Smart, que le gouvernement « de gauche » crache à la figure des syndicats fait mauvais genre.

Reste une question : comment faire pour donner raison à ces Messieurs, pour que leurs craintes voient effectivement le jour ? Car après avoir affirmé que les mesures du PPCR sont « insuffisantes » (CGT), dénoncé la « mascarade » du gouvernement (FO) ainsi que son « passage en force » (Sud), il s’agit maintenant de savoir comment les salariés du public, toutes fonctions confondues, titulaires et précaires, vont se mettre en ordre de bataille pour contrer ce texte néfaste, antisocial et, de surcroit, illégitime dans son adoption. Sur les détails du plan qu’il faudrait adopter, les directions syndicales sont, pour l’instant, muettes. Pourtant, dit L’Opinion en choisissant (très mal) ses mots, « la place [est] ouverte à la surenchère », c’est-à-dire à l’engagement du rapport de force. Si c’est le patronat qui le dit…


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