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Palestine

Trêve à Gaza : Israël déserte les négociations et poursuit le massacre

Refusant toute trêve permanente et s’opposant à la libération de certains détenus palestiniens, l’Etat d’Israël s’est absenté des négociations pour contraindre le Hamas à ratifier un accord tout à son avantage.

Enzo Tresso

4 mars

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Trêve à Gaza : Israël déserte les négociations et poursuit le massacre

Crédit photo : capture d’écran GPO, X

Alors que les négociations entre Israël et le Hamas ont repris, sous l’égide des Etats-Unis, le 6 février, à Doha, à Paris et au Caire, elles se sont nettement complexifiées. Refusant l’accord-cadre proposée par les négociateurs du Hamas, qui prévoyait une sortie de crise en trois temps, le retrait des forces israéliennes et la mise en place d’une trêve permanente, Netanyahou n’a cessé de faire pression, depuis le 7 février, sur le mouvement palestinien. Menacée par une opposition populaire sans cesse croissante, Netanyahou fait le pari de la guerre permanente pour conserver le soutien de l’aile la plus extrême de sa coalition et pour essouffler la société civile israélienne afin de se maintenir au pouvoir.

Arrivé au Caire le 20 février, Ismaël Haniyeh avait revu à la baisse les objectifs du mouvement. En lieu et place de la libération de 1500 détenus palestiniens en échange des femmes, des enfants et des vieillards retenus prisonniers, le Hamas s’était alors aligné sur la proposition étatsunienne : 40 prisonniers israéliens seraient libérés en contrepartie de 350 à 400 détenus palestiniens pendant une trêve dont le caractère provisoire ou permanent faisait encore l’objet de discussions. Refusant cette seconde proposition, Israël a néanmoins, infléchi en partie sa ligne diplomatique, le 26 février, en consentant, en outre, à libérer des membres dirigeants des différentes composantes de la résistance palestinienne. En raison de son opposition à la libération des palestiniens ayant commis des « crimes anti-israéliens », motif d’inculpation très fréquemment utilisé par les forces de répression en Cisjordanie, et de sa volonté de poursuivre la guerre quoi qu’il en coûte, Netanyahou refusait de satisfaire les autres revendications du mouvement. Ce samedi, les Etats-Unis ont annoncé qu’Israël avait accepté, en outre, une trêve de six semaines.

Exigeant une trêve permanente et le retour des Gazaouis déplacés depuis le début de l’invasion terrestre, le Hamas n’a pas répondu à la contre-proposition israélienne. Les termes d’un éventuel échange de prisonnier ne satisfaisant pas non plus ses objectifs. Khalil al-Hayya, qui préside la délégation du Hamas, arrivé hier au Caire, aurait ainsi souligné les points litigieux.

D’une part, le Hamas tente d’obtenir la libération de davantage de Palestiniens détenus dans les prisons israéliennes et d’y inclure des prisonniers purgeant des peines de prison à vie. D’autre part, le Hamas exige une trêve permanente. S’il se donne encore pour objectif stratégique la « libération totale » de la Palestine historique, il défend, depuis la seconde Intifada, un compromis tactique : sans reconnaître l’Etat d’Israël, il défend l’idée d’une trêve permanente avec l’Etat colonial qui permettrait de cohabiter avec lui à long terme tout en maintenant formellement ses revendications maximalistes [1]. Après les attaques du 7 octobre, il semble que la direction du Hamas ait vu dans la campagne génocidaire de Tsahal à Gaza une opportunité de parachever ses buts tactiques : espérant qu’Israël perdrait une partie du soutien international dont il bénéfice et que la brutalité de l’offensive à Gaza découragerait les tentatives de normalisation des relations diplomatiques entre les Etats arabes et l’Etat colonial, la guerre de Gaza devait être l’occasion de parvenir à une solution politique.

Constatant le refus d’Israël d’accéder à ces demandes, le Hamas a laissé la proposition israélienne sans réponse. L’Etat colonial a opté, de son côté, pour la politique de la chaise vide et a annoncé qu’il n’enverrait aucune délégation décisionnaire au Caire tant que le Hamas n’aurait pas revu à la baisse ses demandes. Après que le Qatar a informé David Barnea, le chef du Mossad, que le Hamas refusait de fournir la liste des otages encore en vie et n’acceptait pas les termes de l’échange de prisonniers, Israël a décidé de ne pas se présenter aux négociations pour faire pression sur le mouvement palestinien. Au-delà des négociations, Netanyahou tente de faire plier le mouvement en menaçant d’envahir Rafah. Alors que les bombardements s’intensifient sur la ville où se sont réfugiés 1,4 million de Palestiniens, exilés par l’invasion du nord de l’enclave, des membres proches du cabinet de guerre affirment que le gouvernement israélien pourrait lancer des incursions terrestres limitées pour donner plus de crédibilité aux menaces d’une invasion terrestre dont les conséquences seraient apocalyptiques.

Lire aussi : La guerre sans fin : Israël resserre son étau sur Rafah


[1Nicolas Dot-Pouillard, La mosaïque éclatée  : une histoire du mouvement national palestinien, 1993-2016, Paris, Actes sud, 2016, pp. 79-81.



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