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Le pire des repères ou le dernier refuge

Qui est le prochain secrétaire général de l’ONU ?

« La pire des cavernes de brigands » ou « véritable nid de voleurs », au gré des traductions. C’est ainsi que Lénine qualifiait, à son époque, la Société des Nations (SDN), l’ancêtre de l’actuelle Organisation des Nations Unies. Mais les brigands, comme on le sait, ont souvent besoin d’un faux-nez, d’une façade présentable, d’un porte-parole à première vue bien sous tout rapport. C’est le rôle dévolu au secrétaire général de l’ONU : un type encravaté au visage sympathique, douloureusement-impuissant- mais-faisant-tout-son- possible-pour-la-paix alors que son boulot c’est, précisément, de ficher la paix aux impérialistes ainsi qu’aux grandes puissances qui, dans l’ombre, tirent les ficelles. Ciro Tappeste

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Quoi de mieux pour jouer aux progressistes du XXI° siècle qu’une femme secrétaire générale ? Aussi saugrenue que cela puisse paraître, l’idée était portée par la Russie de Vladimir Poutine, grand féministe devant l’Eternel, qui couplait à cette suggestion l’idée que la future secrétaire générale vienne d’Europe de l’Est. Cela aurait donc représenté une sorte de coup double : la première femme secrétaire générale issue d’un pays de l’ex-glacis soviétique.
Au sein du Conseil de Sécurité, néanmoins, guerre en Syrie oblige, la requête n’a pas fait l’unanimité. On s’est donc replié sur un candidat plus consensuel mais censé, également, incarner une droiture morale à toute épreuve et un humanisme chevillé au corps. « Pour valider les pires des coups tordus, quoi de mieux qu’un socialo ? ». On peut s’imaginer que c’est ce qu’aurait soufflé un fonctionnaire international lors d’une réunion portant sur les nominés au poste de secrétaire général. « On a déjà eu l’Egyptien ancien ministre de Sadate et signataire de la ‘paix’ avec Israël, Boutros Boutros-Ghali, le ghanéen ami des impérialistes, Kofi Annan, pour finir avec ban Ki-Moon. Quoi de mieux qu’un social-démocrate proto-austéritaire ? »

C’est donc dans les rangs du Parti Socialiste Portugais, artisan du détournement et de la défaite de la Révolution des Œillets au nom de la « gauche », qu’on est venu prendre l’homme : Antonio Guterres, politicien ambitieux dans sa jeunesse, catholique fervent, socialiste comme d’autres vont à la pêche à la mouche. Le candidat idéal, donc : ayant suffisamment donné de gages au système pour être crédible, lors de ses deux mandats en tant que Premier ministre du Portugal, au cours desquels les prémisses de l’austérité bruxelloise sont mises en place ; mais également, pour être présentable, apparaissant comme suffisamment progressiste après dix années de direction du Haut Commissariat pour les Réfugiés, avec les succès que l’on sait.
Au cours du vote de mercredi pour l’élection du successeur de Ban Ki-Moon, les cinq membres permanents du Conseil de Sécurité, disposant tous d’un droit de veto, ont voté, avec des bulletins de couleur différente des dix autres membres. Il a donc été possible de voir pour la première fois qu’aucun de ces cinq membres permanents n’envisageait de bloquer la candidature d’Antonio Guterres, bien au contraire. Si Moscou, Londres, Washington, Pékin et Paris, capitales mondiales des droits de l’homme et du progressisme, ont fait campagne pour un homme « ayant le cœur à gauche », selon ses propres dires, c’est bien parce qu’il aura surtout le cœur à défendre leurs intérêts.

Voilà donc un ancien vice-président de l’International socialiste au secrétariat général de l’ONU. Depuis leurs fiers et loyaux services rendus aux marchands de canon pendant la Première Guerre Mondiale jusqu’à leur fervent crédo austéritaire au niveau européen ces derniers années, il semblerait bien, pour pasticher le titre très sérieux quoi qu’en forme de boutade du dernier écrit du communiste de conseil Paul Mattick, que la « social-démocratie soit devenue le dernier refuge de la bourgeoisie ».


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