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Argentine. La lutte à Jujuy se poursuit malgré la répression policière brutale

La répression policière, tout comme la lutte des différents secteurs, s’intensifient à Jujuy. Les mineurs, les éboueurs et les travailleurs municipaux se sont joints aux manifestations. Une situation dans laquelle l’extrême gauche argentine joue un rôle fondamental.

Carla Biguliak

23 juin 2023

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Argentine. La lutte à Jujuy se poursuit malgré la répression policière brutale

Crédits photo : La Izquierda Diario

Depuis plusieurs semaines, les rues de la province de Jujuy, dans le nord de l’Argentine, ont été la scène de grandes manifestations menées par les enseignants, les communautés originaires et différents secteurs de la population de la province, auxquels se sont joints d’importants secteurs du mouvement ouvrier tels que les mineurs et les éboueurs.

Les mobilisations ont éclaté sur l’exigence de meilleurs salaires, mais aussi pour exprimer le rejet de la réforme constitutionnelle promue par le gouverneur de Jujuy. Il s’agit d’une réforme qui vise à consolider le régime politique, tout en criminalisant davantage la protestation sociale et en violant les droits des communautés originaires par la spoliation de leurs terres.

La réponse du gouvernement Morales à la mobilisation a consisté dans l’application d’une répression brutale. Des dizaines de personnes ont été gravement blessées et les détenus font état de passages à tabac et de violences dans les commissariats. Les scènes actuelles rappellent les périodes les plus sombres de l’histoire de l’Argentine, avec des arrestations totalement illégales dans des voitures privées sans plaques d’immatriculation, effectuées par des groupes spécialisés non identifiés.

« L’un des détenus doit être porté parce qu’il est incapable de marcher après avoir été libéré de la prison d’Alto Comedero à Jujuy. Immédiatement, on entend “Morales, ordure, tu es la dictature” ».

Face à la répression féroce, les travailleurs sont solidaires et font front

Les enseignants ont joué un rôle primordial dans la lutte contre la réforme constitutionnelle à Jujuy. En grève, ils sont descendus massivement dans la rue pour réclamer de meilleures conditions de travail, de meilleurs salaires et pour défendre l’enseignement public. Leur persistance et leur force dans la lutte ont forcé le gouverneur à reculer et à convoquer des réunions de négociation, où en plus de proposer une augmentation de salaire, a dû s’engager à ne pas déduire les jours de grève de leurs salaires.

Mais loin de se limiter au secteur de l’éducation et aux communautés originaires, différents secteurs de travailleurs se sont joints à cette lutte importante. Les mineurs ont également fait preuve de solidarité avec la mobilisation, en participant aux barrages routiers des communautés originaires et en s’affrontant à la répression. Leur présence dans les manifestations renforce le rejet du modèle extractiviste qui cherche à piller les ressources naturelles de la région, en particulier le lithium, en foulant aux pieds les droits des communautés et l’impact sur l’environnement.

Les éboueurs se sont eux aussi joints avec force à la lutte du peuple de Jujuy. Après une violente répression mardi dernier, qui a donné lieu à plusieurs arrestations, dont celle d’un éboueur, leurs collègues n’ont pas hésité à passer à l’action et à se mettre en grève. Ils exigeaient la libération de tous les prisonniers politiques du gouvernement Morales. Une revendication défendue par Alejandro Vilca, député du Parti des Travailleurs Socialistes au sein du Front de Gauche et des travailleurs, et également éboueur, qui a exprimé son soutien à la lutte en exigeant la libération de tous les détenus.

« Aujourd’hui, mes collègues éboueurs se sont également rendus au commissariat pour réclamer la libération des détenus. La solidarité entre les travailleurs, les communautés indigènes, les familles est énorme. Jujuy est toujours debout et cela s’exprime aussi dans ces liens qui se tissent ».

Contre l’hypocrisie des partis capitalistes, l’extrême gauche argentine montre la voie

La réforme du gouverneur Morales été voté par sa coalition de droite mais aussi par une partie de l’opposition liée au gouvernement fédéral péroniste (PJ). Une vote qui démontre clairement que tous les partis de la bourgeoisie, de la gauche à l’extrême droite, s’accordent pour confier les ressources naturelles aux grandes multinationales impérialistes.

La seule force politique qui dénonce ce pillage massif et qui s’engage dans la lutte dans les rues avec les travailleurs et les peuples originaires, en affrontant la répression, est le FIT-U (Front de Gauche), une coalition d’organisations anticapitalistes en Argentine. Ce n’est pas un hasard si, lors des dernières élections de 2019, cette coalition a obtenu le meilleur résultat depuis la fin de la dictature, en obtenant 13 % des voix.

En ce sens, le rôle des membres de ce front à l’Assemblée constituante a été fondamental pour dénoncer la réforme constitutionnelle et la spoliation des terres et des ressources naturelles. Les dirigeants du PTS, organisation sœur de Révolution Permanente qui fait partie de la FIT-U, ont également soutenu la grève générale en appui à la lutte des travailleurs et du peuple de Jujuy, ont fermement dénoncé la répression policière et se tiennent en première ligne pour exiger la libération de toutes les personnes arrêtées et la fin de la répression. En même temps, ils avancent la proposition de nationaliser les ressources en lithium sous le contrôle des travailleurs et des communautés originaires, en remettant en question le modèle économique d’exploitation et les méthodes extractivistes qui menacent l’accès à l’eau.

Nous apportons toute notre solidarité à nos camarades du PTS argentin et à l’ensemble des manifestants interpellés. De la France à l’Argentine, leur répression violente ne fera jamais taire notre colère. Solidarité ! Plus que jamais il faut une mobilisation générale pour s’opposer à la répression et faire retirer la réforme de Morales !


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