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Corée du Sud

Corée du Sud : le chef de l’opposition poignardé, les tensions politiques s’aggravent

A quatre mois des élections législatives, le leader de l'opposition sud-coréenne Lee Jae-myung a été poignardé le 1er janvier lors d'un acte de campagne. Un événement qui révèle la profonde tension politique, dans un pays marqué par l'alternance des deux principaux partis et une série d'attaques contre le monde du travail.

Tommaso Luzzi

8 janvier

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Corée du Sud : le chef de l'opposition poignardé, les tensions politiques s'aggravent

Lee Jae-myung en 2019

Le 1er janvier, le leader de l’opposition sud-coréenne Lee Jae-Myung a été poignardé lors d’un événement de campagne à Bassan, il est depuis sorti des soins intensifs. Cette affaire survient dans un climat politique tendu, à quatre mois des élections législatives en Corée du Sud. M. Lee, avocat et ancien maire, est le chef du Parti démocrate, arrivé deuxième lors de l’élection présidentielle de 2022, moins de 1 % des voix derrière le candidat de droite du Parti populaire et actuel président, M. Yoon Suk-Yeol. La vie politique de Corée du Sud est dominée par un système bipartite, les candidats de ces deux partis ont recueilli à eux deux 96 % des suffrages en 2022.

Une attaque en pleine campagne des élections législatives

Les deux principaux partis se font face dans la campagne en cours des élections législatives. Après une légère baisse de popularité du Parti populaire depuis son arrivée au pouvoir, ces élections s’annoncent très serrées. Mais Lee est aussi confronté à une crise interne qui, selon Marie-Orange Rivé, maîtresse de conférence à l’Université Paris-Cité, menace le parti d’une scission, avec un secteur de l’organisation réclamant des réponses plus progressistes et plus agressives face aux politiques antisociales du gouvernement.

Dans ce pays qui a une longue histoire de collusion entre les grandes entreprises et l’État, Lee fait l’objet d’accusations de corruption lorsqu’il était maire de Seongnam, accusations qu’il nie. Ses partisans accusent le président actuel de mener des enquêtes à caractère politique, avec plus de 360 perquisitions dans l’entourage de l’opposant.

Il semble que la crise stagnante du système politique s’aggrave, les deux partis n’étant pas en mesure d’attirer davantage d’électeurs. Ce qui semblait être un troisième parti émergeant en 2020, le Parti de la justice, marqué par des positions social-démocrates, a maintenant pratiquement disparu en raison de désaccords internes. Min, membre de March to Socialism (MTS), organisation trotskiste de Corée du Sud, revient sur la situation : « Le problème est qu’il n’y a pas de force politique pour remplacer le vulnérable Yoon Seok-yeol, et que le soutien au mouvement ouvrier est faible. Selon plusieurs sondages, de nombreuses personnes considèrent le problème de la structure duale du marché du travail comme la question centrale des problèmes de l’emploi ».

La politique sud-coréenne marquée par les attaques contre la classe ouvrière

Depuis son arrivée au pouvoir, le président Yoon a mené une attaque en règle contre les travailleurs et les syndicats. Ces attaques se sont traduites par des perquisitions dans les bureaux des syndicats et par l’arrestation de membres de diverses associations favorables à la paix avec la Corée du Nord, sous prétexte qu’ils seraient des espions au service du pouvoir nord-coréen. Cette situation est liée aux pressions plus larges que subit la bourgeoisie sud-coréenne en raison de la politique atlantiste de Yoon, qui accentue les tensions avec la Chine, la grande puissance économique de la région. L’épisode le plus marquant de la séquence est sans doute l’auto-immolation, le premier mai, d’un dirigeant local du syndicat des travailleurs de la construction pour dénoncer la mise en examen pour corruption dont il faisait l’objet.

En réponse aux attaques du gouvernement, la direction de la Confédération coréenne des syndicats (KCTU) a été contrainte d’adopter une attitude plus combative que les années précédentes. En juillet, elle a lancé une grève de deux semaines, demandant la démission du gouvernement Yoon. Cependant, le mouvement a été divisé par secteur, chacun faisant grève quelques jours à la fois, ce qui a empêché la construction d’un véritable rapport de force avec le gouvernement.

En outre, pour l’emporter les syndicats doivent élargir la lutte pour y intégrer la défense des travailleurs irréguliers, qui travaillent sans contrats officiels en tant qu’intérimaires ou pour des plateformes digitales. Ils et elles ne sont pas protégés par les mêmes lois sur le travail que leurs collègues sous contrat, alors qu’ils travaillent souvent côte à côte. Aujourd’hui, on estime qu’ils représentent environ 40 % de la force du travail du pays. Ainsi comme l’explique Min : « Sans solidarité avec les luttes des travailleurs irréguliers, les syndicats réguliers actuels de Corée du Sud ne sont pas en mesure de faire face à l’attaque idéologique du capital contre les "syndicats aristocratiques". Bien que de nombreux travailleurs irréguliers se soient organisés et aient lutté de manière militante au cours de la dernière décennie, ils restent une minorité dans l’ensemble du mouvement syndical, et les syndicats réguliers ne sont pas sincèrement solidaires du mouvement des travailleurs irréguliers. C’est pour cette raison que l’attaque de Yoon contre les syndicats a un certain effet. »


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