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La Izquierda Diario
2 de octobre de 2016 Twitter Faceboock

Lutte à Latécoère Toulouse
Fin des négociations à Latécoère : la direction attaque

Ce vendredi 30 septembre avait lieu le dernier jour de négociation à Latécoère, autour du Plan Social. En parallèle, un piquet de grève et un barrage filtrant informaient tous les ouvriers de la situation le matin, avant la tenue d’une rassemblement à la préfecture dans l’après-midi.

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Mercredi 28, lors de l’avant-dernière réunion de négociations, plus d’une centaine d’ouvriers s’étaient mis en grève, contre le PSE.
Jeudi, après s’être rassemblés devant le site de Périole, les ouvriers ont entamé un tour des bureaux du site, pour chercher à convaincre les cadres, qui seront également touchés par ces suppressions de poste, de rejoindre la mobilisation.
Une grève qui se poursuivait le vendredi, dernier jour de négociation. Et une chose est claire, c’est que la Direction mène l’offensive dans ces négociations ! Dans le protocole d’accord, qui sera proposé à la signature dans la semaine, les suppressions d’emplois ne sont pas remises en cause. Mais pire, même le chèque de départ représente une misère. Dans la grille proposée, en fonction de l’âge et de l’ancienneté, les indemnités supra-légales représenteraient entre 5 et 11 mois de salaires. En comparaison, la moyenne des indemnités qu’avaient arraché les Molex était d’environ 60.000€. Des indemnités d’autant plus ridicules quand on connait la situation financière de Latécoère.
Si la Direction peut se permettre ce niveau d’offensive, c’est qu’elle ne trouve pas (encore ?) en face d’elle une grève massive de tous les salariés, unis, et refusant les termes du PSE...

Une bataille pour le chèque ou pour l’emploi ?

Depuis le début du conflit, on sent dans les différentes prises de paroles, tracts, et discussions, que la question n’est pas tranchée. S’agit-il de refuser le PSE et ses suppressions d’emplois ou d’en accepter le cadre en négociant seulement les indemnités, et plus généralement les "mesures d’accompagnement" ?

Cela n’a l’air de rien, mais les revendications avancées jouent souvent un rôle important. Dans le cadre d’une lutte ouvrière, elles ne sont pas une simple demande au patron, mais permettent surtout de fixer un but, et donc de se serrer les coudes autour d’un objectif à atteindre. Se battre pour le maintien total des emplois n’est pas la même chose que se battre pour des indemnités de licenciements plus élevées. Quand dans les ateliers, les collègues expliquent que "faire grève juste pour le chèque, ça ne m’intéresse pas", ils témoignent de cela.

C’est le bilan, amer, que tirait récemment Xavier Mathieu, figure emblématique des Continental, expliquant la casse sociale qu’avait représenté le PSE (et son lot de suicides, de chômeurs et de dépressions) face à laquelle les indemnités avaient en fait été bien peu de choses… Habituellement, s’engager dans une lutte n’est pas un choix que l’on prend à la légère. C’est pour cette raison que pour entraîner largement, la question est aussi de proposer une bataille et des objectifs « qui vaillent la peine ».

Cette question s’était aussi posé dans la lutte de PSA Aulnay contre leur PSE, et les ouvriers en tirent un bilan similaire sur les indemnités.

En Espagne, les travailleurs de Panrico avaient tenté de représenter un tel pôle à une large échelle, en menant une grève très longue pour « 0 licenciement, 0 baisse de salaires », refusant ainsi d’être divisés entre « ceux qui partent » et « ceux qui restent » (et qui, soit dit en passant, seront censés assumer la charge de travail supplémentaire qu’effectuaient avant les licenciés).

Mobilisation ou négociation ?

En réalité, ce sont surtout les syndicats qui veulent seulement négocier qui ont tendance à opposer les deux. Allant jusqu’à expliquer que la mobilisation pourrait être vue comme une provocation, et porter préjudice aux revendications. Ces organisations syndicales, FO et CFE-CGC, s’attribuent même le mérite des avancées sur le nombre de suppressions d’emplois, passées de 314 dans le projet initial à 220 aujourd’hui. Sans voir le rôle qu’à joué la mobilisation des salariés, et surtout la crainte d’une grève comme en décembre 2015, ou supérieure. C’est sur cette base que ces deux organisations ont expliqué aux salariés pourquoi il ne fallait pas participer à la grève impulsée par la CGT (seule, mais après de nombreuses tentatives d’initiatives communes). Tout en essayant d’apparaître comme les représentants de l’unité syndicale, en diffusant un tract commun, ce qui n’était pas arrivé depuis longtemps, et en pointant du doigt un mouvement de grève sectaire, voire "trop politique".

Unité syndicale ou unité des salariés ? Et unité sur quelles bases ?

A Latécoère comme ailleurs, les divisions et tensions entre syndicats sont toujours vues d’un mauvais oeil par les travailleurs. Ce sentiment, cette prétention à lutter "tous ensemble", est profondément juste et a souvent fait la force des mouvements ouvriers.
Premièrement cependant, cet argument de l’unité est parfois détourné, ou sert en tout cas à masquer une autre question. L’unité, oui, mais à quel prix et sur quelles bases ? En effet, il peut exister entre différentes organisations des conceptions très différentes, et donc des divergences sur des questions centrales. Par exemple sur les revendications à mettre en avant, comme le disions plus haut. Concrètement, si des syndicats sont prêts à accepter les termes d’un PSE, et n’en démordent pas, les autres doivent-ils forcément s’y plier sous prétexte d’unité syndicale ?
C’est là où une deuxième question émerge : parle-t-on d’unité des syndicats ("organisations représentatives") ou des salariés ("représentés") ?

Le 22 septembre, nous écrivions que « Un second pas [après le rassemblement du 21] pourrait être l’organisation d’une assemblée entre les travailleurs de Latécoère (syndiqués ou non syndiqués, et peu importe le syndicat) avec un temps suffisant de discussion, non seulement pour voter la poursuite de la grève, mais également pour réfléchir tous ensemble à un véritable plan de bataille afin d’étendre la mobilisation (liste de revendications, comment convaincre les collègues en interne, faire connaître la lutte en externe, organiser la convergence avec d’autres secteurs en lutte…) ».
Ce type d’assemblée, de comité, ou de cadre de discussions, par exemple, pourrait permettre à tous les ouvriers qui le souhaitent de s’impliquer plus concrètement dans la réflexion sur ce qu’il faut faire, sur les rythmes, etc.. (Le tract de la CGT du 19/09 d’appel au rassemblement du 21 était une initiative qui allait dans ce sens). C’est-à-dire que tous les ouvriers, y compris non-syndiqués, deviennent acteurs de la lutte, à 100 %. C’est en développant tout ce potentiel de résistance et de réflexion qui existe en chaque ouvrier, que les syndicalistes combatifs qui ont impulsé la mobilisation et pris de nombreuses initiatives depuis le départ peuvent être renforcés. C’est en voyant l’exemple d’une mobilisation organisée largement, démocratiquement, et où chacun peut être utile, que beaucoup (qui peuvent notamment avoir des préjugés sur les syndicats, sur les « radicaux » ou les « jusqu’au-boutistes ») peuvent faire un premier pas, ou en tous cas un pas plus concret, vers la lutte.

En face ils sont organisés, nous devons l’être aussi

Ils est souvent frappant de voir à quel point les patrons et leurs équipes dirigeantes se préparent à un conflit, tirent des bilans, et réfléchissent en stratèges pour limiter les possibilités de résistance.
Un ancien ouvrier de Molex racontait par exemple comment on apprenait dans les écoles de management qu’il fallait, lorsqu’on annonce un PSE aux salariés, préparer une valise avec des affaires de rechange, en cas de séquestration par les ouvriers (tirant le bilan des séquestrations de 2009 contre de nombreux PSE).
Mais s’ils ont leurs stratèges, nous devons avoir les notres. C’est en cela que, indépendamment des possibilités restantes pour le conflit lui-même, il est important de réfléchir à ce qui a déjà été réussi ou raté, à tirer des éléments de bilan, pour que ce conflit ne soit pas seulement une lutte passagère, mais aussi qu’elle serve d’expérience, "d’école de lutte"... Non seulement aux grévistes eux-mêmes, mais aussi plus largement, aux salariés et à la jeune génération qui a lutté contre la loi Travail.
C’est en tirant des bilans précis, et en les étudiant sérieusement, que nous serons plus forts dans les batailles futures qui ne manqueront pas d’arriver.

 
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