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La Izquierda Diario
22 de mars de 2022 Twitter Faceboock

Ghjustizia, verità è autodéterminazione pè a Corsica !
Yvan Colonna (1960-2022). Etat français (vraiment) assassin !
Claude Piperno

Trois semaines d’agonie. C’est le temps qu’a duré le coma d’Yvan Colonna, prisonnier politique corse, sauvagement agressé par un co-détenu dans la maison centrale d’Arles, le 2 mars dernier, alors qu’il était censé être particulièrement surveillé. Le gouvernement Macron craint un embrasement généralisé, à moins de vingt jours du premier tour. Il a bien raison.

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Trois semaines de coma : c’est la peine qui s’est ajoutée à la réclusion criminelle à perpétuité à laquelle avait été condamné Yvan Colonna, militant indépendantiste, condamné pour sa participation au commando qui a exécuté en février 1998 le préfet Claude Erignac à Ajaccio. Il est décédé à l’hôpital de la Timone, à Marseille, lundi en fin d’après-midi, sans avoir pu revoir sa famille et ses enfants.

Malgré près de vingt années passées derrière les barreaux, toutes les demandes de rapprochement de Colonna de son île natale, pour purger sa peine à la prison de Borgo, avaient été rejetées. Pour lui comme pour deux autres militants nationalistes, condamnés à la prison à vie pour la même affaire. Les gouvernements successifs, sous Sarkozy, bien sûr, mais aussi sous Hollande et sous Macron avaient systématiquement refusé de remplir leurs obligations en matière de politique carcérale, car cela aurait impliqué de lever le statut de Détenu Particulièrement Surveillé qui pesait sur Colonna ainsi que sur Alain Ferrandi et Pierre Alessandri.

On connaît la suite. Malgré cette surveillance toute particulière, Yvan Colonna est étranglé puis étouffé par un co-détenu le 2 mars alors qu’il se trouve seul dans une salle de la prison d’Arles. L’administration pénitentiaire, malgré les caméras de surveillance, met plusieurs minutes à intervenir. Lorsque Colonna est transporté par hélicoptère, en état critique, il est déjà trop tard. Quel rôle a joué l’administration pénitentiaire, le ministère de la Justice, le ministère de l’Intérieur et le gouvernement dans cette affaire où les zones d’ombres sont multiples ? Il n’en a pas fallu davantage pour déclencher, dans toute l’île, notamment chez les plus jeunes, de multiples mobilisations, dans toutes les villes du pays, rassemblant des dizaines de milliers de personnes au cri de « Statu francese assassinu » [« Etat français assassin »] et exigeant « Ghjustizia è verità per Yvan » [« Justice et vérité pour Yvan »].

Grandes manœuvres à la tête de l’Etat pour éteindre l’incendie

Après des dizaines de blessés dans les rangs des manifestants, compte tenu de l’extrême tension de la situation que les forces de répression ont eu du mal à juguler, le statut de DPS a été levé pour les trois militants nationalistes. Gérald Darmanin a par la suite été missionné par l’Elysée pour entamer un processus de « dialogue », de façon à tenter de faire baisser la tension et à gagner du temps.

Au programme de ces négociations avec les autorités élues de l’île, dans leur grande majorité autonomistes et indépendantistes depuis les élections de 2015, un possible statut d’autonomie élargie pour la Corse. A condition, bien entendu, que le pays reste dans le giron jacobin de la France et d’attendre qu’une prochaine mandature présidentielle tranche la « question corse ». Une façon, bien coloniale, de gagner du temps et de piétiner le droit élémentaire du peuple corse à l’autodétermination.

Autonomistes, indépendantistes et FLNC

Bien conscient que les forces autonomistes et indépendantistes sur l’île (Femu a Corsica, de Simeoni, Corsica libera de Talamoni et Partitu di a Nazione Corsa d’Angelini) étaient en train de perdre la main en dépit des appels au calme lancés en direction de la jeunesse, la Macronie entendait jouer la montre. Le décès d’Yvan Colonna va, bien entendu, rebattre les cartes. Dès lundi soir, la famille a fait savoir que c’était « le temps était au recueillement et au deuil ». Le mouvement corse, notamment les plus jeunes, ont entendu l’appel de la veuve et de la famille et l’île était étrangement calme, mardi, en dépit des calicots et des banderoles rendant hommage à Colonna suspendus aux façades de plusieurs bâtiments publics. La colère, néanmoins, gronde. Qu’en sera-t-il la cérémonie passée ?

Plus que jamais, ce qui n’est plus seulement une tentative d’assassinat mais un assassinat en règle, en prison, de Colonna, démontre qu’il n’y a rien à négocier avec cet Etat qui, a minima, a couvert l’homicide. Plus encore si cette négociation a pour cadre une simple promesse de discussion dont le socle est le rattachement, quoi qu’il arrive, de la Corse à la France. Gabriel Attal, au nom du gouvernement, a assuré que « toute la lumière sera faite sur l’enchaînement qui a conduit à cette situation qui n’est pas acceptable ». On est en droit de ne pas le croire, et ce d’autant que son patron, Emmanuel Macron, a eu le culot d’invoquer « l’esprit de responsabilité » et d’appeler au « calme ».

De son côté, le Front de Libération National Corse (FLNC), qui avait déposé les armes en 2014, prévient que « les combats de rue d’aujourd’hui seront les maquis de nuit de main » et menace de reprendre la lutte armée. Par-delà la discussion sur la question politico-militaire, qui revient à penser pouvoir résoudre la question nationale par un affrontement, asymétrique, sur le terrain des actions clandestines, avec l’Etat français, ce ne sont pas les « maquis de nuit », en l’occurrence les « nuits bleus » et les plasticages, qui sont capables de faire changer, radicalement, la situation. C’est la mobilisation collective et déterminée de la jeunesse, de la population en général et des travailleurs organisés en particulier qui le peuvent. C’est ce que les mobilisations de ces derniers jours ont d’ailleurs démontré.

Solidarité avec le peuple corse

En France, les organisations syndicales et politiques du mouvement ouvrier, au premier rang desquelles celles d’extrême gauche, ne peuvent continuer à rester les bras-croisées alors que des milliers de jeunes, de travailleuses et de travailleurs manifestent, en Corse, en se faisant réprimer, pour exiger que toute la lumière soit faite sur l’assassinat d’Yvan Colonna et pour un droit aussi élémentaire que la revendication de l’autodétermination. Continuer sur cette voie renforce, en dernière instance, non seulement la Macronie et le jacobinisme de toutes les forces politiques parlementaires mais également l’extrême droite française. Plus que jamais, toute notre solidarité vis-à-vis des manifestantes et des manifestants de Corse !

 
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