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La Izquierda Diario
12 de novembre de 2021 Twitter Faceboock

Tensions France - Etats-Unis
Kamala Harris à Paris : derrière la "réconciliation" affichée, les tractations diplomatiques se poursuivent
Alexis Taïeb

Durant son séjour à Paris, Kamala Harris a participé à consolider l’image de réconciliation entre les deux pays. Derrière les symboles, les tractations diplomatiques semblent avoir avancé sans effacer les contradictions.

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Deux mois après le soufflet imposé par Washington à la France sur l’affaire des sous-marins australiens, la vice-présidente des États-Unis, Kamala Harris, est à Paris ce mercredi afin de rencontrer Emmanuel Macron. Un entretien « substantiel » d’après l’Élysée qui ouvre 5 jours de discussions qui pourraient ressembler au pseudo-retour d’un multilatéralisme états-unien et le début d’une soi-disant « ère nouvelle », comme le déclaraient les deux parties.

Cependant, derrière les déclarations sur cette venue règne surtout la volonté pour les deux puissances impérialistes de renouer une alliance de longue date afin de défendre leurs intérêts respectifs à travers le monde. Au programme : sécurité, pandémie, climat ou encore espace, mais surtout le forum de Paris sur la Paix ce jeudi auquel les États-Unis n’ont pas participé depuis 4 ans et une conférence internationale sur la Libye ce vendredi. De quoi faire sourire de la part des Etats-Unis et de la France, respectivement premier et troisième exportateur d’armes au monde.

Pourtant, deux mois plus tôt, un incident diplomatique de taille avait lieu autour de la vente de sous-marins. Les Etats-Unis, avec la volonté de faire de l’Australie un pilier de l’endiguement maritime de la Chine en lui vendant des sous-marins à propulsion nucléaire, ont balayé d’un revers de mains le contrat de la dite « affaire du siècle » entre la France et l’Australie, brisant du même coup la confiance de Paris vis-à-vis de son allié historique Washington.

Or le ton semble déjà avoir changé entre les deux puissances qui discutent à nouveau ensemble de « l’avenir », comme le déclarait déjà Macron lors de sa rencontre il y a 12 jours avec Biden en marge du G20, à Rome. Cependant, pour le moment, ces déclarations restent à l’état de déclarations d’intentions, et la réconciliation entre ces puissances ne semble pas être encore totalement actée. En témoignent les mots prononcés par Macron lors de son entrevue avec Biden : « La confiance c’est comme l’amour, les déclarations c’est bien, les preuves c’est mieux ».

Un entretien substantiel

Une chose est sure, cette visite de Kamala Harris, qui vient tenter de parachever la discussion commencée par Macron et Biden il y a deux semaines, signifie surtout la volonté des deux parties de reprendre les discussions ensemble en vue des « semaines, mois et années à venir » comme déclarait l’actuel président de la France pour qui les élections présidentielles se rapprochent.

La France tente ainsi de sortir d’une crise de crédibilité à l’international. D’une part provoquée par l’humiliation infligée par cette alliance Aukus entre l’Australie, le Royaume-Uni et les États-Unis ; ces derniers ont confirmé, en préférant consolider une alliance avec ces pays plutôt qu’avec ses alliés traditionnels européens, les déclarations de Macron sur l’autonomie stratégique de l’Union européenne et la nécessité de la renforcer. En ce sens, Biden avait déclaré à Rome reconnaître « l’importance d’une défense européenne plus forte et plus opérationnelle », et « complémentaire avec l’Otan ». D’autre part, la crise de la France à l’international est due en grosse partie à la crise de l’impérialisme français en Afrique. A cet égard, le président français avait demandé le soutien des États-Unis dans son intervention au Sahel : Washington avait alors déclaré avoir « engagé des ressources supplémentaires au Sahel pour soutenir les efforts de lutte contre le terrorisme menés par la France et les autres États européens ».

Depuis leur réalignement stratégique face à la Chine, les États-Unis, de leur côté, ont également de grands intérêts à faire valoir en tendant la main vers la France et l’Union européenne. En effet, la superpuissance pourrait avoir besoin de ses alliés européens face à la Chine ou encore à la Russie dont le rapprochement inquiète la première puissance mondiale.

Derrière l’effet d’annonce, quelle intérêts pour les deux parties ?

En bref, cette entremise ce mercredi à l’Élysée n’a rien apporté de nouveau par rapport aux déclarations d’il y a deux semaines. Comme le rapporte Katie Rogers pour le NY Times : « Selon les experts, la prudence du voyage de Mme Harris est le signe que M. Macron a déjà obtenu une grande partie de ce qu’il a demandé, tant sur le fond que sur le plan diplomatique ».

En effet, ce qu’il y a à retenir de cette première entrevue entre les deux personnalités politiques, c’est un Macron qui cherche à se repositionner comme capable de redonner sa grandeur à la France sur un plan géopolitique à l’approche de la présidentielle qui arrive à grands pas et une volonté des États-Unis de se racheter auprès de la France après les tensions géopolitique provoquées par l’affaire des sous-marins.

En d’autres termes, cette entrevue n’est pour le moment qu’un effet d’annonce. La confiance brisée entre les deux parties mettra sûrement plus de temps à se reconstruire, et les volontés géopolitiques qui se cachent derrière ces annonces ont du mal à ne pas se voir. En effet, c’est bien dans la perspective de mener la bataille pour le partage du monde que ces deux pays se sont retrouvés, espérant pouvoir trouver des points d’entente, à l’image de cette déclaration de Kamala Harris qui a bon compte indiquant que les deux puissances « ont un désir commun d’être des leaders sur le globe pour assister les autres nations en ces temps tragiques » ; belle ironie quand on sait la responsabilité de ces deux pays dans les conflits qui parcourent le monde.

 
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