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10 de novembre de 2021 Twitter Faceboock

International
Soudan. Malgré une forte répression, la mobilisation contre la junte continue
Astrid Rivera

Alors que depuis plusieurs semaines, les travailleurs et le peuple soudanais se mobilisent contre la junte au pouvoir après un coup d’état militaire, la répression s’accentue. Dernièrement c’est le mouvement enseignant qui a été particulièrement réprimé.

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Crédit photo AFP

Depuis plusieurs semaines les soudanais se mobilisent contre un coup d’état militaire. Pour rappel, depuis avril 2019, le pays était aux mains d’un gouvernement de transition mis en place suite aux mobilisations populaires survenues après la hausse du prix du pain, pour mettre fin à la contestation et tenter de calmer la colère. C’est dans ce contexte que depuis maintenant deux ans, la menace d’un coup d’Etat existe. Et effectivement, l’armée est passée à l’action le 25 octobre dernier, prenant le pouvoir après un putsch mené par le général Abdel-Fattah Al-Bourhane. Depuis, les mobilisations et la résistance s’organisent et s’intensifient alors que la répression de l’armée fait rage.

Dernier phénomène en date, la répression contre la mobilisation des enseignants ce dimanche 7 novembre. En effet, les 7 et 8 novembre derniers, des comités de résistance et l’Association des Professionnels Soudanais appellent à deux jours de grève massive. Lors de ces journées ce sont plus de 119 arrestations qui ont lieu à Khartoum, capitale du pays, dont celles de 87 enseignants, comme nous le relayions alors sur Révolution Permanente. Si le milieu enseignant est alors particulièrement touché c’est parce que des milliers sont venus manifester devant le ministère de l’éducation nationale, ce dimanche 7 novembre, contre la nomination du nouveau directeur de l’organisme de l’éducation nationale, réputé proche d’Omar el-Bechir, ancien dictateur du pays. Les enseignants manifestants sont alors poussés à l’intérieur de l’enceinte du bâtiment, pour y être tabassés et gazés, puis arrêtés.

Ces arrestations recensées à Khartoum ne sont que la partie visible de l’iceberg répressif qui a lieu dans tout le pays, difficiles à suivre à cause de la coupure d’internet, mais laissent percevoir ce qui se trame dans le reste des grandes villes du pays. Un représentant de l’Association des professionnels soudanais, organisation à l’origine notamment de la mobilisation des enseignants, dénombre par ailleurs pas moins de 270 arrestations dans le pays comme le révèle Le Monde. L’intensité de la répression va même jusqu’au passage à tabac des familles suspectées proches des comités de résistance. Cette répression est alors souvent menée par des groupes de force de l’ordre habillés en civils dans des pick-up, aux méthodes d’une grande violence : gaz lacrymogène, militants pourchassés dans les rues, allant jusqu’à des tirs à balles réelles.

Face à cette situation, la stratégie répressive des putschistes ne s’arrête pas aux violences dans la rue qui dès le premier jour font autour de 10 morts et 150 blessés. Les militaires au pouvoir ont, dès le 25 octobre, coupé tout le réseau internet du pays, afin de bloquer l’organisation de la résistance, empêchant une partie de la population de voir les appels aux manifestations lancés, ou encore interdisent les syndicats.

Pourtant la mobilisation continue avec détermination, comme le montre l’agenda publié par l’un des Comité de résistance, publié sur un blog de Médiapart. S’ajoutent aux deux journées de grève, des manifestations, des prise de parole quotidiennes, mais aussi de nouveaux appels à la mobilisation pour ce samedi 13 novembre, sous le nom de “1 million dans la rue”, et derrière les mots d’ordres “Pas de négociation, pas de partenariat, pas de compromis”. Dans ce même article, le comité répète sa détermination : “notre mouvement révolutionnaire continue de monter jusqu’au jour de la remise du pouvoir aux civils”. Face à la répression et face aux blocages d’internet et des réseaux sociaux, ce sont aussi des méthodes alternatives qui sont utilisés par les résistants pour faire vivre la mobilisation, à l’image de l’utilisation des haut-parleurs des mosquées pour appeler aux dates de manifestation évoquée par le média anglais news in 24

Ces manifestants, qui ont appris des luttes de 2018-2019, savent s’organiser et résister, malgré la répression montante. Ils construisent des barricades sur les voies stratégiques de la ville, vidant les routes, et arrivent à sortir en nombre dans la rue, imposant ainsi leur rapport de force. De plus, cette résistance ne se concentre pas uniquement dans la rue : elle est soutenue et renforcée par les grèves qui continuent dans des secteurs stratégiques, tels que le pétrole, l’énergie ou la santé, en plus des mouvements d’enseignants et d’étudiants exposés précédemment. Le blocage de la plus grosse raffinerie du pays met notamment à mal le fonctionnement économique du pays et de ses voisins, démontrant le pouvoir de blocage des travailleurs dans ce secteur, comme nous l’exposions dans un précédent article, quelques jours après le coup d’Etat.

Dans un contexte de forte répression par les militaires, le mouvement de résistance ne faiblit pas et les appels à la désobéissance civile continuent à s’organiser pour mettre à mal la dictature, montrant la détermination du peuple et des travailleurs soudanais. Alors que les impérialistes avaient participé à la création d’un gouvernement de transition avec les militaires en 2019, ils dénoncent aujourd’hui le coup d’Etat à l’image du chef de la diplomatie américaine qui appelait le 25 octobre dernier les forces armées soudanaises « à libérer les dirigeants civils en détention et à garantir leur sécurité », pour la classe ouvrière soudanaise il s’agit de ne pas retomber dans leur piège, alors qu’ils souhaitent un retour à la situation précédente pour asseoir leurs intérêts.

La détermination de la classe ouvrière soudanaise doit déboucher sur la défense de cadres indépendants dans les lieux de travail, les comités de résistance et les quartiers pour lutter contre la dictature militaire et défendre ses propres intérêts.

 
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