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La Izquierda Diario
26 de juillet de 2021 Twitter Faceboock

Que font les directions syndicales ?
Pass sanitaire : les salariés qui refusent ne seront pas licenciés... mais ne toucheront plus de salaire !
Gabriella Manouchki

Alors que la mobilisation contre le pass sanitaire va crescendo, le gouvernement a dû faire des compromis avec la droite quant aux mesures les plus décriées de ce projet de loi, adopté ce dimanche en commission parlementaire. Particulièrement dénoncée, la mesure qui prévoyait d’autoriser les licenciements pour « défaut de pass sanitaire » dans les secteurs concernés a été remplacée par la possibilité pour les employeurs de suspendre les salaires, le temps que le salarié régularise sa situation, le poussant de fait à la démission.

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Ce dimanche, dans le cadre d’une commission mixte paritaire visant à trancher les débats relatifs à la gestion de la crise sanitaire, le projet de loi liberticide du gouvernement a été adopté par le Parlement. Il prévoit principalement l’extension du pass sanitaire aux lieux de loisirs accueillant plus de 50 personnes, la vaccination obligatoire pour les soignants et l’isolement pour les personnes testées positives au Covid-19.

Concernant le premier volet, le projet initial prévoyait d’autoriser les employeurs à licencier les salariés qui ne présenteraient pas de pass sanitaire valide. Cette mesure avait été adoptée en première lecture à l’Assemblée mercredi dernier. Couplée à la levée de la gratuité des test PCR dès la rentrée, elle a été largement dénoncée comme une obligation vaccinale masquée, portant atteinte non seulement aux libertés individuelles mais aussi au droit du travail, dont le secret médical protégeant les salariés de leur employeur constitue un principe fondamental.

Mais, face à l’élargissement de la mobilisation contre l’adoption de ce projet de loi, qui a rassemblé pas moins de 160 000 personnes ce samedi en pleine période estivale, le gouvernement a négocié avec la droite, majoritaire au Sénat, afin de couper l’herbe sous le pied des manifestants de toute urgence. Le texte adopté comprend ainsi des amendements de la droite qui, cherchant à tirer son épingle du jeu, tente d’apparaître comme une opposition modératrice face au gouvernement, sans cesser de donner des gages aux secteurs du patronat qui voient dans le pass sanitaire une opportunité de maximiser leurs profits en augmentant la pression sur les salariés. C’est ainsi que la possibilité de licencier dans les secteurs concernés pour « défaut de pass sanitaire » a été remplacée par… le droit jusqu’au 15 novembre au moins pour les employeurs de suspendre les salaires en cas de pass sanitaire invalide, le temps que le salarié « régularise » sa situation par la vaccination, la présentation d’un test négatif ou encore d’un certificat de rétablissement.

Cette mesure, présentée comme une concession de la part du gouvernement, ne l’est que grâce à la mobilisation, et elle reste formelle : la suspension du salaire, c’est-à-dire celle du contrat de travail, revient à un licenciement dans le cas de certains CDD ou des contrats d’intérim, qui sont déjà des contrats précaires. Plus largement, la suspension de salaire, qui peut durer 5 à 9 semaines sans compter le délai pour obtenir un rendez-vous dans le cas où un salarié serait obligé de commencer son parcours vaccinal avec un vaccin à deux doses, a vocation à inciter à la démission. En effet, à la différence des licenciements, cela permet aux employeurs de se débarrasser de salariés sans avoir à verser d’indemnité, ces derniers n’ayant alors même pas droit au chômage.

Cette mesure, qui représente un « no man’s land administratif » selon les propos du président de la CPME, soulève bien des questions en termes de droit du travail. Comme l’ensemble du projet de loi, elle devra être examinée par le Conseil Constitutionnel avant de pouvoir entrer en vigueur. Quoiqu’il en soit, elle constitue une attaque majeure contre le monde du travail, dont les patrons ont déjà su se saisir pour mettre la pression aux salariés, comme l’ont révélé les notes de service de plusieurs grandes enseignes du commerce

En ce sens, il est inconcevable que les syndicats, à l’échelle nationale, restent extérieurs à la mobilisation en cours contre le projet de loi et, plus largement, la gestion erratique de la crise sanitaire par le gouvernement depuis plus d’un an. Pourtant, c’est ce que l’on continue d’observer, même après deux semaines de manifestations dans lesquelles le terrain est laissé à l’extrême-droite, qui est libre de poursuivre son opération coup de com’ en s’appuyant sur la confusion générée par le gouvernement au sein de franges minoritaires, mais grandissantes, de notre classe. Si certaines sections syndicales combatives se sont positionnées sur la question, appelant à se mobiliser comme l’a fait la CGT TUI France à Paris, ou appelant à ne pas contrôler le pass sanitaire dans le cas des cheminots de SUD Rail, le chef de file de la CGT Philippe Martinez ne s’est pas exprimé depuis le lendemain des annonces de Macron, où il avait affirmé avec raison que « mieux vaut convaincre que contraindre », sans pour autant appeler à la mobilisation. Le communiqué publié mercredi dernier par la direction confédérale de la CGT ne mentionne même pas les manifestations et se contente d’interpeller les députés.

Les interpellations des directions syndicales depuis leur base, à l’instar de celle de Laurent Degousée de SUD Commerce et Rafael Cherfy de la CGT Chronodrive doivent être entendues, et portées au-delà de la question du pass pour commencer à construire une solution de fond à la crise sanitaire - précisément ce que le projet de loi n’est pas - comme nous l’écrivions samedi : « Au-delà de l’articulation de la lutte contre le pass sanitaire avec le refus des mesures anti-sociales du gouvernement, porter dans le mouvement un programme sanitaire ouvrier est fondamental. Un programme qui doit articuler défense de la vaccination et des moyens de la mettre en œuvre - sur un plan national comme international par la levée des brevets - avec la revendication de moyens pour les hôpitaux mais aussi d’une véritable stratégie de prévention entre les mains des travailleuses et travailleurs pour en finir avec la gestion autoritaire des vagues successives générées par les variants. Un programme dont la défense devrait aller de pair avec une campagne active dans les entreprises et les quartiers populaires pour convaincre du bien-fondé de la vaccination pour protéger notre camp social et en finir avec l’épidémie. »

 
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