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La Izquierda Diario
29 de mars de 2021 Twitter Faceboock

Nouvelle génération ouvrière
Rozenn, licenciée par Chronodrive : « J’ai lancé l’alerte sur le sexisme et le gaspillage alimentaire »
Rozenn Kevel, CGT Chronodrive

Nous relayons ici l’intervention de Rozenn, étudiante et salariée de Chronodrive licenciée pour avoir dénoncé le harcèlement sexiste au sein de l’entreprise. Le 27 mars, était organisée la première grève au sein de l’entreprise pour exiger la réintégration immédiate de Rozenn et l’abandon des sanctions !

Link: https://www.revolutionpermanente.fr/Rozenn-licenciee-par-Chronodrive-J-ai-lance-l-alerte-sur-le-sexisme-et-le-gaspillage-alimentaire

Vous ne vous imaginez même pas a quel point ça fait très chaud au cœur de voir tout le monde devant moi, c’est ultra émouvant, cette solidarité elle me réchauffe le cœur tous les jours, j’ai reçu des dizaines de messages de soutien tous les jours, de gens qui me connaissaient pas, qui me donnaient de la solidarité et de la force. C’est cette solidarité qui m’a permis de convaincre mes collègues, qui m’a donné de la force face à ma direction qui est là, en train de me regarder. C’est grâce à vous, à tous les soutiens extérieurs, on a plus de 20000 personnes qui ont signé une pétition, on a lancé une caisse de grève qui récolté plus de 3000 euros

C’est cette caisse de grève qui permet aux collègues d’avoir la sécurité de se mobiliser en ayant quelque chose dans le frigo, pouvoir payer leur loyer et surtout de se mobiliser en solidarité, et montrer qu’on est solidaires entre collègues !

Merci beaucoup à mes collègues qui se sont mobilisés pour la première fois de leur vie, c’est des gens qui sont étudiants travailleurs qui ont 18, 19, 22 ans, qui au début ne savaient pas comment faire grève et qui se sont mis en grève pour la première fois de leur vie ! C’est aussi la première grève de Chronodrive alors… joyeux anniversaire Chronodrive !

C’est un truc de fou, dans la grande distribution on est énormément à être des étudiants travailleurs et on est payés une misère, on est nombreux à se casser le dos tous les jours, moi je me suis cassé le dos, je faisais des arrêts maladie à 18 ans pour gagner 400 balles par mois, c’est même pas le prix de mon loyer. C’est ça le sort qu’on réserve aux étudiants : devoir aller dans des boites comme ça qui te payent une misère. C’est assez impressionnant qu’on soit 20 grévistes alors qu’on a jamais eu de tradition de lutte !

Aujourd’hui moi je peux pas me mettre en grève, parce que j’ai reçu hier ma lettre de licenciement pour faute grave parce que j’ai fait un tweet qui dénonçait le greenwashing de Chronodrive, j’ai fait un tweet qui disait que la pub qu’essaie de faire Chronodrive, qui se dit écolo et contre le gaspillage alimentaire .. et bien c’est pas la vérité. Cette pub elle est mensongère car moi en tant que salariée je devais jeter des kilos de bouffe tous les jours, dans la poubelle et pas dans la banque alimentaire… Alors qu’on est 70 % d’étudiants à travailler à Chronodrive, et qu’on connait le contexte de détresse chez les étudiants… Alors que mes frères et mes sœurs étudiants font des heures de queue pour avoir un colis alimentaire, pour avoir ne serait-ce qu’un kilo de pâte et un peu de beurre. On n’a même pas le droit de récupérer ce qui est jeté dans les poubelles sinon on est accusés de vol et on est licenciés. C’est ça que j’ai dénoncé, c’est la vérité de nos conditions de travail, c’est la vérité de notre vie en tant qu’étudiant et travailleur ! Et c’est ça aujourd’hui qu’on me reproche apparemment, sauf que moi j’y crois pas du tout. A partir de quel moment on licencie une personne pour faute grave pour avoir dit la vérité sur l’entreprise ? Aujourd’hui on me reproche d’avoir fait un tweet mensonger, d’avoir abusé de ma liberté d’expression. Mais je n’ai pas abusé de ma liberté d’expression, j’ai dit la vérité sur le gaspillage dans l’entreprise.

Moi je me considère comme une lanceuse d’alerte sur le gaspillage alimentaire, je me considère comme une lanceuse d’alerte sur le sexisme qu’on peut subir en tant que femme. Parce qu’en plus de la précarité, en tant que femme on a une double peine : on subit le sexisme. Et c’est surtout pour ça aujourd’hui qu’ils veulent me dégager de l’entreprise, parce qu’on est la jeunesse qui relève la tête face a nos conditions de travail précaire, on est la jeunesse qui relève la tête face au sexisme. On en a marre de venir au travail pour se faire toucher le cul, on en a marre de venir au travail pour recevoir des mains au cul, des commentaires sur comment tu devrais t’habiller, ou sur quel jean ton collègue préfère ! Tout ça on en veut plus et la direction n’jamais rien vis à vis de ces comportements-la. Moi quand je suis arrivée dans l’entreprise très clairement j’avais l’impression d’être un bout de viande, ça se faisait devant la direction et elle n’a jamais rien dit !

Et ça c’est pas le pire, puisque moi j’ai accompagné au travers de la section syndicale des collègues qui se faisaient harceler, qui se faisaient harceler sexuellement depuis des années. Et ça faisait des années que la direction ne disait rien et n’arrangeait pas la situation. Tout ce qu’on lui proposait comme débouché c’était la démission. mais en fait on est jeunes, on est précaires, on n’est pas ici parce qu’on en a envie. On est obligées, quand t’es une femme et que tu es précaire de rester dans ce genre de boite. C’est pour ça qu’aujourd’hui je vais lutter contre ce licenciement avec vous, avec tous, on va se battre pour un féminisme qui est lutte de classes, on va se battre au sein de Chronodrive ! On va se battre comme pendant la la conférence de presse le 8 mars avec les Ibis Batignolles, les Monoprix, les travailleuses de McDroits !

Et on va continuer de réaffirmer qu’on va pas laisser la question du sexisme à nos patrons, on va pas laisser la question du gaspillage et de la lutte pour l’écologie aux patrons de la grande distribution qui participent directement au gaspillage alimentaire et aussi à la précarité alimentaire ! On ne va pas leur laisser décider ce qu’ils vont faire de nos vies ! Moi je ne suis pas d’accord que Chronodrive ils puissent nous donner des miettes, qu’ils me donne seulement 400 balles par moi, qui me paient même pas mon loyer, même pas ma bouffe et quand ils en ont marre de moi il me dégagent… Je ne vais pas laisser passer ça, on va se battre contre ça, je vais aller aux Prud’hommes, je ne vais pas les laisser faire, je vais récupérer mon taf et surtout on va continuer à se mobiliser !

On a commencé à prouver qu’on ne va pas les laisser gérer ces questions-là, on est une vingtaine de grévistes aujourd’hui et on va montrer qu’on est déterminés à se battre ! Moi je suis très fière de voir que la majorité des grévistes c’est des hommes qui apportent leur solidarité pour soutenir une femme qui a lutté contre le sexisme, il n’y a rien de plus impactant que ça pour montrer qu’on ne va pas compter sur nos patrons, on a des intérêts qui sont différents. Et moi en tant que femme, biensûr que je vais lutter contre le sexisme, mais surtout je vais lutter avec tous mes collègues hommes et femmes, avec mes collègues qui se sont fait sucrer leur prime pendant le premier confinement, avec mes collègues qui se cassent le dos et se font exploiter au même titre que moi, et pas avec mon patron qu’elle soit femme ou homme ! D’ailleurs le PDG qui est entrain de me licencier aujourd’hui c’est une femme.

Nous on va se battre entre salariés, et surtout cet exemple-là, cette mobilisation interne, mais aussi toute la solidarité extérieure, ça ne doit pas s’arrêter aux portes de Chronodrive, ça doit aller dans tous les Carrefours, dans tous les Chronodrive, dans tous les Monoprix, au delà du secteur de Chronodrive, faut que ça aille dans toutes les entreprises possibles et qu’on apporte cette solidarité a tous les salariés. Et cette solidarité, ce rapport de force il se fera grâce à la grève ! On va pas s’arrêter la on va continuer et moi j’irai aider les salariés de toutes les entreprises qui veulent se relever, toutes les femmes qui veulent se relever ! Je suis très fière de voir qu’ici aujourd’hui il y a des organisations politiques, syndicales, féministes, des étudiants et c’est avec cette alliance la qu’on va gagner, par la grève, par la solidarité !

 
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