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La Izquierda Diario
18 de février de 2021 Twitter Faceboock

Raffineurs
« Il va y avoir des morts ». A Melun, les Grandpuits mettent l’État face à ses responsabilités
Corentin Lev

Les raffineurs menaient ce jeudi une nouvelle action devant la DIRECCTE, afin d’interpeller l’Etat sur les dangers qu’impliquerait la validation du plan social de Total.

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En grève depuis le 4 janvier pour faire face au plan de reconversion voulu par Total, qui menace pas moins de 700 emplois, les raffineurs s’opposent au saccage de l’emploi dans la région et au greenwashing de Total. Depuis un mois et demi, les travailleurs défient ainsi le géant pétrolier. Après une grève reconductible de plus d’un mois, suspendue le 11 février dernier, les raffineurs sont catégoriques : la lutte pour l’emploi continue.
 
Hier, ils étaient ainsi réunis aux côtés de leurs soutiens devant la DIRECCTE, pour une première action. L’objectif : ne pas lâcher Total sur le terrain des suppressions d’emplois et des problèmes de sécurité qui vont directement découler de celles-ci, mais surtout mettre la pression aux services de l’Etat chargés de valider ou non le plan social Les grévistes s’érigent en effet contre le risque d’un « Lubrizol bis » ; une épée de Damoclès que Total s’apprête, à coup de licenciements, à faire peser au-dessus des têtes, non seulement des raffineurs, mais aussi des habitants de la Seine-et-Marne.
 
« On est là devant la DIRECCTE pour lui rappeler ses responsabilités, la mettre face à ses responsabilités. La DIRECCTE a aujourd’hui le pouvoir d’empêcher 700 suppressions d’emplois » est ainsi intervenu Adrien Cornet, délégué CGT à la raffinerie de Grandpuits. « Il va y avoir des morts et on ne peut pas laisser faire, nous nous sommes responsables ! » a-t-il ajouté.
 

 
Un constat appuyé par les nombreux soutiens présents. Parmi eux des travailleurs du pétrole, venus soutenir leurs collègues. « Il y a déjà 35 ans, Grandpuits, Donges, Feyzin menaient des combats communs pour préserver l’emploi. A Donges c’était donc important d’être là aujourd’hui, mais aussi d’être présent en grève les 3 et 4 février derrière. La lutte continue ! » est ainsi intervenu Fabien Privé-Saint-Lanne, secrétaire de la CGT de la raffinerie de Donges. « Vous avez su résister, vous avez mis le doigt là où ça fait mal, sur la sécurité, sur l’environnement » a ajouté de son côté un militant CGT de la raffinerie de Normandie.
 
Par-delà la préoccupante question de la sécurité, les raffineurs ont insisté sur un autre problème d’envergure : celui de l’impact dramatique qu’aura le projet de Total sur la vie des travailleurs touchés. « Si le PSE est signé dans cet état là ça veut dire pas de congé, stress au travail, condition au travail déplorable, des heures pas possibles, surcharge de travail. Et les gens, ils vont finir en dépression, et même peut-être par se suicider ! » a ainsi rappelé Paul, raffineur à Grandpuits et militant CGT. Un constat confirmé par David, ancien gréviste de la raffinerie de Flandres qui en a fait la dramatique expérience. « J’ai vécu la même chose que vous à Flandre. J’ai une pensée pour vos familles, j’ai dû partir à Normandie et j’ai pris deux ans à prendre la décision. C’était très difficile, on a connu des divorces, des suicides et ça Total s’en fout complètement. » a ainsi raconté David, désormais raffineur à la raffinerie de Normandie.
 
Face à ces difficultés, les raffineurs de Grandpuits peuvent compter sur le soutien de leurs familles. Anna, conjointe d’un raffineur, a ainsi tenu à s’exprimer à son tour : « Ce ne sont pas uniquement des ouvriers qui sont en grève aujourd’hui dans une société qui les écrasent. Ce sont des familles, des femmes, des enfants. Ce que l’on fait aujourd’hui c’est pour demain. Nos maris sont fatigués, ils mènent une bataille. Nous sommes inquiets et inquiètes, nous ne savons, demain, dans quelles conditions de travail, et avec quels risques, nos maris vont travailler. Aujourd’hui la DIRECCTE a la vie de nos maris entre ses mains. »
 
D’autres soutiens étaient également présents. A l’image de la CGT 77, qui est revenue sur les difficultés profondes auxquelles est confrontée la Seine-et-Marne, du groupe interprofessionnel de Melun mais aussi de différentes organisations politiques. Une représentante de PEPS était ainsi présente, de même que Julie Garnier, oratrice nationale de La France Insoumise. « Lorsque Paulo parle de sa famille, de sa femme, il parle à tout le monde. Pour ce deuxième round comme pour les autres, on sera à vos côtés. Tant que la cloche n’a pas sonné le combat n’est pas fini » a-t-elle expliqué. De son côté Julie, étudiante en art et militante au NPA, arborant une parka de raffineur est revenue sur le soutien apportée par les étudiants en art au conflit depuis le départ. « Si Julie a une parka de Raffineur aujourd’hui c’est parce qu’elle s’est mise au service de notre grève et que nous en l’avons fait l’un des nôtres » a d’ailleurs noté à ce propos Adrien Cornet.
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A l’issue des prises de parole, les raffineurs ont réalisé une action symbolique très forte. Alors que des bruits d’explosions se faisaient entendre, une sirène a résonné devant la DIRECCTE, au son de laquelle les raffineurs se sont jetés à terre. Des soutiens sont alors venus apposer des croix blanches sur leurs corps. Un message adressé directement à Total et à la DIRECCTE : c’est la vie des raffineurs qui est menacée par le plan social mis en œuvre et le projet de conversion du site sous-doté en emplois.

Ce jeudi, les raffineurs ont ainsi montré une nouvelle fois qu’ils ne comptent rien lâcher face à Total. l’épisode de Grandpuits, et de ses irréductibles raffineurs qui ont décidé de ne pas ployer le genou et de relever la tête face au géant Total, n’est pas fini, il n’en est qu’à son deuxième chapitre. Quel qu’en soit l’issue, il apparaît en tout cas d’ores et déjà comme exemplaire ainsi que l’a noté de façon frappante le délégué CGT de la raffinerie de Donges : « Dans la période que vous avez vécu, où les salariés sont anesthésiés par la crise sanitaire et les PSE à répétition, vous avez fait le choix d’aller chercher des convergences avec des militants politiques et associatifs, y compris sur la question du changement énergétique. Je vous le dis en toute honnêteté en tant que raffineur depuis 20 ans ça ne me serait pas forcément venu à l’idée de converger avec les militants écolos. Et pourtant la voie que vous avez choisi était juste ! Ce pont que vous avez fait il m’a fait évoluer. Merci ! »

 
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