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La Izquierda Diario
26 de janvier de 2021 Twitter Faceboock

Les cheminots relèvent la tête
Grève des agents voie à Paris Nord : « On travaille avec les rats et les déchets dans les tunnels »
Anasse Kazib

Depuis le 18 janvier, les cheminots qui entretiennent les voies de la Gare du Nord ont démarré une grève reconductible sur les services de nuit. Alors que le patronat profite de la crise pour attaquer les travailleurs et que les directions syndicales brillent par leur silence, cette brigade dénote par sa détermination et sa combativité.

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« Un métier difficile et mal payé »

Les agents de la voie, ou agents de maintenance du réseau, sont les agents invisibles de la SNCF. Ils supportent les conditions de travail les plus difficiles alors qu’ils ont souvent le grade le moins élevé. Invisibles aux yeux du grand public, ils occupent pourtant un emploi stratégique dans l’entreprise. Sous la pluie, sous la neige ou pendant la canicule, ils entretiennent le réseau et interviennent sur les installations défaillantes. Sans eux, aucun train ne peut circuler en sécurité.

Leur métier est de plus en plus attaqué par la SNCF, entre suppressions d’emplois et recours de plus en plus fréquent aux entreprises de sous-traitance comme ETF ou encore Colas Rail. Ces agents ne travaillent pas uniquement dans des conditions de travail difficile, ils sont la catégorie d’agents la plus exposés aux accidents du travail et aux risques ferroviaires. Nombre d’entre eux ont trouvé la mort au travail, frappés par un train durant des travaux sur la voie ou lors d’un accident de la route, pour ne citer que les principales causes de décès chez ces agents.

Nous avons rencontré Nordine Touir, agent de la voie à Gare du Nord à Paris depuis 19 ans, et actuellement en grève. Il nous raconte son quotidien et celui de ses collègues, ainsi que ce qui les amène aujourd’hui à partir en grève pour leur condition de travail.

Révolution Permanente : Peux-tu nous expliquer les difficultés de ton métier ?

Nordine T. : Notre travail se fait essentiellement la nuit. Nous entretenons les voies de la gare souterraine emprunté par les RER B et D, ce qui fait que nous ne pouvons faire notre travail lorsque le réseau est utilisé par les voyageurs. Nos conditions de travail sont exécrable, on ne voit quasiment jamais le jour car nous sommes dans les tunnels, l’odeur, la chaleur, les rats, les puces, les seringues, les déchets font parties malheureusement de notre quotidien et rien ne change malgré nos alertes.

J’ai 45 ans et 19 ans de service, mon salaire de base est de 1.705€ brut sans les éléments variables. C’est indécent par rapport au rôle que nous jouons dans la bonne marche du service public et également vis-à-vis de nos conditions de travail. Nous le savons tous avec mes collègues, le travail de nuit nous tue a petit feu, notre sommeil est complètement déréglé. Certains de nos collègues, à cause des horaires décalés, finissent parfois par avoir de l’hypertension artérielle, et encore récemment l’un d’eux a eu un infarctus. C’est terrible de se dire que notre santé se détériore et que nous gagnons aussi peu.

RP : Que pense tu de la situation actuelle avec la crise sanitaire ?

Nordine T. : Nous en avons ras-le-bol de cette gestion catastrophique. Moi j’ai l’impression que le gouvernement ne fait rien pour nous. Il n’y a qu’à voir récemment la vaccination en France c’est un sketch. Maintenant on entend des rumeurs pour un 3eme confinement, avec du chômage partiel encore et des licenciements, c’est plus possible cette situation.

RP : Pourquoi êtes vous en grève aujourd’hui ?

Nordine T. : Avec mes collègues nous voyons que nos conditions de travail se sont dégradés au fur et à mesure des années, et pire depuis cette crise sanitaire. Nous avons été reçu par la direction qui refuse d’écouter nos revendications, qui pourtant sont légitimes. Ce que nous réclamons c’est la revalorisation de nos conditions salariales. Cela fait 7 ans que la SNCF gèle les augmentations de salaires et nous considérons que cela ne peut plus durer. Ce n’est pas à nous de payer cette crise.

Voila pourquoi avec mes collègues nous sommes en grève aujourd’hui, car nous réclamons une augmentation de 20€ par jour de travail. C’est une honte de gagner si peu, alors que nous entretenons la première gare européenne. Aujourd’hui on a dit stop, et on s’est organisé pour lutter. Avec notre syndicat SUD Rail, nous avons déposé un préavis stratégiquement de 59 minutes sur l’heure de prise des travaux de 1h30 à 2h29, qui au final nous permet de tenir financièrement sur la durée tout en ayant l’avantage de stopper la production toute la nuit, car le temps d’entretien entre le dernier train la nuit et le 1er train à 5h, ne permet pas de faire des gros chantiers avec la grève de 59 minutes en plein milieu. Nous sommes en train de faire le travail pour élargir la grève aux agents de la voie de Paris Nord afin d’avoir encore plus d’impact. Pour le moment la direction fait mine de nous ignorer, mais nous sommes déterminés à tenir jusqu’au bout pour nos revendications.

Propos recueillis par Anasse Kazib, aiguilleur SNCF et délégué SUD-Rail.

Cette grève va très certainement commencer à impacter le réseau nord parisien dans les semaines à venir. Les agents nous confient que pour l’instant la direction dépense de l’argent pour casser la grève en faisant appel à des entreprises privées pour gérer les chantiers. Mais cette stratégie de la direction ne pourra pas tenir. Après seulement cinq jours, la grève est en train de s’étendre aux agents de la voie qui entretiennent grandes lignes de Paris Nord. Pour l’heure le directeur d’établissement, Fréderic Tahon, refuse de négocier avec les grévistes, préférant utiliser l’argent public pour des entreprises privées plutôt qu’augmenter les cheminots.

Cette grève va faire beaucoup de bruit dans les prochains jours, plus la grève va s’étendre dans le temps et plus l’accumulation des retards sur les chantiers impacterons la régularité des trains. Refuser de répondre aux revendications des grévistes c’est jouer à la roulette russe avec la vie des usagers et du personnel. Les RER B et D sont parmi les plus utilisés du réseau français avec presque 20 millions d’usagers chaque mois, et jusqu’à un train toutes les 2 minutes aux heures de pointes.

De plus cette grève qui vient de commencer chez les agents de maintenance de la gare du nord, vient fait écho à la autre grève lancée il y a presque un an par les brigades du service électrique de l’Oise, pour revendiquer de meilleures conditions de travail et des augmentations de salaire. Ou encore la grève offensive lancé en 2019 par les agents du technicentre de Châtillon, pour dénoncer leurs conditions de travail.

Ces cheminots ont décidé de briser l’atonie à la SNCF en partant à l’offensive comme ils le disent eux même refusant de payer cette crise, ce sont de véritable amélioration qu’ils entendent obtenir et appels notre camp social à relever la tête malgré la crise et de refuser d’accepter la régression sociale.

 
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