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21 de novembre de 2020 Twitter Faceboock

#StopLoiSécuritéGlobale
Article 24 : l’Assemblée vote pour plus d’impunité policière, construisons la riposte dans la rue samedi
Mahdi Adi
Margot Vallère

Ce vendredi l’article 24 de la loi Sécurité Globale qui prévoit de restreindre la diffusion d’image de policier a été adopté à l’assemblée nationale. Face à l’offensive sécuritaire, construisons le rapport de force dans la rue en manifestant samedi à 14h30 à Paris place du Trocadéro.

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Manifestation du 17 novembre 2020 contre la loi Sécurité Globale à l’assemblée nationale. Crédit photo : Serge D’Ignazio

La loi Sécurité Globale portée par le gouvernement, et proposée à l’origine par les deux députés macronistes Jean Michel Fauvergue, ancien patron du RAID et l’avocate Alice Thourot, est une attaque contre les droits démocratiques. Le texte débattu à l’assemblée nationale depuis mardi s’en prend notamment aux droits de la presse en prévoyant de restreindre la diffusion d’images policiers et gendarmes en intervention, ou encore au droit de manifester en généralisant l’usage des drones dans les manifestations. Alors qu’une manifestation contre cette loi est prévu demain à Paris, le très contesté article 24 qui prévoit de restreindre la diffusion d’images de policiers en intervention – et donc de violences policières – a été voté aujourd’hui après avoir été formellement amendé par le ministre de l’intérieur sous pression de l’opinion publique.

Loi Sécurité Globale = répression totale

Jeudi 17 novembre, les députés ont voté les premiers articles, qui prévoient d’attribuer aux polices municipales disposant de plus de 20 agents et dans le cadre d’une expérimentation de trois ans, des prérogatives police judiciaire. « Ceux-ci pourront ainsi constater certaines infractions, comme les squats de halls d’immeuble, l’usage de stupéfiants ou la vente à la sauvette, les tags ou encore l’occupation illégale d’un bâtiment public » rapporte L’Humanité, et la Ville de Paris pourra désormais se doter d’une police municipale.

Loin de s’arrêter là, la loi Sécurité Globale prévoit dans son article 21, l’élargissement de l’accès au visionnage des vidéos des caméras-piéton. « La future loi sur la sécurité globale entend lever l’impossibilité pour les policiers et les gendarmes utilisant ces caméras piéton d’avoir un avoir accès direct aux enregistrements  », explique ainsi Numerama. De plus, l’article 22 prévoit d’autoriser l’usage de surveillance par drone, contesté par le Conseil d’État en mai dernier.

Ce texte législatif vise ainsi à élargir le pouvoir répressif de l’État en renforçant les prérogatives des services de police, ainsi que la surveillance des manifestants et des habitants des quartiers populaires. Alors que la combinaison entre la délégitimation du gouvernement consécutive à la gestion catastrophique de la crise sanitaire, et l’augmentation fulgurante de la précarité et de la misère due à la crise économique laisse entrevoir de potentielles explosions sociales à venir, le régime renforce ainsi son arsenal répressif et semble se préparer aux futurs affrontements sur le terrain de la lutte des classes.

L’article 24 : la police mutile et tue, Darmanin la protège en censurant la presse

L’article 24 de la loi Sécurité Globale est le plus contesté. Ce dernier constitue une attaque en règle contre les droits de la presse, et vise à restreindre la diffusion d’images de violences policières en menaçant d’une peine d’un an d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende ceux qui diffuseraient « l’image du visage ou tout autre élément d’identification » des policiers et gendarme en intervention avec « l’intention » de porter atteinte à leur « intégrité physique et psychique ». Cette formule, laissée volontairement floue, a pour objectif de laisser libre court à la répression des journalistes en manifestation, les policiers pouvant désormais s’en prendre n’importe quel un journaliste ou individu en train de filmer une intervention policière, sous prétexte de le soupçonner d’avoir « l’intention » de nuire à leur « intégrité physique et psychique ».

Vendredi 13 novembre sur FranceInfo, Gérald Darmanin avait d’ailleurs voulu préciser l’objectif du texte de loi en affirmant que s’il serait possible de continuer à filmer les policiers et gendarmes en intervention, « vous devrez faire flouter les visages des policiers et des gendarmes » pour pouvoir diffuser ces images « sur internet de façon sauvage » sans risquer d’être poursuivi. Le ministre expliquait : « Si vous voyez un problème qui relève du Code pénal, vous aurez le droit de le filmer et de le transmettre au procureur de la République », soit une manière d’exclure les images de violences policières d’internet et de les rendre confidentielles à l’appréciation des institutions complices de la police et des violences d’État.

Des déclarations qui ont provoqué une levée de boucliers de la grande majorité des organisations de journalistes et de la Ligue des Droits de l’Homme qui ont appelé mardi 17 novembre à des rassemblements partout en France pour dénoncer cette loi. Ce sont donc des milliers de personnes, majoritairement des jeunes, qui se sont rassemblées dans tout le pays, afin de revendiquer le retrait de ce projet de loi. Les manifestants présents au rassemblement parisien organisé devant l’assemblée nationale, ont été victime d’une violente répression policière à coups de matraque, de gaz lacrymogène et de canon à eau, au cours duquel 33 personnes ont été interpelées et plusieurs journalistes violentés et arrêtés. Parmi eux, la journaliste indépendante Hannah Nelson ainsi qu’un journaliste de France 3, présents pendant les charges policières, ont tout deux été placés en garde à vue avant d’être libérés le lendemain, non sans que la première ait écopé d’un rappel à la loi pour « participation à un attroupement illégal ».

Darmanin forcé d’amender l’article 24 sous pression de l’opinion publique

Force est de constater qu’avant même l’adoption de cette loi, les journalistes ont été sommés ce mardi lors du rassemblement parisien aux abords de l’assemblée nationale de quitter les lieux sous peine d’être interpelés. Un dispositif qui correspond à la mise en application du nouveau schéma national du maintien de l’ordre décrété par Gérald Darmanin en septembre dernier, qui décrété que les journalistes « doivent comme n’importe quel citoyen obtempérer aux injonctions des représentants des forces de l’ordre en se positionnant en dehors des manifestants appelés à se disperser ».

Pourtant la sortie du ministre de l’Intérieur qui déclarait la semaine dernière que les vidéos de policiers en intervention devraient désormais être floutées avant d’être diffusées sur internet est loin d’avoir fait l’unanimité, y compris au sein même de la macronie. Si la nécessité de durcir l’arsenal répressif du régime est clair pour pouvoir faire face aux futures explosions sociales, la manière de le mettre en place n’est pas sans créer des dissensions alors que le gouvernement est déjà particulièrement délégitimé suite à la gestion catastrophique de la crise sanitaire et à l’enchaînement de réforme anti-sociale prises depuis le début du quinquennat.

Vendredi 13 novembre sur BFMTV, le ministre des affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian n’avait pas prononcé un soutien franc au texte de loi défendu par Gérald Darmanin, se contentant de déclarait que « la question doit être débattue par le Parlement, sereinement ». Interrogé pour savoir si, en tant que député, il voterait le texte, le ministre a répondu évasivement : « Je ne l’ai pas encore vu donc je réserve ma décision ». D’autre part, les déclarations de Gérald Darmanin au lendemain du rassemblement du 17 novembre, ont contribué à dresser les journalistes contre le gouvernement, au moment où ce dernier s’en serait bien passé.

Le matin du 18 novembre, le ministre de l’intérieur a ainsi justifié la répression des journalistes en affirmant que les reporters « doivent se rapprocher des autorités » en amont des manifestations afin de « pouvoir rendre compte, faire (leur) travail ». Si cette injonction démontre la volonté du gouvernement de contrôler la presse, le tollé qui s’en est suivi à obligé le premier ministre, Jean Castex, et le chef du groupe parlementaire macroniste, Christophe Castaner, a se réunir en urgence avec le ministre de l’intérieur le soir même, afin de proposer un amendement au très controversé article 24 du texte de loi qui a été examiné ce vendredi par les députés.

Le gouvernement obligé de jouer le jeu du débat parlementaire pour faire voter la loi

Face aux parlementaires réunis à l’assemblée nationale ce vendredi, Gérald Darmanin a donné l’impression d’un recul sur l’article 24, en affirmant : « les journalistes pourront-ils ton filmer ou diffuser des images de gendarmes sans flouter ? La réponse est oui ». Pourtant l’amendement proposé par le ministre tient à des incantations formelles proclamant le droit « du public à être informé » et précisant que « l’intention de nuire à l’intégrité physique et psychique des policiers et gendarmes en intervention » devra-t-être « manifeste » afin de pouvoir poursuivre pénalement les auteurs des images et de leur diffusion. Un amendement de forme qui ne change donc rien au contenu de l’article de loi, et qui étend par ailleurs cette disposition qui ne concernaient jusque là que la police nationale et les gendarmes, aux policiers municipaux.

Les débats dans l’hémicycle ont montré les difficultés du gouvernement pour faire adopter cet article, avec un Gérald Darmanin obligé de chercher à convaincre en amendant une disposition pourtant phare du texte de loi. En effet, au cours de la séance, la moitié du groupe parlementaire MODEM – d’habitude fidèle à la ligne du gouvernement – a déclaré ne pas être favorable à cette disposition, cette attaque contre les droits de la presse étant difficile à justifier au nom de la défense de la police, dans la mesure où de nombreuses mesures sont déjà inscrites dans le droit pour réprimer toute personne accusée de s’en prendre à des policiers.

Malgré tout, Gérald Darmanin est cependant parvenue à faire voter l’article 24 à 146 voix pour et 24 contre. Le gouvernement a ainsi pu compter sur les parlementaires de droite (groupes LR et UDI) ainsi que sur le Rassemblement Nationale, non sans que ce dernier revendique encore davantage de mesures répressives. Si la macronie nous avait habitué à fouler des pieds le parlement et au passage en force avec l’usage du 49.3 et des dispositifs prévu par l’État d’urgence sanitaire qui permettent à l’exécutif de gouverner par ordonnances, l’adoption de l’article 24 à l’assemblée nationale malgré la colère des journaliste et de l’opinion publique, a dévoilé une fois de plus l’illusion du jeu parlementaire pour s’opposer aux attaques anti-démocratiques du gouvernement.

A bas la loi sécurité globale et le gouvernement : tous dans la rue le 21 novembre, et construisons un véritable plan de bataille pour faire reculer Macron et Darmanin

Lors des débats parlementaires, La France Insoumise a proposé plusieurs amendements pour rejeter cet article de loi. Alexis Corbière a dénoncé une attaque contre « les médias militants qui émergent », fustigeant Gérald Darmanin en déclarant « c’est ce journalisme là que vous voulez interdire ». Jean-Luc Mélenchon a ainsi évoqué la mort de Cédric Chouviat ou encore celle de Zineb Redouane, avant d’expliquer au sujet de la répression des journalistes qu’« avant même que le droit ait existé, dans la pratique cela a eu lieu » pendant la soirée du 17 novembre. Mathilde Panot de son côté à également rappelé que le slogan « sécurité première des libertés [employé par le ministre de l’intérieur] était le slogan de campagne de Le Pen dans les années 1880 ».

Les parlementaires Insoumis ont ainsi dénoncé l’attaque contre les droits de la presse que constitue l’article 24 de la loi Sécurité Globale, accusant le gouvernement de vouloir satisfaire « les syndicats policiers factieux qui manifestent devant les sièges des partis politiques », en référence à l’appel du syndicat Alliance à manifester devant le siège de LFI en septembre 2019. Ce faisant, les députés LFI épargnent cependant l’institution policière elle-même, dont les syndicats policiers ne sont qu’un des porte-voix, et le rôle joué par la police dans le maintien d’un ordre raciste et inégalitaire que le mouvement contre les violences policières et le racisme d’État du mois de juin dernier avait participé à dévoiler largement. Ainsi Alexis Corbière twittait le 16 novembre ne pas être « pour désarmer la police », et s’opposer uniquement sur « les techniques » de répression, avant de préciser que « la France Insoumise est favorable à une répression ciblée, au renforcement du renseignement humain, au développement de l’infiltration et à l’amélioration des conditions de travail de forces de l’ordre. » Mais surtout, l’adoption de l’article de loi le plus contesté, moyennant quelques menus amendements formels, lève le voile sur l’illusoire de la stratégie parlementaire à laquelle s’est cantonné La France Insoumise sans chercher à construire le rapport de force dans la rue pour faire face aux attaques autoritaires du gouvernement.

Face à la détermination du gouvernement, et à travers lui des classes dominantes, pour renforcer l’appareil répressif du régime, il est nécessaire de mettre sur pied un véritable plan de bataille. Les manifestations des journalistes et de la jeunesse doivent s’allier avec le mouvement ouvrier, seul capable de bloquer l’économie et de construire un rapport de force suffisant pour faire plier le gouvernement. Il s’agit ainsi de pousser les directions des confédérations syndicales à sortir du silence et à se positionner dans la lutte contre la loi Sécurité Globale et l’offensive de Macron et Darmanin contre les droits démocratiques. Car il est clair qu’au-delà des journalistes, ces attaques viseront tôt ou tard le mouvement ouvrier et les classes populaires, à l’instar des grévistes réprimés sur les piquets de grève RATP et pendant les manifestations contre la réforme des retraites, ou encore les Gilets Jaunes mutilés par dizaines par la police. Ces attaques anti-démocratiques sont le pendant autoritaire de l’offensive anti-sociale menée par le grand patronat et le gouvernement qui profitent de la crise pour licencier et précariser des centaines de milliers de travailleurs et de jeunes. A ce titre, la manifestation du samedi 21 novembre à Paris place du Trocadéro est un premier point d’appui pour rassembler les jeunes et le monde du travail autour de revendications offensives contre la loi Sécurité Globale et le régime autoritaire de Macron, et contre toutes les attaques anti-sociales du gouvernement.

 
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