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4 de novembre de 2020 Twitter Faceboock

Présidentielles aux Etats-Unis : un révélateur du caractère anti-démocratique du système américain
Left Voice - US

Bien que les résultats de l’élection de 2020 ne sont pas encore définitifs, il est clair que la course était plus serrée que prévu. Alors que Donald Trump intensifie ses déclarations visant à remettre entre les mains de la Cour Suprême l’issue de l’élection, la nature antidémocratique de la « démocratie » américaine est plus évidente que jamais.

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L’élection présidentielles américaine est plus serrée que prévu. Cela n’a pas empêché Donald Trump de revendiquer prématurément la victoire vers 2h30 du matin et déclarer qu’il allait demander à la Cour suprême d’ « arrêter le vote ». En d’autres termes, Trump voudrait que la Cour suprême arrête de compter les votes et proclame sa réélection.

Ce serait une atteinte majeure aux droits démocratiques fondamentaux. Des millions de votes attendent toujours d’être comptés dans tout le pays, et si le comptage est interrompu, ces électeurs seront floués. L’élection est incroyablement serrée, avec des millions de bulletins de vote par correspondance qui n’ont pas encore été comptés. Des États clés comme la Géorgie, la Caroline du Nord, le Michigan et la Pennsylvanie n’ont pas fini d’être dépouillés, et les bulletins par correspondance, à priori favorable au candidat démocrate, sont sous-représentés. Aujourd’hui, Trump veut arrêter le décompte des voix et laisser la Cour suprême décider de l’élection. Il s’agit d’une manœuvre politique cynique destinée à garantir une élection que, très clairement, Trump n’est pas sûr d’avoir gagnée. Il prétend que cette élection est "volée". Et la vérité est qu’elle l’est : elle est volée aux millions de personnes dont la voix ne sera pas entendue à cause du système intrinsèquement antidémocratique de la "démocratie" américaine.

La tentative de vol de Donald Trump a été facilitée par le fait qu’il n’y a pas eu de « vague bleue » ou de rejet massif de Donald Trump. En fait, la participation électorale a largement dépassé l’année 2016, et serait même la plus forte depuis 120 ans selon les estimations. Trump s’est emparé de la Floride et de l’Ohio - deux États où Biden espérait remporter une victoire. Ce n’était pas censé se passer ainsi. Après tout, Five Thirty Eight a déclaré que Trump n’avait qu’un dixième de chance de gagner ces élections. En fait, même si les sondages étaient aussi mauvais que pour les élections de 2016, Biden gagnerait quand même. Et cela pourrait encore être le cas. Mais beaucoup s’attendaient à ce que ce soit un coup d’éclat, un rejet total du trumpisme et de la politique de droite, responsable de la crise actuelle. Cette théorie a été perpétuée par l’idée que plus d’électeurs signifiraite plus d’électeurs du Parti démocrate. Ce processus électoral a démontré que ce n’est pas nécessairement vrai. Il y a eu une participation massive, mais cela ne semble pas avoir signifié une victoire écrasante pour Biden. En fait, il semble que Trump ait gagné du terrain dans des secteurs clés, en particulier chez les Latinos, non seulement à Miami, mais dans tout le pays.

D’autre part, il semble que la Rust Belt du Haut-Midwest qui a choisi Trump en 2016 lui donne du fil à retordre cette fois-ci. De même, les élections au Texas se sont terminées dans un mouchoir de poche, l’Arizona ayant choisi Biden et la Géorgie étant encore en dispute - ce qui souligne que les changements démographiques rendent les États rouges solides de plus en plus friable pour le Parti républicain et laisse présager des difficultés pour le parti à l’avenir. Il en va de même pour la Géorgie et la Caroline du Nord, où les changements démographiques et le renforcement des zones urbaines et suburbaines donnent à Biden une chance de s’imposer dans les deux États. En outre, les résultats montrent une polarisation accrue au sein de l’électorat, à mesure que le fossé entre les zones urbaines et rurales se creuse.

Après tout, plus de 220 000 personnes sont mortes des suites de la pandémie, à cause des politiques complètement meurtrières d’un président qui a littéralement dit aux gens de s’injecter de l’eau de javel. Et pourtant, la course est serrée. Après le plus grand mouvement social de l’histoire récente des États-Unis, le mouvement Black Lives Matter, la course est serrée, alors que Biden fait face au véhément Donald Trump, suprémaciste blanc et xénophobe, qui s’est présenté explicitement contre le mouvement. Et même si l’on tient compte du soutien massif que les secteurs du capital ont apporté à Biden, dans l’élection la plus chère de l’histoire des États-Unis, la course est vraiment serrée.

Des élections antidémocratiques

Il était évident, à l’approche des élections, que Trump perdrait le vote populaire même s’il gagnait le collège électoral. Si Trump arrive en tête dans ces swing states, ce sera la troisième fois au cours des six dernières élections présidentielles que le candidat qui a obtenu le plus de voix n’a pas gagné l’élection. Voilà à quoi ressemble une élection volée, mais les torts ne concernent pas que Trump et les Républicains. Les Démocrates ont participé activement à la défense des institutions antidémocratiques de l’État américain.

Dans cette "démocratie", seuls quelques États - et en fait, seuls quelques comtés - décident de l’ensemble de l’élection. Cela signifie que quelques milliers de votes dans la Rust Belt comptent plus que les votes en Californie ou à New York. C’est un système fondé sur l’héritage de l’esclavage qui continue à priver les personnes racisées de leur droit de vote.

Mais le collège électoral est loin d’être la seule raison pour laquelle le résultat de cette élection aura très peu à voir avec la volonté du peuple. Les immigrés sans papiers, ceux qui n’ont pas été nationalisés et les personnes de moins de 18 ans sont tous privés du droit de vote. Dans de nombreux États, les personnes anciennement incarcérées ne peuvent pas voter. En Floride, les tribunaux de l’État ont affirmé que les personnes anciennement incarcérées ne pouvaient pas voter à moins de payer des amendes et des frais élevés, privant 1,2 million de personnes, qui auraient pu faire basculer l’élection, du droit de vote. En outre, la privation systématique de ce droit fondamental a créé des obstacles importants à l’accès au vote.

Tout cela aboutit à un système qui ne peut être qualifié de démocratique en toute bonne foi, et que les deux partis ont soutenu. Et pourtant, cette élection a connu un taux de participation historiquement élevé. Dans le scénario d’une victoire de Biden, Trump souhaite saisir la Cour suprême, l’institution non démocratique composée de neuf élites non élues et chargée d’interpréter le document rédigé par des propriétaires d’esclaves connu sous le nom de Constitution. C’est une cour où Trump a récemment placé l’ultra-conservatrice Amy Coney Barrett. Il souhaite un scénario semblable à celui de 2000 où les tribunaux avaient décidé d’arrêter le comptage des votes et d’offrir l’élection au candidat républicain, avec le consentement des Démocrates. En effet, trois des juges actuels de la Cour suprême ont travaillé comme avocats sur l’affaire Bush contre Gore. Il existe un précédent pour une intervention de la Cour suprême, et cela pourrait être le résultat de ces élections.

Les démocrates sont également responsables !

Mais cette course serrée ne concerne pas seulement le collège électoral. Et il ne s’agit pas seulement de Trump qui vole l’élection. Biden a du mal parce qu’il est un candidat peu inspirant qui a tenté de faire de cette élection un référendum contre Trump. Mais il s’avère qu’il ne suffit pas de désigner une cible contre qui voter. Donald Trump a promis de maintenir l’économie malgré l’épidémie, ce qui a peut-être attiré certains électeurs, effrayé par les difficultés liées au confinement. Il a promis de protéger les emplois américains - en étant dur avec la Chine et dur avec l’immigration. Il a promis de défendre l’ « America first » dans la prochaine crise économique.

Joe Biden s’est présenté comme un retour au statu quo. Comme un « retour à la normale », capable de « rassembler le pays ». Comme un homme respectable et poli, mais qui, en matière de politique, n’a pas donné beaucoup de détails. Bien sûr, il porte un masque, mais peu d’éléments expriment une approche différente de la pandémie. Joe Biden est ainsi apparu comme le cadavre puant du néolibéralisme progressiste - un néolibéralisme aux facettes diverses. Pendant le mouvement historique Black Lives Matter, Biden a accentué son soutien à « l’ordre public ». Mais le progressisme était déjà mort lors des élections de 2016. Ce n’est pas seulement un problème lié à Biden, c’est un problème lié au Parti démocrate. Ce parti n’est rien d’autre qu’une collection d’escrocs néolibéraux, débitant des slogans mais n’offrant aucune solution. Il s’avère que cela n’a pas suffi pour donner lieu à une « vague bleue » sur laquelle tant de gens avaient parié pour ces élections.

Les Démocrates ont eu du mal à progresser dans leur quête pour reconquérir le Sénat. Au moment où nous écrivons ces lignes, ils sont à la traîne dans le Montana, la Caroline du Nord et le Maine - qui sont des Etats clés. Bien que la matinée et les semaines à venir pourraient raconter une histoire différente, il ne semble pas, pour l’instant, que cette élection exprime un rejet du Sénat républicain. Cela reflète également l’échec de la tiédeur du Parti démocrate. Celui-ci n’a pas proposé de véritable programme alternatif sur les questions qui comptent le plus pour la population (selon le sondage de sortie des urnes de CNN) : l’économie, la justice raciale et le coronavirus. Sur tous ces sujets, le Parti démocrate a lancé des attaques contre les Républicains, mais n’a rien proposé aux électeurs.

Il y a des politiques qui sont populaires, comme l’assurance maladie pour tous. Cependant, Biden a refusé de se différencier de Trump avec cette réforme, même minime. Au lieu de cela, Biden a choisi de soutenir qu’il était plus « décent » que Trump, tout en ne proposant aucun changement réel dans la vie des gens. En fait, ils ont fait tout ce qui était en leur pouvoir pour réduire l’aile gauche de leur parti, ne promettant rien de plus que le statu quo. Et comme en 2016, cela n’a pas du tout convaincu des pans entiers de la population. En outre, face à un soulèvement majeur contre la violence raciste de l’État, Biden et les démocrates se sont positionnés comme les alliés explicites de la police et du système. Certes, ils ont tweeté « Black lives matters », mais ils ont aussi prononcé des discours et réalisé des vidéos sur le fait que la plupart des policiers sont bons et que les pillards sont aussi mauvais que les flics tueurs.

Contrairement à 2016, il existe une droite plus active, radicalisée et prête à se mobiliser pour une victoire de Trump. Cette droite radicalisée ne sera pas vaincue aux élections, les démocrates centristes n’offrant absolument rien aux électeurs.

Ce qui est certain, c’est qu’il s’agit du scénario qui montre le pire du régime américain et de ses institutions. Un scénario qui met en lumière les mécanismes antidémocratiques de la République américaine : le caractère antidémocratique du Collège électoral, de la Cour suprême et de la présidence elle-même. Les prochains jours risquent d’être tumultueux, Biden tentant de s’opposer à cette situation devant les tribunaux, tout en conservant la légitimité des institutions américaines. Mais il n’y a aucune garantie que cela fonctionne. Il suffit de voir les audiences d’Amy Coney Barret. Dans un texte sur Bush contre Gore, Jane McAlevey écrit : « Les gens étaient prêts à quitter leur routine quotidienne et à entrer dans l’histoire pour défendre leur démocratie, à une échelle que l’on pourrait qualifier de massive sans exagération ». En d’autres termes, des masses de gens auraient défendu le droit à ce que tous les votes soient comptés. Cependant, les démocrates et les syndicats « ont étouffé l’élan du mouvement en Floride, l’ont étouffé tout de suite ».

Pour faire respecter les droits fondamentaux et lutter contre les velléités d’extrême droite, il faudra une mobilisation de la classe travailleuse. Cela signifie qu’il faut lutter contre les Démocrates et les Républicains. Certains secteurs des travailleurs ont parlé de la grève contre le truquage des élections, et c’est en fait ce à quoi on arrive. Nous devons prendre les rues et nous organiser sur nos lieux de travail, nous mettre en grève. Nous devons défendre nos droits démocratiques contre toutes les attaques dont ils font l’objet.

 
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