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La Izquierda Diario
3 de novembre de 2020 Twitter Faceboock

Guernica. La lutte pour le logement en Argentine et la politique de la gauche révolutionnaire
Jaque Mate

Dès le matin du 29 Octobre, les images de l’expulsion de plus de 1400 personnes à Guernica en Argentine ont tourné en boucle dans les médias locaux et nationaux. Pourtant loin d’une défaite humiliante ces images racontent un récit de résistance populaire et d’auto-organisation qui aura su mettre en difficulté des forces de l’ordre équipées pour une véritable guerre.

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Article repris de La Izquierda Diario, journal frère de Révolution Permanente publié le 1er novembre, « La lutte pour Guernica et la Gauche »

De l’expulsion imminente à la résistance

Alors que les négociations étaient rompues unilatéralement par le gouvernement le 28 novembre, les soutiens aux familles menacées d’expulsion avaient appelé à établir un camp et se retrouver sur place. Alors que des effectifs de répression importants affluaient vers Guernica, l’école du quartier « En Lutte » s’est transformée en QG de la résistance. Plus de 200 militants du PTS (étudiants, travailleurs, etc.) se sont ainsi retrouvés sur le site au petit matin pour être aux côtés de celles et ceux menacés d’expulsion. L’attaque qui était alors pressentie comme imminente a eu lieu simultanément contre les 4 quartiers repris sous contrôle par les familles et les voisins.

Les premières heures de la bataille furent extrêmement difficiles pour les résistants, comme il s’agissait d’une lutte à terrain découvert face à un adversaire largement en surnombre et mieux équipé.

Comble de l’ironie, Sergio Berni, ministre de la sécurité à Buenos Aires, a récemment déclaré qu’aucun tir de gaz lacrymos n’avait été effectué par les forces de répression et qu’à l’inverse, ces tirs avaient été l’œuvre de groupe de gauche radicalisés. Les nombreuses vidéos et photos montrant le contraire sont autant de preuves montrant le ridicule de cette accusation !

Une fois les affrontements arrivés au niveau des zones plus urbaines où les rues étroites permettaient de s’opposer à à la police en surnombre plus facilement, la lutte a pris une tournure plus difficile. Armés de bouclier improvisés pour se défendre contre les tirs de lacrymos et autres munitions solides, combattant coude à coude avec une détermination sans faille les opposants à l’expulsion ont donné du fil à retordre aux forces de Berni.

Les soutiens et familles présentes sur place ont ainsi fait preuve d’une détermination sans faille. Ce qui aurait donc du être une expulsion rapide, efficace et brutale s’est donc transformé en une véritable bataille, donnant plus de difficultés aux forces de répression que prévu, par la force de la détermination des familles et leurs soutiens. Une lutte qui, que le veuillent ou non les Kicillof, gouverneur de la province de Buenos Aires, Berni ou forces de répression, va bel et bien se poursuivre !

Le Parti des Travailleurs Socialistes et divers groupes de travailleurs et de jeunes au service de la lutte de Guernica

Le Parti des Travailleurs Socialistes (PTS), faisant partie de la Fraction Trotskyste pour la Quatrième Internationale auquel appartient également le Courant Communiste qui anime Révolution Permanente, a accompagné cette lutte pour la récupération des terres à Guernica depuis l’origine du combat. Qu’ils soient des travailleurs privés, des employés du secteur public, des jeunes, étudiants et précaires, les militants du PTS étaient présent quotidiennement pour soutenir cette lutte.

L’appui de la jeunesse précaire n’a cessé de se renforcer, notamment à travers le soutien du Réseau de Jeunes Précaires (RED de Jovenes Precarizados) qui en plus du soutien direct sur place ont participé à la diffusion et au partage de l’information.

La Izquierdia Diario (journal frère de Révolution Permanente en Argentine, membre du réseau international de journaux La Izquierdia Diario) a joué un rôle très important à travers la couverture quotidienne de l’actualité sur place. Ainsi La Izquierdia Diario a su gagner sa place au point que les occupants et voisins de Guernica considèrent ses membres comme de véritables frères de lutte.

La solidarité envers cette lutte ne s’est pas faite attendre, une campagne de soutien financier et matériel a rapidement été organisée conjointement par le MAC (Movimiento des Agrupaciones Clasistas), le réseau de Jeunes Précaires, la jeunesse et l’ensemble des membres du PTS autour du mot d’ordre « Guernica, ta lutte est la nôtre ! »

De nombreux autres secteurs ont également joué un rôle dans cette lutte : notamment les travailleurs de la santé et du social ou encore les étudiants en médecine de différentes universités qui ont aidé à prendre en charge les aspects sanitaires de l’occupation en traitant de leur mieux les centaines de femmes enfants et habitants affectés par les conditions sur place : froid, pluie, carences nutritionnelles etc …Avec l’aide de nombreux secteurs présent, notamment les plus de 200 militants des collectifs présents sur place, une école (La Escuelita) a été mise en place dans le quartier de la Lucha, prenant en charge l’éducation et l’instruction de plusieurs dizaines d’enfants mais participant également à l’émergence d’une avant-garde formée et préparée aux luttes à venir.

La lutte pour l’auto organisation et contre les manœuvres du gouvernement

Mais l’émergence d’une avant-garde n’a pas seulement été le fruit de la solidarité, mais aussi, comme facteur décisif, de la promotion de formes d’organisation démocratiques comme la Commission des femmes elle-même, avec laquelle nous avons collaboré à partir du PTS, qui a commencé par réunir les femmes les plus combatives du quartier de La Lucha et quelques déléguées, et s’est progressivement renforcée avec l’arrivée des femmes d’autres quartiers pour devenir plus tard une Commission de quartier avec des hommes et des jeunes.

La convergence entre le militantisme du PTS et cette spontanéité qui recherchait des voies démocratiques de décision et d’organisation, sans négliger les accords entre les organisations, mais en mettant avant tout les décisions souveraines des assemblées et des quartiers au centre, était le point fondamental. Un accord politique s’est progressivement établi entre les femmes en ce sens, n’ayant aucune confiance dans le gouvernement et dénonçant ses tromperies et ses manœuvres. Cela a conduit, à de nombreuses reprises, à des désaccords très importants avec les politiques des organisations qui faisaient partie de la table de négociation (FOL, FPDS, MTR, PO, Barrios de Pie, Víctor Choque) qui considéraient que le dialogue devait se faire sans mesures de lutte orientées vers l’extérieur car "c’est comme ça qu’on fait quand il y a négociation".

Premiers pas pour une convergence des secteurs combatifs du précariat et de la gauche révolutionnaire

Pour nous, il est de très bon augure qu’un secteur historiquement peu lié à la gauche, qui dans sa grande majorité a été un électeur du Frente de Todos, la coalition actuellement au gouvernement, se rapproche du PTS et de ses groupements rassemblant des militants jeunes et de différents secteurs du monde du travail. Même en dépit de l’hostilité de différentes organisations ou de certains de leurs sympathisants, qui ont atteint le point culminant en essayant de faire voter dans les assemblées une motion pour "virer le PTS", ont perdu systématiquement. De cette façon, ils ont essayé de donner "un nom" à la lutte des secteurs d’avant-garde pour l’auto-organisation, pour la liberté d’avoir des assemblées où ils pourraient prendre des décisions souveraines pour eux-mêmes, et de faire confiance à leurs propres forces et non aux représentants qui supposaient une "connaissance" de la négociation avec le gouvernement, démontrant surtout un excès de confiance dans l’ennemi lui-même.

C’est ainsi qu’est née la résistance commune avec les femmes et les jeunes des différents quartiers, et elle se poursuit aujourd’hui. Cette expérience est importante pour la lutte à Guernica, mais aussi au-delà, compte tenu des nouvelles luttes qui vont surgir face à une crise de plus en plus profonde, où nous parions sur une plus grande convergence entre les secteurs d’avant-garde qui vont émerger parmi les franges les plus paupérisées de la société, et la gauche révolutionnaire.

 
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