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La Izquierda Diario
27 de octobre de 2020 Twitter Faceboock

Elections présidentielles USA
Etats-Unis. A une semaine du scrutin, les jeux ne sont pas faits entre Biden et Trump
Simon Derrerof

Dans 8 jours auront lieu les élections américaines. Le dernier débat entre Trump et Biden a marqué l’entrée dans la dernière ligne droite d’une élection dont les sondages donnent le démocrate gagnant de peu.

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Crédit photo : AFP

Un débat policé qui lance la dernière ligne droite des élections américaines

Il reste 8 jours avant que les Américains soient fixés sur l’identité de leur nouveau président. Le débat de jeudi dernier a lancé la dernière droite des élections présidentielles dans un climat pour le moins tendu, marqué par une dernière séquence politique particulièrement agitée. Donald Trump et Joe Biden se sont affrontés, jeudi 22 octobre, à Nashville dans un débat policé et ennuyeux loin de la cacophonie et des insultes qui avaient marqué le premier tête à tête entre les deux candidats. Pour éviter de reproduire ce spectacle, les organisateurs avaient même décidé de couper les micros des candidats pendant les deux premières minutes de prise de parole de l’autre.

D’un côté Trump n’a cessé d’employer sa rhétorique populiste habituelle, pendant que Biden a soigneusement montré qu’il se plaçait le plus à droite possible pour se démarquer des secteurs les plus progressistes du parti démocrate et tenter de maintenir son avance dans les sondages nationaux. A moins de deux semaines des élections le débat a majoritairement porté sur comment revenir à une situation normale et sortir de la crise. Biden comme Trump ont successivement fait porter le poids de la responsabilité de la faute sur l’autre, alternant réquisitoire contre le mandat de Trump puis remise en cause de l’ère Obama. Deux stratégies qui n’ont effectivement jamais permis d’améliorer le quotidien des millions de travailleurs.

Les candidats ont successivement abordé la question sanitaire, la relation entre Trump et King Jong-Un, la question environnementale ou encore les questions du racisme et de l’immigration. Biden n’a cessé de vouloir se démarquer de Trump, que ce soit en affirmant vouloir se détourner à terme de l’industrie pétrolière, en attaquant la gestion sanitaire du président américain : « "Il n’y a pas un seul scientifique sérieux au monde qui pense que ça va disparaître bientôt" ou encore en attaquant " la politique criminelle" du gouvernement sur la séparation des parents et des enfants immigrés ou en dénonçant le "racisme institutionnel qui existe aux États-Unis". Trump lui n’ a eu de cesse d’attaquer son opposant démocrate sur les allégations de corruption au sujet des activités du fils de Joe Biden quand le candidat démocrate était vice-président de Barack Obama, ou de revendiquer les réussites de son mandat.

Le débat a marqué le début de la dernière ligne droite des élections présidentielles et de la campagne des deux hommes. Dimanche Trump s’est rendu dans le Maine, solide bastion démocrate, il sera mardi dans le Nebraska, état acquis à sa cause. La visite de ces deux états n’est pas anodine, ce sont les seuls où la règle du winner takes all’ (le gagnant remporte tout) n’est pas en service. En effet le Maine accorde deux de ses quatre grands électeurs au candidat qui a recueilli le plus de voix et les deux autres sont distribués à celui qui l’emporte dans deux districts distincts, l’un rural et l’autre urbain. Dans le Nebraska de la même façon deux électeurs sont donnés au candidat qui obtient le plus de voix et trois sont attribués en fonction des votes dans trois districts. Ces voix pourraient en effet s’avérer décisives.

Quand à Biden, il a décidé d’éviter les rassemblements du fait de la crise sanitaire. C’est donc Kamala Harris, la probable future vice-présidente des Etats-Unis qui se charge de dynamiser la campagne en sourdine du septuagénaire, en visite en Géorgie, où les sondages montrent des votes particulièrement serrés.

Des sondages qui donnent Biden gagnant mais...

Dans la majorité des sondages Donald Trump est donné perdant des prochaines élections présidentielles. Les sondages effectués dans la majorité des États le donnent nettement perdant. Toutefois les élections américaines se jouent État par État : un candidat peut remporter les élections avec moins de voix que son rival, s’il remporte le scrutin dans les Etats stratégiques. La réélection de Trump et plus probablement sa défaite va donc se jouer dans ces « Etats à bascule « ( Wing States) que sont : l’Ohio, Wisconsin, Floride, Texas, Caroline du Nord, Géorgie... Dans ces Etats les résultats s’annoncent pour le coup plus serrés. Si Joe Biden est en tête des intentions de vote dans la majorité de ces états, les enquêtes ne sont pas sûres et les écarts de vote sont souvent particulièrement ténus. Une victoire sur le fil de Donald Trump n’est donc pas complètement à exclure.

Cette élection sera également placée sous le signe du vote anticipé, de nombreux électeurs ayant décidé de voter en avance pour éviter la foule le jour du scrutin. Plus de 50 millions de personnes ont ainsi déjà voté, ce qui est d’ores et déjà plus que le nombre de votes anticipés enregistrés en 2016. Le vote anticipé est également un des sujets de la campagne, les démocrates ont appelé à voter en avance pour éviter la propagation du virus, tandis que Trump dénonce un potentiel « truquage ».

Une situation tendue et polarisée

A quelques jours de l’élection présidentielle, les Américains sont à juste titre préoccupés par l’imprévisibilité et la volatilité persistante de la situation politique aux Etats-Unis. Depuis des mois Trump alimente la frustration et la colère de sa base de droite, appelant notamment les « Proud Boys » des milices violentes d’extrême droite, à se tenir prêtes, ou affirmant encore que son fils Trump Jr a organisé une « armée de surveillants » pour vérifier que le scrutin se passe sans encombres. Le but est clair, il s’agit pour le président américain d’intimider, Trump a également déjà fait savoir à plusieurs reprises qu’il pourrait contester les résultats des élections arguant que les bulletins de vote à distance ne sont pas fiables. Si la menace d’un coup d’état de l’extrême droite reste en réalité peu probable, la rhétorique raciste et les appels à peine voilés de Trump au harcèlement sont inquiétants et viennent ajouter de l’huile sur le feu à une situation politique déjà particulièrement agitée depuis quelques mois. Ces élections se tiennent dès lors dans un contexte très tendu où l’hypothèse que le scrutin soit perturbé par des groupes d’extrême droite et que des résultats locaux soient contentés n’est pas à exclure.

Plus globalement, ces élections s’inscrivent dans une situation de crise profonde qui touche tous les aspects de la société américaine, regroupant pandémie, récession économique, crise écologique, crise sociale et une méfiance de plus en plus grande envers les partis politiques américains et ses institutions. A l’image du premier débat particulièrement violent entre les deux candidats, le pays semble aujourd’hui particulièrement fracturé. L’énorme mobilisation contre les violences policières et le racisme d’Etat et la gestion catastrophique de la crise sanitaire par le gouvernement ont cristallisé la polarisation du pays en deux camps. D’un côté du ring l’on retrouve Trump, porte-parole d’une Amérique réactionnaire décomplexée, qui n’hésite plus à attaquer les Noirs et de l’autre un Biden qui se présente comme le candidat du "multilatéralisme et du progressisme" et qui cherche à unir derrière lui toute l’Amérique anti-Trump.

Deux candidats, une même politique : celle de la récession sociale

Par délà les oppositions que les deux candidats ne cessent d’afficher, il faut évidemment voir qu’ils sont tous deux de fervents défenseurs de l’impérialisme américain et du capitalisme. Les deux candidats auront à cœur dans la période qui s’ouvre de défendre face à la crise économique les intérêts du capital. En attendant, le Parti démocrate a de réelles chances de l’emporter et se prépare déjà à reprendre la Maison Blanche et éventuellement le Sénat afin de consolider et d’intensifier l’impérialisme américain. Le gouvernement Biden sera évidemment chargé de poursuivre l’offensive impérialiste, de poursuivre l’austérité et de maintenir intact le système judiciaire et policier. Biden a une chance de gagner en partie grâce à la récupération qu’il a faite du mouvement Black Lives Matters qui à cause de l’inertie des bureaucraties syndicales n’a jamais réussi à présenter une voix alternative au bipartisme américain. Mais une nouvelle fois, le partie démocrate s’apprête à jouer son rôle historique : celui de contenir les mouvement sociaux pour continuer à gouverner pour ceux qui sont au sommet.

Dès lors que ce soit Biden ou Trump qui accède au pouvoir, il y aura aux Etats Unis une série de « plans de relance » à grands coups de milliards ponctionnés sur les deniers publics et payés sur les dos des travailleurs. Le mandat probable de Biden risque en réalité de s’inscrire dans la continuité de ce que Trump a commencé. Depuis le début de leur campagne Biden et son colistier Kamal Harris ont fait tout ce qu’ils pouvaient pour coopter l’enthousiasme qu’avait ouvert la séquence des Black Lives Matters. En réalité ils se sont prononcés contre l’assurance maladie pour tous et contre le définancement de la police. Au plan de la politique internationale, si le mandat de Trump avait joué un rôle disruptif en rompant avec le multilatéralisme, le retour à l’ordre international passé que pourrait signifier l’élection de Biden ne pourra pas se faire du fait de la perte d’hégémonie américaine. Comme le remarque l’éditorialiste du Monde Sylvie Kauffmann, « Joe Biden sera dur en négociations avec l’Europe et la Chine » de même qu’il sera difficile pour lui de reconstituer le multilatéralisme (mis à part le retour très anecdotique des USA dans l’accord de Paris) et de rejouer les « gendarmes du monde » sans en payer le prix politiquement.

Il est clair qu’aucun des deux partis n’a de proposition à faire pour affronter la multitude de crises à laquelle les Etats-Unis sont confrontés. Ni Biden, ni Trump ne sont une option pour la classe ouvrière et les opprimés encore moins dans cette période de bouleversement social, politique et économique. Tous deux ont clairement fait savoir sur la scène du débat qu’ils ont l’intention de reconquérir l’hégémonie impérialiste américaine, au détriment de la classe ouvrière et des opprimés du monde entier. Ces deux candidats au capital n’ont rien d’autre à offrir que plus de misère et d’insécurité face à une deuxième vague épidémique et à une récession mondiale qui s’aggrave.

 
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