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La Izquierda Diario
9 de septembre de 2020 Twitter Faceboock

Europe forteresse
Grèce. L’incendie du camp de réfugiés de Lesbos, une conséquence des politiques antimigrants de l’UE
Philippe Alcoy

L’incendie du camp de Moria à Lesbos est le résultat direct des politiques anti-migrants des gouvernements grecs et de l’UE. Une situation incertaine s’ouvre pour de milliers de refugiés, avec le risque d’une augmentation de la répression et des tensions sociales.

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Mercredi matin le camp de réfugiés de Moria dans l’île de Lesbos en Grèce partait en fumée. Selon les pompiers dépêchés sur place il ne reste pratiquement rien de ce camp où habitaient près de 13 000 personnes alors qu’il était pensé pour accueillir 3 000 réfugiés. Pour le moment on ne rapporte aucun mort, mais les autorités grecques parlent d’une « catastrophe humanitaire ».

La situation dans le camp de Lesbos relève effectivement d’une catastrophe humanitaire mais elle n’a pas commencé avec l’incendie. En effet, depuis des mois, voire des années, des ONGs humanitaires dénoncent les conditions de vie indécentes et dangereuses pour des milliers de refugiés. Près de 13 000 personnes vivaient confinées, avec très peu d’accès à des points d’eau, des douches et des toilettes insuffisants, des conditions d’hygiène déplorables…

La pandémie de Covid-19 n’a fait qu’aggraver cette situation car les gestes barrière devenaient impossibles dans ces conditions, exposant ainsi les refugiés aux risques du nouveau virus. D’ailleurs, même si les origines de l’incendie ne sont pas encore connues, certaines sources indiquent qu’il aurait été déclenché par des réfugiés eux-mêmes comme signe de contestation des mesures de confinement prises par le gouvernement grec. En effet, quelques jours auparavant deux migrants du camp ont été testés positifs au Covid-19, puis, à la suite de 2 000 tests, 35 autres cas ont été découverts, ce qui a entraîné la mise ne quarantaine de l’ensemble du camp.

Ces mesures ont provoqué la révolte de beaucoup d’habitants des camps car, depuis le début de la pandémie, le gouvernement grec de centre-droite en a profité pour mettre en œuvre son agenda réactionnaire anti-migrants : alors qu’en mai les mesures de confinement dans le pays commençaient à être assouplies, les migrants des camps dans les îles de la Méditerranée sont toujours soumis à des règles strictes de limitation des mouvements.

Cette politique répressive avait été dénoncée par des associations comme Médecins Sans Frontières qui jugeait ces mesures « discriminatoires », stigmatisant et marginalisant les demandeurs d’asile, réfugiés et migrants. Pour beaucoup d’observateurs, le gouvernement grec est en train d’utiliser la pandémie pour tester une politique de plus en plus répressive vis-à-vis des migrants mettant en place des camps fermés dont les entrées et sorties seraient contrôlées au moyen d’une carte pour les résidents, et en même temps faciliter l’expulsion des migrants dont la demande d’asile aurait été refusée.

En attendant, après l’incendie des milliers de personnes se trouvent sans abri. Certains réfugiés ont tenté de se diriger vers le port de Mytilène mais ils en ont été empêchés par la police. Le gouvernement a par ailleurs décrété l’état d’urgence sur l’île et y a dépêché des membres des forces de sécurité pour empêcher les réfugiés de quitter la zone. Autrement dit, la première réponse des autorités grecques a été d’accentuer la répression sous prétexte de « risque de diffusion du virus » dans l’île. D’ailleurs le maire de Mytilène, Stratis Kytelis, est allé jusqu’à proposer l’idée délirante de mettre les migrants dans des bateaux pour éviter une éventuelle propagation du Covid-19.

Au-delà de la raison ponctuelle qui a pu faire démarrer le feu dans le camp de Moria, le désastre était prévisible : la situation des réfugiés dans les îles grecques est intenable et représente une bombe à retardement. Celle du camp de Moria vient d’éclater et les conséquences humanitaires mais aussi sociales et politiques sont imprévisibles. Le mécontentement existait bien avant l’incendie parmi les réfugiés. Maintenant qu’ils ont tout perdu les risques de révolte sont certains, mais ceux de répression aussi. Or, cette situation n’est pas seulement le résultat des politiques migratoires réactionnaires des gouvernements grecs successifs (dont celui de Syriza), mais celui des politiques migratoires mises en place par l’ensemble de l’Union Européenne qui ont fait du continent une forteresse impénétrable pour des centaines de milliers de personnes qui fuient les guerres, la pauvreté, les crises climatiques.

En ce sens, pour le mouvement ouvrier du continent, notamment dans les pays impérialistes centraux comme la France, il est impérieux d’exiger la fermeture de ces camps/prisons de migrants et l’accueil dans des conditions dignes de tous les migrants et les migrantes. C’est ainsi que les travailleurs et travailleuses du continent pourront créer un rapport de force capable de faire reculer les tendances xénophobes et racistes de l’extrême-droite pro-patronale.

 
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