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La Izquierda Diario
24 de juin de 2020 Twitter Faceboock

Manœuvre xénophobe
Chômage-partiel : Macron à l’attaque du travail détaché pour faire oublier qu’il autorise les licenciements ?
Philomène Rozan

Macron rencontrait les syndicats mercredi : à l’ordre du jour les modalités du nouveau chômage partiel longue durée. Si le recours à celui-ci n’interdira pas aux entreprises de licencier, sous réserve d’accord avec les syndicats, en revanche, d’après plusieurs sources, le gouvernement pourrait annoncer une obligation de limiter le recours au travail détaché. Une manœuvre xénophobe évidente pour tenter de faire diversion.

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Crédit photo : JOHN THYS / AFP

Ce mercredi 24 juin, le gouvernement rencontrait les syndicats pour discuter, entre autres, des modalités du nouveau chômage partiel dit « de longue durée ». Derrière un accord qui affirme vouloir un maximum de « maintien d’emplois », ce dispositif se veut surtout garant des intérêts des entreprises .
 
Depuis le lancement des premiers plans d’urgence économique au début du confinement, le gouvernement n’a cessé enchaîner les cadeaux au patronat, tout en assumant de limiter au maximum d’éventuelles contreparties. Le plan de relance économique a permis à Renault de toucher 5 milliards de prêts garantis par l’Etat, alors que l’entreprise annonçait un plan de suppressions d’emplois de 4 600 personnes rien qu’en France. Même son de cloche chez Air-France KLM qui a touché 7 milliards d’euros de prêts garantis, tout en laissant entendre par plusieurs sources que le nombre de suppressions d’emplois pourraient atteindre les 10 000 personnes.
 
Le nouveau plan de chômage partiel de longue durée s’inscrit dans cette lignée. Ce dispositif, réservé aux secteurs confrontés permettra aux entreprises d’utiliser un chômage-partiel flexible, en mettant ponctuellement des salariés au chômage-partiel en fonction des besoins de production. « Les salariés ne pourront pas être au chômage partiel plus de 40% de leur temps habituel. Sur ce temps chômé, ils percevront une indemnité correspondant à 70% de leur salaire brut, soit 84% du net (100% pour les salariés rémunérés au Smic). Le reste du temps, vu qu’ils travailleront, ils percevront leur salaire habituel. L’Etat et l’Unédic rembourseront à l’entreprise 85% de l’indemnité de chômage partiel versée aux salariés. » synthétise ainsi Capital. Or, ce dispositif autorisera les patrons dont les entreprises en bénéficient à licencier en parallèle, sous couvert qu’un accord soit trouvé avec les syndicats. L’Etat autorise ainsi purement et simplement des milliers de licenciements malgré l’importance des aides apportées.
 
Pourtant, si sur le terrain des licenciements le gouvernement a choisi de laisser la main aux entreprises, Les Echos révèlent que les travailleurs détachés seraient dans le viseur du gouvernement « L’idée, telle qu’elle circule, consisterait à freiner l’accueil de travailleurs détachés dans les entreprises qui engagent des plans de sauvegarde de l’emploi, des plans de départs volontaires, ou qui recourent au chômage partiel - dans son régime de base ou dans le régime de longue durée que le président va dévoiler ce mercredi normalement. » Il pourrait donc y avoir une condition pour toucher les aides : ne pas embaucher de travailleurs détachés - c’est à dire de travailleurs étrangers d’un autre pays de l’Union Européenne.
 
Cette mesure ne sort pas de nulle part. En effet, il y deux semaines, un scandale médiatique éclatait autour de PSA-Hordain. Le groupe avait fait le choix sur le site de Hordain de ne pas réembaucher les intérimaires, ou de les maintenir au chômage partiel -financé par l’Etat- et de faire appel à près de 300 ouvriers du groupe de Pologne. Comme l’expliquait alors Jean-Pierre Mercier, délégué central CGT, à PSA sur LCI : « Ils utilisent les travailleurs de Pologne, d’Espagne, du Portugal et d’Allemagne en les sous-payant et les surexploitant. Ils seront non pas payés au tarif PSA France mais au tarif de la convention de la métallurgie française qui est bien en dessous du tarif de PSA. C’est dans la continuité de la politique de PSA de mettre en concurrence les salariés les uns contre les autres ». « Ce que privilégie la réflexion du PDG de PSA c’est d’augmenter la rentabilité et de continuer à sous payer et à surexploiter les ouvriers d’où qu’ils viennent. Depuis des années ils utilisent les intérimaires contre les CDI » ajoutait par ailleurs le délégué CGT central. De fait, on peut légitimement se scandaliser des tentatives de dumping social de PSA, qui s’appuie sur la surexploitation de travailleurs étrangers pour tenter de rétablir ses profits.
 
Pourtant, comment ne pas voir derrière la mesure qu’étudierait le gouvernement une pure diversion, visant à compenser sur le terrain d’une mesure aux relents xénophobes la latitude laissée par ailleurs aux entreprises pour réaliser les licenciements qu’elles souhaitent. Alors que le gouvernement a laissé depuis des mois des dizaines de milliers d’intérimaires pointer au chômage après que leurs contrats aient été interrompus par les entreprises, taper du poing sur la table sur le travail détaché serait une mesure idéale pour Macron, permettant de donner l’illusion que les aides du gouvernement seraient « conditionnées » et de faire du pied aux électeurs de droite et d’extrême-droite. En outre, elle permettrait de braquer le projecteur sur les « travailleurs détachés », coupables idéaux des suppressions d’emplois pour le gouvernement, alors même que celles-ci sont évidemment de la responsabilité des directions d’entreprises et des actionnaires qu’elles servent.

Si cette diversion xénophobe n’est pour le moment qu’à l’état de projet et n’a pas fait l’objet d’annonces, il convient dès maintenant d’être attentif et de se préparer à ce type de stratégique qui ne manqueront pas de se multiplier. L’unité des travailleurs, par-delà les entreprises, corporations, statuts ou nationalités, est en effet une force que le gouvernement entend bien saper pour pouvoir faire payer la crise aux salariés. Pour s’y opposer, il conviendra donc de refuser toute ces tentatives racistes, nationalistes de nous affaiblir et nous détourner des véritables responsables de ces attaques. Car ce sont eux qu’il faudra affronter, sans tomber dans le piège du nationalisme et de la conciliation.

 
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