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La Izquierda Diario
7 de juin de 2020 Twitter Faceboock

#BlackOutTuesday et l’hypocrisie des grandes industries culturelles
Carla Biguliak

Après la mort de George Floyd à Minneapolis, l’industrie musicale a lancé le mouvement #BlackOutTuesday. Cette initiative a généré un bombardement d’images vides de contenu qui ont fait disparaître d’importantes informations ou revendications de la lutte, mais qui ont également mis à nu l’hypocrisie des grandes sociétés de l’industrie culturelle telles que Apple, Spotify, Sony et Netflix.

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Crédit-photo : AFP

Mardi 2 juin, alors que des manifestations et révoltes massives réclamaient justice pour le meurtre de George Floyd aux mains de la police de Minneapolis, plusieurs sociétés comme Spotify, Apple et d’autres ont appelé à un black-out mardi en demandant à leurs artistes de publier des photos complètement noires, sans aucun contenu, sous les hashtags #BlackOutTuesday et #BlackLivesMatter.

La campagne a gagné en popularité auprès des grandes compagnies discographiques et des musiciens, ainsi que des comédiens et des célébrités. Beaucoup d’artistes avec des millions de followers ont partagé en masse ces hashtags et images. Mais la multiplication des messages a généré un affichage massif sur le réseau social, qui en quelques heures a fait que le hashtag #BlackLivesMatter, jusque-là plein d’images de manifestations, protestations, émeutes, de haine, de répression et de luttes radicales, renvoyait maintenant à des images sans aucun contenu.

Face à cela, de nombreux activistes ont averti que la diffusion massive de ces images occultaient les postes de Black Lives Matter qui fournissent des informations, des ressources et de la documentation sur les protestations contre les brutalités policières racistes.

En France, le Palais de Tokyo a également été critiqué pour cette action : « il s’agit d’un appel à l’action et non un appel à la solidarité. Il s’agit d’une crise et non d’une cause. Le fait de l’utiliser inadéquatement la rend contre-productive et décharge trop d’entités en créant la fausse idée de participation ou de sensibilisation. Il ne s’agit pas d’un coup de relations publiques, alors soit vous ajoutez une action derrière elle, soit vous ne l’utilisez pas et vous gardez le silence comme vous l’avez fait jusqu’à aujourd’hui. »

Démagogie et appropriation pour apaiser la révolte

C’est ce même 2 juin, lorsque 40 000 manifestants ont scandé « justice pour Adama » devant le Palais de justice de Paris, au moment même où la communauté LGBT manifestait devant le Stonewall Inn contre le racisme, l’homophobie et la transphobie policière, qu’il est devenu plus qu’évident à quel point visibiliser la lutte dans la rue est important. Et pas seulement cela, mais aussi l’utilisation des réseaux sociaux pour la diffusion des manifestations afin d’informer et propager cette lutte, ces cris passés sous silence pendant des années, parce que nous savons bien que les grands médias fonctionnels à la bourgeoisie choisissent très bien ce qu’ils veulent communiquer. En ce sens, l’invasion des images noires sur les réseaux sociaux, qui a déplacé toute autre information sur les luttes de la journée, a joué un rôle complètement contre-productif à l’énorme puissance de la lutte.

Cela ne veut pas dire que la publication par qui que ce soit d’une image noire sans contenu signifie directement la contribution automatique à atténuer une lutte qui devient immense : le grand nombre de personnes qui ont rejoint le mouvement l’ont fait avec de bonnes intentions pour la lutte, mais peut-on dire que la grande industrie musicale l’a fait avec la même innocence ? Il s’avère donc essentiel d’analyser qui a publié les images et à partir de quelle place, car c’est sur cette base que nous mesurerons le niveau d’hypocrisie.

Par exemple, Star Wars et Marvel Studios, deux énormes franchises qui font partie du conglomérat Disney, ont rejoint le message comme beaucoup d’autres personnes. Mais ici nous parlons d’un groupe qui collecte des millions et des millions par jour, mais qui laisse 100 000 employés sans salaire au milieu d’une pandémie mondiale, condamnant à une grande précarité un nombre énorme de salariés, parmi lesquels un grand nombre de personnes noires et opprimées.

Car il faut aussi souligner ici que cette politique « d’inclusion » complètement vide à laquelle Disney fait appel à travers certaines créations ne fait que continuer à atténuer la lutte, car l’inclusion est certes plus qu’insuffisante, un simple « lavage de visage » quand elle ne s’accompagne pas d’une réelle transformation du système oppressif.

Cependant, et malgré les efforts des institutions du statu quo, le monde entier est en train de se lever contre le racisme, tout en dénonçant son utilisation par la machine capitaliste et impérialiste. Il ne faudra pas longtemps pour que les images sur les réseaux sociaux de cette lutte se multiplient à nouveau : une lutte qui envahit les rues de la planète et qui crie que sans justice, ils n’auront jamais la paix. Notre lutte ne peut se contenter des carrés noirs, des films de princesses noires et des livres d’histoire oubliés, on se bat pour créer un nouvel avenir, un avenir qui appartiendra aux cinéastes, musiciens, poètes et romanciers pour construire, sur les cendres de l’industrie culturelle capitaliste, une société véritablement libérée de toute forme d’oppression.

 
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