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La Izquierda Diario
19 de mars de 2020 Twitter Faceboock

Mesures d’exception ?
État d’urgence sanitaire : instrumentaliser la crise pour renforcer l’arsenal répressif
Anna Ky

Le projet de loi sur l’état d’urgence sanitaire passé ce jeudi à l’assemblée est inédit. Instaurant un « état d’urgence sanitaire » il permet de donner un cadre juridique à des mesures illégales en temps normal, et notamment la restriction des libertés individuelles.

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Le projet de loi sur l’état d’urgence sanitaire, qui instaure un nouveau régime d’exception à l’arsenal juridique, « donne pouvoir au premier ministre de prendre par décret pris sur le rapport du ministre de la santé, les mesures générales limitant la liberté d’aller et venir, la liberté d’entreprendre et la liberté de réunion et permettant de procéder aux réquisitions de tout bien et services nécessaires ». Instauré actuellement pour 12 jours renouvelables, ces mesures exceptionnelles pourront être retirées « dès lors qu’elles ne sont plus nécessaires ».

Mais ce projet qui permet au gouvernement de légiférer par ordonnance fait office de loi fourre-tout, allant du renforcement de l’arsenal répressif à l’extension des droits accordés aux employeurs et à une attaque en règle du droit du travail.

Pour faire respecter ces mesures, et notamment le confinement en vigueur, des sanctions pourront être appliquées, notamment des amendes de quatrième classe (135 euros). En cas de refus des réquisitions demandées, la sanction pourra s’élever à une peine de six mois de prison et 10 000 € d’amende. Réquisition « de tout biens et services nécessaires afin de lutter contre la catastrophe sanitaire » justifié notamment par le besoin de taxis et de masques, mais le flou de la formulation pourrait permettre de réquisitionner par la force, et dans un futur proche, les travailleurs eux-même, qui exercent massivement leur droit de retrait. Pour faire appliquer ces mesures, un déploiement d’ampleur des forces de répression, en particulier dans les quartiers populaires.

Ces dispositions prises par le gouvernement mettent en lumière la logique avec laquelle l’État veut instaurer le confinement de la population. D’une part il y a la nécessité de faire face à une crise sanitaire d’ampleur inédite, les mesures d’urgence à prendre pour éviter une propagation trop rapide de l’épidémie ; mais d’autre part, il y a la méthode avec laquelle sont appliquées ces mesures. Le gouvernement cherche aujourd’hui à pallier par des dispositions autoritaires la décrédibilisation de la parole publique, et le manque d’accès à l’information dont il est lui-même à l’origine. Car après le scandale qu’a été la gestion de la crise de Lubrizol, après les errements de communication gouvernementale – avec le couple présidentiel qui se rendait au théâtre pour prouver que « la vie continue » juste avant de décréter le confinement – qui peut encore faire confiance à l’État pour gérer la crise sanitaire en cours ?

Le confinement mis en place est instauré de manière autoritaire et répressive, et justifié par une criminalisation de la population qui ne respecterait pas les consignes. Mais qui sont les irresponsables ?

La politique menée par le gouvernement, ses errements et ses mesures répressives ont pour première conséquence d’alimenter la panique et l’incompréhension face à la crise. D’autre part, elles renforcent les aspects les plus autoritaires du régime et exposent les plus précaires à une répression toujours plus féroce. Ainsi, dès les premières 24 heures de confinement, plus de 4000 amendes avaient été dressées dans l’ensemble du pays, en particulier dans les quartiers populaires déjà sous le joug de la violence et l’arbitraire policiers. Mardi, à Barbès, une jeune femme s’est faite violemment plaquer au sol par trois policiers au motif qu’elle n’avait pas d’attestation sur l’honneur justifiant sa sortie.

Le gouvernement a choisi la méthode d’un confinement autoritaire et répressif, justifié par un discours visant à individualiser les responsabilités de la propagation de l’épidémie. Mais alors que des moyens toujours plus importants sont alloués à l’arsenal répressif d’État, rien n’est fait pour mettre en place une campagne de test systématique de la population ni appliquer une transparence totale quant aux nombre de personnes atteintes du virus.

Ces mesures répressives vont être amenées à s’amplifier au fur et à mesure que la crise sanitaire, économique et sociale s’approfondira. Celles-ci visent en définitive à préparer le terrain à de profondes attaques contre le monde du travail, comme en témoigne les dispositions sur les RTT par exemple, qui en définitive permettront de faire payer la crise aux travailleurs. Avec cet état d’urgence sanitaire, le gouvernement cherche à préparer la voie pour imposer un nouvel ordre social, un ordre où ceux qui refuseront ce qui se cache derrière le terme flou de « réquisition » pourront aller en prison. Si le gouvernement se cache derrière les 12 jours de durée de ces mesures, on se rappelle que l’état d’urgence instauré suite aux attentats avait finalement été intégré dans la constitution. En ce sens l’état d’urgence sanitaire cherche à étendre les pleins pouvoir du gouvernement pour nous imposer une restriction drastique des droits démocratiques et des attaques historiques contre le monde du travail.

 
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