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La Izquierda Diario
6 de décembre de 2019 Twitter Faceboock

5 décembre
15.000 manifestants le 5 décembre en Alsace : cheminots, profs, Gilets jaunes, salariés du privé, c’est tous ensemble qu’on peut gagner !
Mahdi Adi

10.000 à Strasbourg, 5.000 à Mulhouse, les manifestants étaient nombreux le 5 décembre dans le Grand Est, qui avait été un foyer important du mouvement des Gilets jaunes. Alors après une journée de grève historique chez les cheminots, les enseignants, les hospitaliers, et une tendance à la contamination dans le privé, en particulier dans le secteur en crise de la métallurgie, quelles suites pour la mobilisation ?

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Comme au niveau national, les chiffres étaient au rendez-vous à la SNCF en Alsace. Alors qu’à Strasbourg 300 cheminots – tous corps de métier confondus – se réunissaient en Assemblée Générale pour voter la grève reconductible reconduire la grève, à Mulhouse où seulement 8 trains circulaient sur les 700 habituels, les grévistes ont également décidé de reconduire le mouvement. Il apparaît ainsi que les cheminots tirent le bilan de l’échec de la stratégie des directions syndicales de 2018 avec la fameuse « grève perlée », et ont conscience que pour gagner, des journées de grève éparpillées ne suffiront pas.

Une diff’ de tract organisée en commun par des cheminots et des Gilets jaunes le matin avant l’AG à la gare de Mulhouse, venait démontrer encore une fois s’il le fallait, que malgré le « cheminot bashing » alimenté par les grands médias, la volonté du gouvernement de faire passer la grève du 5 décembre pour un mouvement corporatiste a du plomb dans l’aile, puisque plus de 60 % de la population s’est déclarée favorable à la grève dans un sondage récent. Cependant il se pourrait bien que le Premier Ministre donne du grain à moudre à la CFDT lors de la prochaine journée de négociation prévue le 12 décembre. En effet, la CFDT Cheminot est la seule branche de cette confédération syndicale à avoir appelé à la grève du 5, mais en ouvrant la porte à des négociations sur le régime spécial SNCF ou sur à la « clause grand-père » (pour n’appliquer la réforme qu’aux salariés entrés sur le marché du travail après 1968, ou après 1973, ou après…), le gouvernement se ménagerait ainsi une option pour rompre l’unité syndicale.

Car le discours de la CFDT Cheminot est clair : elle n’appelle à la grève que pour protéger le régime spécial des agents déjà en poste, pas ceux des nouveaux embauchés dans l’entreprise, ni le régime de retraite des autres salariés. Si à la SNCF le gouvernement parvenait ainsi à rompre l’unité syndicale contre la réforme des retraites à la SNCF, cela serait d’autant plus facile pour la direction de la CGT Cheminots de justifier les négociations catégorielles en arguant du refus de « faire grève pour les autres ».

Mais les cheminots n’ont pas la mémoire courte. Ils se souviennent qu’en 2003 lorsqu’ils avaient cessé la grève, leur direction jugeant que la réforme Fillon ne concernait que les agents de la fonction publique et pas ceux de la SNCF, cela avait facilité le travail du gouvernement de l’époque pour les isoler quelques années plus tard et s’en prendre à leurs propres retraites en 2007. C’est pourquoi la question de la convergence avec les autres secteurs faisait l’objet central du débat à l’AG mulhousienne où se réunissaient une quarantaine de cheminots, et où se sont rendus une trentaine de Gilets jaunes après la diff’ de tract commune.

Tous sont d’accord sur la nécessité de s’unir et de ne pas s’opposer, mais c’est le programme d’action commun qui fait pour l’instant défaut. Si la mobilisation a pris à la RATP et dans la fonction publique, en particulier chez les hospitaliers et chez les profs qui enregistre des taux de grévistes historiques à l’Education Nationale en Alsace avec près de 70% de grévistes dans le primaire, 40% des écoles fermées dans la région, et 60% de grévistes dans le secondaire, la question se pose pour les cheminots de savoir comment généraliser la grève dans le privé, en particulier dans les secteurs de l’automobile et la métallurgie, et chez les jeunes qui ont commencé à se mobiliser contre la précarité étudiante, bien présents dans les manifestations.

Dans cette région de l’Est de la France, des foyers importants de Gilets jaunes s’étaient constitués il y a presque un an jour pour jour, et exprimaient le malaise profond conséquence des politiques néo-libérales des gouvernements successifs qui ont semé chômage de masse et précarité. Parmi les salariés, Gilets jaunes ou non, syndiqués ou non, nombreux sont ceux qui éprouvent de la sympathie à l’égard de la grève. Mais tous ceux qui subissent les carrières hachées et le chômage de longue durée, se demandent pourquoi se battre pour conserver le régime actuel alors qu’il est loin de signifier pour eux le droit à une retraite digne. Et surtout, la menace de perdre un emploi, en particulier dans le secteur de l’automobile marquée par des plans de licenciement importants ces dernières années, ainsi que par la précarisation des travailleurs à l’image de l’usine de PSA Mulhouse où 50% des 6.000 salariés sont aujourd’hui intérimaires, constituent un frein important pour que la mobilisation s’élargisse massivement au-delà des équipes syndicales à PSA Mulhouse, ou chez les Punch Powerglide, Schaeffler, et Alstom à Strasbourg.

Dans ce cadre il apparaît clairement que la nécessaire unité des travailleurs pour s’engager dans une bataille aussi importante que celle des retraites, ne peut être acquise par un consensus autour de revendications corporatistes comme celles défendues par la direction de la CFDT Cheminots. Cette unité ne peut se faire qu’autour d’un programme revendicatif qui prenne en compte l’ensemble des réalités que vivent les salariés dans le monde du travail d’aujourd’hui, marqué par le chômage de masse et la précarité. La revendication du retrait pur et simple de la réforme des retraites doit s’accompagner de la mise en place du droit à une retraite à taux plein à 60 ans– et 55 ans pour les métiers pénibles – pour tous les travailleurs, auto-entrepreneurs, petits agriculteurs et artisans, sans conditions de nationalité ni de durée de cotisation, et financé par une augmentation des cotisations patronales dans les grandes entreprises. De même, pour développer les tendances à la généralisation de la grève dans le privé, dans les secteurs dits « en crise », où les patrons font pourtant des bénéfices records, comme dans l’automobile ou la métallurgie, les salariés doivent être titularisés et les licenciements interdits.

Ce sont ces revendications qui pourront permettre au plus grand nombre de s’identifier dans le mouvement actuel et donner envie de se battre pour y prendre part, dans des cadres interprofessionnels, réunissant les secteurs en grève à la SNCF, dans les hôpitaux, chez les profs, les équipes de syndicalistes combatifs qui militent pour étendre la grève dans le privé, et les Gilets jaunes qui luttent contre Macron et son monde, comme ce mardi où des actions en commun sont d’ores et déjà prévues.

 
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