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La Izquierda Diario
6 de mars de 2019 Twitter Faceboock

Mort de Julie Douib, 35 ans, assassinée par son ex-conjoint
Leçon de patriarcat de Goldnadel sur RMC : « on a l’impression que les femmes sont dans l’unique posture de recevoir des coups et de ne jamais en donner. »
Max Demian

Réagissant à l’assassinat de Julie Douib, 35 ans, abattue par arme à feu par son ex-conjoint, Gilles-William Goldnadel, chroniqueur aux Grandes Gueules de RMC est intervenu pour « corriger » son interlocutrice et relativiser les violences faites aux femmes. Un « cas d’école » de ce qu’est aujourd’hui le patriarcat.

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Il n’a pas pu s’en empêcher. Il a fallu que le patriarcat la ramène – et ce à l’approche du 8 mars, et alors qu’un nouveau féminicide a eu lieu il y a quelques jours : Julie, 35 ans, a été tuée par son ex-conjoint par arme à feu dimanche 3 mars, alors qu’elle avait appelé les gendarmes à l’aide à plusieurs reprises.

La séquence dure à peine plus de 40 secondes mais est renversante, au sens propre. Il faudrait la décortiquer intégralement pour en tirer toute la « saveur » (fort rance, en l’occurrence), tant cette intervention illustre à merveille, dans sa suffisance, sa bêtise bornée et son mépris, ce que signifie le patriarcat aujourd’hui. Un « cas d’école. »

La séquence se déroule sur le plateau des Grandes Gueules. A la gauche, Gilles-William Goldnadel, avocat et essayiste de droite, digne représentant du patriarcat. A la droite, Joëlle Dago-Serry, chroniqueuse dans l’émission.

Après une introduction pleine de mépris et de condescendance, rappelant à son interlocutrice « tout le respect légitime » qu’elle lui inspire (use-t-il de la même formule pour s’adresser à ses interlocuteurs masculins ?), Goldnadel tient à rappeler que « 30% des violences » sont commises par des femmes, des femmes « VIOLENTES » (Goldnadel appuie sur mot).

Malaise sur le plateau. Le présentateur lui-même accusant Goldnadel d’avoir voulu « relativiser », les violences faites aux femmes.

On pourrait penser que la séance de patriarcat allait s’arrêter ici. Que nenni. Indéboulonnable, il poursuit sa route, et fièrement : « 30% ce n’est pas tout mais ce n’est pas rien », conclut ainsi magistralement, fier de lui, l’affreux jojo.

Gilles-William Goldnadel n’en est malheureusement pas à son premier « coup d’éclat » sur ce sujet là. En réalité, il est régulièrement invité sur les plateaux télévisés pour apporter, sans doute, un autre « point de vue », à chaque fois qu’un cas de violence contre les femmes fait la une de l’actualité (et ce n’est pas si courant, considérant la régularité du phénomène). Il avait d’ailleurs rallié la croisade anti #Metoo lancée par Elizabeth Lévy et Catherine Deneuve, signataires de la tribune sur le fameux « droit d’importuner ».

En septembre 2018, sur ce même plateau des Grandes Gueules, il avait réussi à mettre en furie Muriel Robin face à lui en déclinant les mêmes arguments : il existe aussi des hommes battus. Il était cette fois question du cas de Jacqueline Sauvage, finalement relaxée dans le cas de l’assassinat de son conjoint par arme à feu. Un acte venant clore trente années de violences conjugales, sexuelles, psychologiques et d’agression de son conjoint sur elle-même et sur ses enfants. Un cas qui permet, à bien des égards, d’expliquer cette variable statistique des « 30% » qu’il ressort sur chaque plateau…

En déclinant ce « 30% d’hommes battus », Goldnadel avait donc le sentiment d’avoir rétabli la vérité. Rappelons-lui en donc quelques unes, puisque, hélas ! Il le faut encore au vu de ce genre d’interventions qui, loin d’être un problème individuel, sont l’expression la plus visible d’une chaîne de violences systémiques qui constituent l’oppression des femmes – le patriarcat.

Rien qu’en France, on compte, depuis le 1er janvier, 30 féminicides – trente en deux mois, soit une toutes les deux jours. Le premier risque de mort pour une femme étant celui de mourir des suites de violences conjugales. L’an dernier, on dénombrait plus de 100 féminicides (109 exactement).

La dernière en date, Julie, tuée au fusil de chasse par son mari (après avoir maintes fois alerté, en vain, la police) vivait dans une « terreur permanente. »

Plus encore, derrière ces propos réactionnaires, se cache un autre subterfuge, moins visible tant le premier est gros. Il s’agit de réduire le patriarcat, et les violences faites aux femmes, à son cas le plus extrême, celui du féminicide, en oubliant la longue chaîne d’oppression qui le commande. En effet, loin de constituer un cas exceptionnel, ou qui se réduirait à des problèmes conjugaux, le féminicide la conséquence la plus visible et horrifiante d’une chaîne de domination, d’humiliation et d’oppression quotidienne vécue par les femmes et reproduites par la société et ses institutions. On pourrait aux violences faites aux femmes ajouter la précarité, qui les frappe les premières ; l’inégalité salariale ; les attaques faites contre leurs droits, notamment l’avortement ; la domination quotidienne qui va des brimades et des humiliations aux atteintes physiques pouvant aller jusqu’au meurtre ; la marchandisation de leurs corps etc. Cette oppression et humiliation qui pousse parfois à inverser la statistique des violences…

Il ne s’agit que de quelques exemples. Car des Gilles-William Goldnadel, sûr de leur fait, et de leur force, appuyés par des institutions et des idéologies archaïques, il y en a des centaines, des milliers, des millions ; ils se sentent évidemment dans leur bon droit de « corriger » une femme sur les féminicides - et ce à quelques jours du 8 mars.

 
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