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La Izquierda Diario
11 de avril de 2018 Twitter Faceboock

JOURNEE « JUSTICE MORTE »
Dix ans après la loi Dati, grève des avocats contre la loi de programmation judiciaire

En 2007, l’une des premières grandes réformes lancées par Sarkozy et sa garde des sceaux Rachida Dati concernait la carte judiciaire, qui a supprimé en janvier 2011 178 tribunaux d’instance et 23 tribunaux de grande instance. Macron, à sa suite, a promis pendant sa campagne une réforme de l’organisation de la justice, contre laquelle les magistrats (avocats, juges, greffiers) sont aujourd’hui mobilisés.

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Cette loi de programmation judiciaire va d’abord « adapter » la carte judiciaire aux nouvelles régions créées en 2016, en supprimant certains tribunaux d’appel et en aggravant, en conséquence, les effets de désert judiciaire. L’égalité d’accès à la justice va donc à nouveau, comme avec la loi Dati de 2007, être contrecarrée par l’éloignement des tribunaux, pour obéir à une logique purement gestionnaire et administrative de ce service public – la même logique qui prévaut pour les fusions d’hôpitaux et les fermetures de services de soins.

Au pénal : remise en cause des principes du contradictoire et de l’oralité des débats.

Il est d’ailleurs pas mal question de gestion et d’administration dans la loi Macron / Belloubet : dans la partie du texte qui concerne la réforme des procédures pénales, les magistrats s’inquiètent de la part faite aux droits de l’enquête et de la police. La loi prévoit par exemple de faciliter les interceptions des communications électroniques en dehors de toute information judiciaire – c’est-à-dire en dehors de l’accord d’un magistrat – dans le cadre d’une enquête portant sur des délits passibles d’une peine de trois ans de prison (contre cinq auparavant). Les magistrats alertent sur l’atteinte aux droits et aux libertés individuelles que constituent ces nouveaux pouvoirs accordés à la police.

De même, pour accélérer les procédures, la loi prévoit la création de tribunaux criminels, intermédiaires entre le tribunal correctionnel et la Cour d’assise, pour juger les crimes passibles de 15 à 20 ans de prison. Dépourvu de jury populaire, le tribunal criminel sera constitué de cinq magistrats et fonctionnera comme une procédure accélérée puisque les durées d’audience sont limitées, ce qui implique en plus que le principe de l’oralité des débats est remis en question. Ces tribunaux criminels vont être expérimentés dans plusieurs départements à partir de janvier 2019, ce qui signifie que durant le temps de l’expérimentation des crimes similaires seront jugés par deux juridictions différentes sur le territoire, en fonction du département : c’est ici encore une remise en cause du principe de l’égalité de droits et de traitement des crimes et délits.

Au civil : « une justice sans juge, sans avocat et sans justiciable » (Conseil National des Barreaux)

Pour la réforme de la procédure civile, la loi prévoit le règlement de certains litiges sans audience, ainsi que la dématérialisation des procédures pour les petits litiges. Alors que la justice est le service public le moins bien doté dans le budget de l’Etat depuis de nombreuses années, la loi Belloubet vient aligner le fonctionnement de la justice sur des mesures d’austérité, en limitant les procédures et en faisant même payer l’accès à la justice par les justiciables eux-mêmes : les compétences des juges civils sont en effet transférés aux offices notariaux, aux frais des justiciables, dans ce qui apparaît comme une privatisation rampante de la justice civile. Dans la même veine, la loi prévoit aussi, par exemple, que les directeurs des CAF soient en charge du traitement de certains litiges portant sur la modification du montant des allocations.

Le service public de la justice au civil est donc vidé de son sens, et ses compétences distribuées à des acteurs qui feront payer les procédures aux justiciables, contre le principe de l’égalité d’accès au droit pour tous et toutes, quels que soient les revenus ou la situation sociale.

C’est donc face à ce qui s’annonce comme une grande réforme austéritaire de la justice, une privatisation d’une partie de ce service public et un alignement des procédures sur les besoins de la police, bref face à une logique purement répressive et gestionnaire, que l’ensemble des syndicats de magistrats ont appelé à une nouvelle journée de grève et de manifestation ce mercredi 11 avril, journée de « justice morte ». La loi doit être présentée le 18 avril au Conseil des ministres.

 
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