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CRISE SANITAIRE

« Vaccinodromes », mobilisation de l’armée... et toujours pas de moyens pour l’hôpital !

Alors que la situation sanitaire continue à se dégrader en France, le gouvernement fait le pari de tout miser sur la vaccination et fait toute sa communication sur cette stratégie, notamment autour de la mise en place de « vaccinodromes ». Une gestion de la crise toujours aussi catastrophique qui montre bien les priorités des gouvernements, prêt à tout pour éviter de donner des moyens aux hôpitaux.

Adèle Chotsky

5 avril 2021

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Crédits photo : AFP/Sameer Al-DOUMY

La flambée de l’épidémie de Covid-19 se poursuit et la situation sanitaire continue à se dégrader en France, avec des indicateurs qui sont toujours à la hausse. Surtout, la pression s’accentue sur des hôpitaux qui sont nombreux à être déjà saturés. Les chiffres des dernières admissions pour Covid-19 de ce week-end sont en hausse par rapport au précédent (1224 admis sur les dernières 24h, 207 de plus que dimanche dernier), et il y a près de 5300 malades ayant besoin de soins intensifs. Le nombre de malades du Covid en réanimation a dépassé celui atteint lors du pic de la deuxième vague lundi dernier et si l’on a pas encore atteint le pic de la 1ère vague (7000 malades en soins intensifs), celui-ci se rapproche dangereusement.

Face à cela, le gouvernement Macron a mis en place un « confinement » répressif qui ménage les intérêts et les profits des grandes entreprises et échoue à briser les chaînes de contamination. Surtout, il entend tout miser sur la vaccination. Les dernières déclinaisons de sa stratégie vaccinale sont à l’image de toute sa politique catastrophique face à la crise sanitaire et de l’irrationalité capitaliste, au détriment de la santé de la population.

« Vaccinodromes » : un plan de comm’ et une gestion autoritaire

Le gouvernement annonce vouloir vacciner 30 millions de personnes d’ici l’été et veut montrer qu’il prend des mesures pour donner un coup de fouet à cette campagne. Principale vitrine de cette politique qui va se déployer cette semaine, l’ouverture de plusieurs centres de vaccination à grande capacité sur tout le territoire, dont la mise en place a été une des mesures phares annoncées par Macron lors de sa dernière allocution. Ces « vaccinodromes » annoncés en grandes pompes se concrétisent : sont ainsi transformés en centres de vaccination toute une série de lieux à la surface importante comme des stades de foot, des gymnases, parc des expositions, etc. C’est le cas du Stade de France (Île-de-France), dans le département le plus touché par l’épidémie, où des doses vont commencer à être injectées ce mardi. Une opération de communication qui vise à faire oublier le retard énorme accumulé par la campagne de vaccination en France, qui se résout à ouvrir des vaccinodromes quatre mois après l’Allemagne. Ces grands centres seraient censés réaliser au moins 1000 vaccinations par semaine dans un premier temps et pour les plus gros d’atteindre 1000 à 2000 injections par jour.

En plus de ces grands lieux réutilisés, l’État entend aussi mobiliser l’armée pour créer des vaccinodromes. Sept centres ouvriront ainsi le 6 avril dans des hôpitaux militaires à travers le pays, dans le cadre de « l’Opération résilience » menée par l’armée depuis l’année dernière, avec l’objectif de monter à 50 000 doses par semaines. Par la suite, une autre possibilité étudiée est de créer de toute pièce des points de vaccination et de doubler le nombre de vaccinodromes gérés par l’armée. Plutôt que de mettre en place des mesures d’urgence pour les hôpitaux, le gouvernement fait le choix d’afficher une image de fermeté en mobilisant l’armée, en contraste avec sa gestion chaotique et catastrophique de l’épidémie. Un choix qui s’inscrit dans toute la politique autoritaire choisie depuis le début de la pandémie due au coronavirus. Dès mars 2020, l’annonce de l’« Opération résilience » mettaient en avant un déploiement militaire massif pour faire face au virus, soit disant « en soutien à la population ». Sous-traiter à l’armée, c’est aussi bien sûr éviter d’embaucher dans les hôpitaux, continuer les suppressions de lits et laisser les soignants se débattre face à l’afflux de patients et face au délabrement d’un système de santé frappé par des années d’austérité drastique.

Vaccins, méfiance, et irrationalité capitaliste

La mise en place de centres de vaccination à grande capacité et l’annonce de la mobilisation de plus de professionnels de santé pour administrer les doses (comme les dentistes ou les vétérinaires) ne vont pas résoudre le problème du manque de doses, qui pourtant ne manque pas de se poser, le bon fonctionnement centres de vaccination étant totalement dépendant des livraisons de doses. Pendant que Macron enjoint les soignants à « vacciner, vacciner, vacciner », ces derniers ont été nombreux et nombreuses à réagir sur les réseaux sociaux, soulignant que pour vacciner il fallait déjà recevoir des doses. Les pénuries de doses découlent du fait que la production de celles-ci et leur calendrier ne dépendent pas des intérêts de la population, mais sont au contraire dictés par les intérêts privés et la concurrence acharnée entre les grandes entreprises pharmaceutiques. Les labos gardent jalousement leurs brevets, ce qui empêche une production massive et répartie rationnellement.

Par ailleurs, la méfiance autour du vaccin d’AstraZeneca freine la distribution des doses déjà présentes. Les craintes autours des effets secondaires de ce vaccin, notamment sur des problèmes de coagulation sanguine, ont atteint leur apogée avec les décisions de plusieurs pays de suspendre en urgence les injection de doses AstraZeneca. Une illustration de cela est le fait que ce week-end, de nombreux patients dans les Hauts-de-France ont annulé leur rendez-vous car ils ne voulaient pas être vaccinés avec des doses de ce vaccin.

Que des doses ne trouvent pas preneurs dans une région aussi durement touchée par le virus est particulièrement préoccupant. La faute en revient en premier lieu au gouvernement qui a été incapable de communiquer clairement au sujet du vaccin du laboratoire anglo-suédois, et plus largement à la cacophonie qui a régné en Europe autour de la suspension ou non de celui-ci

Les zigzags du gouvernement Macron, de ces dernières semaine, entre une position « rassuriste » et une position alarmiste n’ont fait qu’ajouter à la confusion et au manque de confiance de la population dans ce vaccin. C’est cette gestion en catastrophe qui fait le terreau de la méfiance actuelle.

Une méfiance qui n’est pas absurde quand on voit l’opacité totale qui dicte la gestion capitaliste de la santé et de la production de médicament. Nombreuses sont les personnes qui ont en tête les différents scandales sanitaires de ces dernières années (tels que celui du Mediator) et qui s’inquiètent de potentiels risques qui seraient ignorés ou masqués par les laboratoires et les États.

Comme pour les doses qui viennent à manquer, le problème est que la production de vaccins dépend du bon vouloir des capitalistes de l’industrie pharmaceutique, qu’il s’agisse d’AstraZeneca ou de Johnson & Johnson, entreprise américaine dont le vaccin devrait être disponible à la mi-avril en France. Le fait que ce dernier soit présenté comme une « alternative » à l’AstraZeneca en proie à la suspicion est très révélateur des logiques de concurrence entre les différents géants de l’industrie pharmaceutique qui essaient de montrer que « leur » vaccin est meilleur que les autres.

Face à cela, la nécessité d’imposer une transparence totale, du début à la fin du processus de production d’un vaccin, se pose de façon cruciale. Une mesure indispensable est de mettre fin aux brevets sur les vaccins pour sortir de la logique de concurrence et de course aux profits qui est aujourd’hui de mise et qui produit tant la pénurie de doses que les doutes sur certains produits ; de réquisitionner sous contrôle des travailleurs l’ensemble de la branche, pour que les vaccins soient un bien commun.

Si après plus d’un an de pandémie, une campagne de vaccination d’ampleur est nécessaire, celle-ci ne peut être suffisante sans plan d’urgence pour l’hôpital. Car si le gouvernement mise tout sur le vaccin comme porte de sortie face à la crise sanitaire, les soignants doivent faire face au manque de place, de matériel et de renforts, dans un système de santé délabré et anéanti par des années de plan de restructuration, de suppression de postes et de lits. Tandis que le gouvernement promeut sa stratégie vaccinale à grand coup de communication, les hôpitaux eux continuent de déborder, et c’est une question de vie ou de mort.

Imposons, d’urgence, non seulement une véritable stratégie de prévention et de dépistage pour briser les chaînes de contamination, mais des embauches de personnels sous statut, des augmentations de lits pour l’hôpital.


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