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Une postière de 25 ans victime d’un AVC : « Finis ton travail, on appellera les pompiers tout à l’heure »

En février dernier, une employée de La Poste à Villeneuve-d'Ascq a été victime d'un AVC sur sa plate-forme de distribution de courrier. Sa hiérarchie, ignorant volontairement son état de santé préoccupant, avait malgré tout insisté pour qu'elle termine quand même ses heures de travail. Aujourd'hui en convalescence, la postière a récemment décidé de porter l'affaire en justice, en raison d'importantes séquelles causées par cette longue matinée ; un handicap lourd qui aurait pu être évité si la hiérarchie avait bien voulu écouter ses demandes d'arrêt, et qui aurait eu des conséquences encore plus néfastes si l'un des collègues n'avait pas décidé de donner lui-même l'alerte. Quand le travail se paie au prix de la santé… Paul Carson-Saher

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Le 19 février dernier, Emeline Broequevielle, postière de 25 ans en CDD depuis 2009 et mère de deux enfants, s’est confrontée à l’inhumanité de sa propre direction. Appelant tôt le matin pour signaler qu’elle ne se sentait pas bien et qu’elle n’était pas en mesure de venir travailler ce jour, la jeune femme n’a eu d’autre interlocuteur qu’un cadre peu scrupuleux qui ne l’entendait visiblement pas de cette oreille. Insistant pour que celle-ci vienne quand même, l’employée s’est alors sentie obligée de commencer sa journée de travail sans broncher, au détriment de son état de santé inquiétant.

Au cours de cette matinée, l’état de la jeune femme n’a alors cessé de s’aggraver. C’est aux alentours de 6h40 que l’employée décide finalement de se rendre plusieurs fois dans le bureau de l’encadrant pour lui signifier sa douleur, lui expliquant une nouvelle fois qu’elle ne pouvait pas continuer dans ces conditions-là. Sans succès. De son supérieur, elle ne reçut finalement que cette phrase glaçante : « Finis ton travail, on appellera les pompiers tout à l’heure ».

Face à l’inertie de la direction, un collègue donne l’alerte

Il est 9h30. La postière peine à poursuivre sa tâche correctement. Son collègue, membre du CHSCT (Comité d’Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail), considérant l’état de la jeune femme et réalisant surtout que la hiérarchie n’a jusqu’alors strictement rien fait pour elle, décide à son tour d’interpeller les différents cadres pour qu’ils prennent enfin leurs responsabilités et appellent rapidement le SAMU. En vain. « Ils m’ont répondu que je n’étais pas médecin, je me suis énervé et j’ai appelé les secours » explique-t-il.

Finalement prise en charge par une ambulance privée, l’hôpital découvrira un peu plus tard les signes d’un AVC chez la victime, nécessitant de toute urgence un placement en soins intensifs. Malheureusement, trop d’heures se sont écoulées entre temps : l’employée a désormais la jambe gauche partiellement paralysée, nécessitant plusieurs séances quotidiennes chez le kiné, avec un traitement lourd à la clef. Elle raconte : « Si ma hiérarchie avait prévenu les secours à temps, je n’aurais pas toutes ces séquelles. Mais si mon collègue n’avait pas insisté pour que je sois secourue, je ne serais plus là pour vous en parler. ».

Le profit avant tout...

De son côté, le collègue – celui qui avait donné l’alerte – a entre-temps demandé la tenue d’un comité extraordinaire pour cause de mise en danger de la vie d’autrui, avec pour motif principal le fait de n’avoir pas appelé les urgences à temps. La postière, accompagnée de son avocat, a également déposé plainte pour non-assistance à personne en danger, envisageant également une procédure devant les prud’hommes. Mais la direction régionale de La Poste conteste cette version, en prétendant que c’était bel et bien un encadrant qui avait alerté les secours, et que, par conséquent, celle-ci n’était pas en tort.
Mais comme si ça ne suffisait pas, en guise de contre-offensive, la direction a même porté plainte contre l’employé « lanceur d’alerte » pour harcèlement contre la hiérarchie, débouchant sur 30h de garde à vue pour lui. « Je me suis retrouvé en suspension de fonction et en retrait de service. J’ai sauvé la vie de quelqu’un et je perds mon travail » conclu t-il, amer.

Malheureusement, cette histoire est loin d’être un cas isolé. Car dans cette société où seul le profit compte, oser être malade, être en « retard » n’est pas acceptable par la dictature patronale. Dans ce cas particulier, une employée a retrouvé sa jambe partiellement paralysée tandis que celui qui a contribué à la sauver se retrouve en voie de licenciement, le tout protégé par cette justice de classe. On ne peut que s’inquiéter de l’impunité flagrante des directions, de plus en plus protégées par des mesures gouvernementales, notamment par des lois à leurs services, comme la loi travail.

Une nouvelle fois, nous dénonçons ces pratiques honteuses, capable de broyer la vie de certains, tout en générant d’autres victimes « collatérales » supplémentaires…


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