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Crise au sommet

Un remaniement qui ne masque pas les faiblesses de Macron

A l’approche des élections européennes, et à l’issue d’un Grand Débat loin d’avoir convaincu, Macron n’est toujours pas parvenu à refermer la crise profonde dont la mobilisation des Gilets Jaunes est le symptôme le plus visible. Son remaniement gouvernemental en témoigne.

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Dans la macronie, remaniement gouvernemental n’est pas synonyme de second souffle. On se souvient de la crise en octobre, après l’affaire Benalla et le départ de Gérard Collomb, autour du plus long remaniement de l’histoire de la Vème République. Dès octobre, la tentative de rééquilibrage gouvernemental avait mis à nue les faiblesses structurelles du macronisme, porté au pouvoir sur un projet de dépassement du clivage gauche-droite, mais qui ne parvenait déjà plus à rassembler.

Entre temps, la mobilisation des Gilets Jaunes est venue ébranler profondément le gouvernement, qui n’a plus rien de Jupitérien. Et alors que l’issue du grand débat est proche, et que les élections européennes arrivent, la macronie se confronte aux mêmes difficultés ; à savoir sa faible capacité à constituer un appareil dirigeant stable. Le Grand Débat est loin d’avoir convaincu, et la colère des Gilets Jaunes est toujours vivace. Quant aux européennes, si le scénario qui se profile est en apparence similaire aux présidentielles (Macron face à Le Pen), il se jouera au prix d’une abstention toujours croissante, dans le contexte où une très grande part de la population n’a plus aucune illusion dans le processus électoral.

Une brèche toujours plus béante au sommet, que le casting du remaniement vient confirmer. En effet, les trois nouveaux venus dans l’équipe présidentielle révèlent l’isolement politique de Macron. En effet, Sibeth Ndiaye, Cédric O et Amélie de Montchalin – respectivement nommés porte-parole de l’Elysée et secrétaires d’État au Numérique et aux Affaires Européennes – font partie de la garde rapprochée de Macron, et ce depuis ses débuts.

Des nominations loin de faire l’unanimité, alors que chacun de ces trois nouveaux traîne son lot de casseroles. Sibeth Ndiaye, conseillère communication de Macron en 2017, avait notamment déclaré : « J’assume parfaitement de mentir pour protéger le président ». Amélie de Montchalin quant à elle, faisait partie des principaux artisans de la suppression de l’ISF, alors même que sa réinstauration fait partie des premières revendications des Gilets Jaunes.

Un rétrécissement de la majorité, obligée de se replier sur elle-même, que critiquent même certains parlementaires LREM : « Hollande, plus il avançait dans le quinquennat, plus il se recroquevillait sur ses proches. Nous sommes en train de vivre la même chose avec Macron. On est dans la hollandisation ».

La capacité du macronisme à constituer un « banc de touche » avait déjà été mise à rude épreuve après les départs tonitruants de Collomb ou Hulot. Et les départs successifs des principaux proches de Macron n’ont fait qu’entériner cette véritable hémorragie, écorchée non seulement par le mouvement des Gilets Jaunes, mais aussi par l’affaire Benalla qui a exposé de proches conseillers comme Ismael Emelien ou Alexis Kholer (ce dernier étant visé, de surcroît, par une troisième plainte d’Anticor pour des soupçons de conflit d’intérêt avec l’armateur MSC). Comme l’écrit Mediapart : « Son départ [celui de Benjamin Griveaux] vient allonger la désormais longue liste des mouvements en cours à l’Élysée. Après l’ancien responsable de la communication Sylvain Fort, la conseillère communication internationale Barbara Frugier, le conseiller politique Stéphane Séjourné – parti piloter la campagne des européennes pour lesquelles il est aussi candidat –, le conseiller spécial Ismaël Emelien et son collègue David Amiel – tous deux officiellement sortis pour assurer la promotion de leur livre –, Sibeth Ndiaye est la dernière membre du noyau dur d’Emmanuel Macron à quitter le Palais. Ne reste plus que Philippe Grangeon qui l’a rejoint début février. » Plus encore, le départ précipité de Griveau pour briguer la mairie de Paris ajoute à la liste des contre-temps qui viennent porter un coup au « maître des horloges » , Macron étant en effet contraint d’opérer un remaniement qui ne correspond pas pour autant à une nouvelle étape – tant espérée – de son quinquennat.

En effet, par ces nominations, Macron a décidé de s’entourer uniquement de ceux qui lui sont les plus proches, alors que ces derniers jours ont marqué le dixième départ d’un membre du gouvernement, avec les démissions de Benjamin Griveaux, Mounir Mahjoubi et Nathalie Loiseau. Si cette décision est éminemment défensive, elle comporte aussi le risque d’exposer encore plus l’isolement d’Emmanuel Macron. En cela, comme l’écrit la journaliste Alba Ventura : « Cette fidélité crée de la solitude. Il n’ouvre pas le jeu, il ne donne pas de gage à l’extérieur. Il se recroqueville sur ceux qu’il connait, ceux en qui il a confiance, ceux dont il pense qu’ils se jetteraient de la falaise pour lui. (…) Le risque c’est de promouvoir des personnalités qui ne sont pas prêtes ou pas adaptées. Et le danger, c’est que ça fait du président le seul fusible possible. »

Un choix qui, dans un moment charnière du quinquennat de Macron, après quatre mois de mobilisation intense, le fait apparaître plus isolé que jamais.


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