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Une répression féroce

Toulouse. Les habitants des quartiers populaires autour du Mirail se révoltent

A quelques pas de la fac en grève du Mirail, les quartiers populaires de Toulouse se sont embrasés. En cause, une répression violente et quotidienne, un racisme d’État décomplexé et une précarité croissante. Alors qu’actuellement les étudiants font pour certains leur toute première expérience de la violence d’État, dans la cité de la Reynerie ou celle du Mirail, c’est le lot quotidien.

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Des révoltes dans le quartier du Grand Mirail deux nuits d’affilée, peut-être trois

« Et pourquoi ? Ils mangent des claques, ils se font défoncer, vraiment, ils se font maltraiter. Au bout d’un moment on en peut plus.  », témoigne un habitant du quartier Grand Mirail au micro de La Dépêche.

Une série d’affrontements entre des habitants de la cité de la Reynerie et les forces de répression, envoyées en très grand nombre, ont commencé ce dimanche soir. Le lendemain, toujours dans la soirée, ils s’étendaient aux quartiers périphériques du Mirail, de Bellefontaine et de la Farouette, séparé du centre-ville par la rocade.

Les sources ne s’accordent pas sur « l’élément déclencheur ». Une vidéo montrant une habitante du quartier violemment interpellée d’un côté, la mort très suspecte d’un jeune habitant placé en détention à la maison d’arrêt de Seysses de l’autre. Dans tous les cas, c’est la répression policière et judiciaire, quotidienne, qui se montre. Alors que la colère montait dans ces quartiers populaires (pour ne pas dire pauvres) de Toulouse, la mairie a répondu en envoyant tout une armada policière pour « rétablir l’ordre », le sien, celui de la ghettoïsation et de la violence permanente contre les populations qu’elle asphyxie de précarité et de relents racistes néo-coloniaux.

Dans la nuit du dimanche soir, des jets de projectiles ont commencé, avec des voitures brûlées, le commissariat du Mirail en ligne de mire et des voitures de police ont été dégradées. Près de 200 policiers, CRS et gendarmes ont été déployés, une armada répressive qui s’est vu accompagnée d’un hélico de la gendarmerie pour boucler complètement le quartier, quand c’est justement la répression policière qui était à l’origine des événements. Pas moins de 300 grenades lacrymogènes ont été tirées.

Dans la nuit suivante, c’est le même dispositif répressif (lacrymo, flash-balls et autres) qui a été mis en place sur un périmètre plus large que le seul quartier de la Reynerie. Dans le Grand Mirail, ni entrée, ni sortie, et le maire LR de Toulouse, J-L Moudenc commence à plancher sur un couvre-feu pour les mineurs, mettant encore un peu plus en étau la population déjà fliquée nuit et jour. Cette fois-ci dix-huit habitants du quartier ont été interpellés, dont 6 mineurs placés en garde-à-vue. Les personnes majeures elles vont passer en comparution immédiate ce mercredi.

Ce qui a mis « le feu aux poudres » ?

Comme indiqué, différents éléments déclencheurs sont pointés du doigt. Dans l’après-midi, une (énième) arrestation violente par la police d’une habitante du quartier avait été filmée. Mais c’est aussi la mort d’un détenu de 27 ans à la maison d’arrêt de Seysses qui pourrait être à l’origine de la révolte selon Le Parisien.

Une information aurait circulé selon laquelle le détenu en question aurait été tué par les gardiens de la maison d’arrêt. De son côté le parquet stipule que sa mort est dû à une asphyxie « compatible avec une pendaison » selon France 3. L’hypothèse du suicide vient alors dans plusieurs articles amoindrir la gravité de ce fait, sérieusement mise à mal par la colère des détenus qui s’est exprimée par la suite.

A la maison d’arrêt de Seyssses, qui compte 615 places, 1 000 personnes sont détenues, et celle-ci doit compter jusqu’à aujourd’hui plus d’une dizaine de cas de suicide. Un nouveau mort qui a conduit les détenus de Seysses à se rebeller, momentanément, en refusant de rentrer dans leurs cellules dans la journée du lundi.

Un évènement qui n’est pas sans lien avec un contexte généralisé de répressions quotidiennes et d’asphyxie générale. De quartiers où les pouvoirs regroupent, bien loin du beau centre de la ville rose, les populations les plus précaires, soumises à l’arbitraire de la police et de la justice, au racisme d’état.

Ce n’est que quand la jeunesse des quartiers s’enflamme qu’on entend aussi, noyée sous la propagande médiatique, sa version de l’histoire, celle de la précarité, celle du racisme, celle des insultes, des humiliations, des contrôles permanents, des arrestations quotidiennes. Une histoire de répression, qui s’exprime avec la même violence, à la nuance près qu’elle n’a pas l’État, la technique répressive (ni les médias) de son côté. Car ce sont bien eux qui ont intérêt à maintenir toute une partie de la population dans un état d’extrême précarité.

Ne pas laisser les quartiers être isolés plus longtemps

Ces événements ne doivent pas être détachés d’un contexte plus général de tensions sociales croissantes entre le gouvernement et les autres secteurs en lutte, cheminots et étudiants en première ligne. L’université du Mirail est en grève depuis 4 mois, étudiants et personnels subissent les contre-réformes néolibérales. Sur un autre mode, ce sont les contradictions lugubres d’un système étouffant les classes populaires qui se révèlent par ces révoltes du quartier du Grand Mirail.

Les organisations du mouvement ouvrier ont la sombre habitude de traiter la répression que subissent quotidiennement les quartiers populaires comme un cas à part, en légitimant l’exercice de la violence policière par une nécessité de « retour à l’ordre républicain ». On ne peut que saluer les différentes prises de positions, de différents secteurs qui ont vivement condamné les violences policières que subissent les étudiants. Il s’agit maintenant de condamner cette même police qui réprime violemment les quartiers populaires, et la jeunesse en premier lieu. Car ce sont les mêmes qui matraquent et tuent les jeunes des quartiers, que ceux qui gazent les étudiants et brisent les piquets de grève. Et il s’agit d’un seul et même gouvernement qui l’ordonne, d’un seul et même système qui repose sur notre précarité, et sur nos divisions.


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