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Infirmière en colère

Témoignage d’une infirmière en EHPAD : « et l’hécatombe a fini par arriver… »

Nous relayons le témoignage de S., infirmière en EHPAD dans le 94. Les conditions sanitaires y sont désastreuses pour les personnels autant que pour les patients. Au début de la crise elle nous faisait part de l’inquiétude d’une hécatombe, elle est malheureusement arrivée…

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Crédits photo : AFP /STEPHANE DE SAKUTIN

Dans un précédent article S. nous confiait déjà qu’ « on s’attend à une hécatombe ». Depuis la semaine dernière, le gouvernement semble avoir changé de cap concernant les résidents en EHPAD : si seulement trois tests de dépistages étaient alors admis au début de la crise en France, le nombre impressionnant de décès recensé dans ces établissements ont forcé le gouvernement à revoir sa copie et à pratiquer des tests massifs, mais bien trop tard. S. nous conte le calvaire que vivent ainsi les soignants et leurs résidents.

Le labo avec lequel travaille d’habitude l’EHPAD en question, ne pouvait procurer que 15 tests. La directrice dû alors supplier un autre laboratoire pour lui en fournir une autre dizaine, l’établissement compte pourtant 38 patients. Sur les 25 résidents testés, la moitié sont positifs. Parmi eux, cinq sont décédés et trois ont été placés à l’hôpital le plus proche. Une prise de décision du gouvernement bien trop tardive qui force l’établissement à rechercher des tests, qui se font rares, et parfois même sont en pénurie d’écouvillons qui contiennent les tests. « Certaines de mes collègues, n’ont pu tester personne dans leurs établissements ». Suite à cela une réorganisation de l’EHPAD est mis en place par la directrice : « les Covids à l’étage, les non Covids au rez de chaussé ».

Cela ne palliera pas au manque d’effectif nous dit S. « Nous tournons qu’avec des vacataires, très difficiles à trouver ces temps-ci comme vous pouvez vous l’imaginer, soit ils sont déjà partis mais aussi la peur fait qu’ils ne veulent pas venir ». Et le matériel mis à disposition n’est pas là pour les rassurer : un masque FFP2 et une surblouse pour la journée. « On rentre dans toutes les chambres avec la même surblouse, Covid ou pas Covid ».

Emmanuel Macron balance à chaque passage télé des mensonges éhontés ! Car S. nous le confirme, ne pas tester toute la population c’est prendre le risque de passer à côté de personnes contaminées mais asymptomatique, qui eux pourraient bien contaminer d’autres personnes plus vulnérables. « C’est déjà archi tard de s’être réveillé, sachant que les personnes âgées en EHPAD, ils le sont à cause de nous le personnel soignant. Ils sont isolés dans leurs chambres depuis le début de la crise et que les seules personnes qu’ils voient c’est le personnel soignant. Nous, on n’est pas testé. Et même si je savais que j’étais positive, je n’ai même pas les moyens de les protéger, c’est déjà trop tard ».

Selon S. cette situation n’a jamais été bien gérée. Le manque de matériel est criant alors que c’est la base de l’hygiène pour protéger les patients, en fournir massivement la seule aurait pu sauver des vies. Ce qui rend le travail compliqué car « on en était même au manque de gel hydro- alcoolique, on n’est même plus en mesure de travailler proprement, on travaille comme on peut ». A cela s’ajoute le sentiment d’avoir tué leurs propres résidents car « ils auraient encore pu vivre de belles années, nous les EHPAD on a été abandonné. Comme c’était des personnes âgées, ils ont décidé qu’on ne les prendrait pas à l’hôpital ».

Dimanche, S. a encore dû gérer la mort d’un de ses résidents et aucun médecin ne veut se déplacer, elle s’est retrouvé seule face à la famille endeuillée. Pour le certificat de décès c’est là où le bât blesse, il n’y a pas de médecin qui veut venir afin que les pompes funèbres prennent en charge le corps des défunts.
« Je me suis retrouvée en appel visio avec un médecin qui est dans le 04, qui m’a demandé d’aller dans la chambre d’un résident avec la tablette et lui montrer qu’il était mort ».

S. nous l’affirme, c’est évident que ce sont les politiques menées depuis des dizaines d’années qui font que nous en sommes là aujourd’hui. « Tu demandes à un hôpital d’être rentable, c’est quoi le concept ? ». Depuis des années, la priorité à l’ambulatoire est pratiquée causant ainsi des pertes de lits et une mauvaise prise en charge des patients.

Les annonces d’Emmanuel Macron ne font plus d’effet, ni sur la population, ni sur les travailleurs des hôpitaux. Les réels liens internationaux qui subsistent sont les liens inaliénables des travailleurs. C’est pour cela que chaque travailleur de la santé a le devoir de réclamer la nationalisation de l’entièreté de ce secteur. La mise en place d’une politique par et pour les travailleurs de la santé, et gratuite pour tous !

S. quant à elle ne cache ni son chagrin ni sa colère après neuf jours de travail d’affilé en journée de douze heures : « Nous on n’est pas en guerre, on n’a pas signé pour mourir. D’ailleurs nous on n’a pas de prime de risque, on n’est pas à l’armée ni à la police ! A la fin de la crise je serai la première à aller manifester et à faire grève ! ».


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