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Témoignage d’une coiffeuse : « La pression, chaque jour, me faisait avancer vers une dépression assurée »

Nous relayons ci-dessous le témoignage d’une coiffeuse concernant les dures conditions d’exploitation et précarité dans le secteur. Elle explique comment la pression et le harcèlement la faisait se sentir comme une esclave et l’ont fait tomber en dépression. Propos recueilli par Leire Izargorri

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Je suis coiffeuse et je veux parler des contraintes de ce métier.
J’ai une expérience de 5 ans dans la coiffure, j’ai fait mes études en Polynésie française mais en arrivant ici en France, la pression est montée. En premier lieu, je suis titulaire d’un CAP seulement, ce qui ne m’a pas donné beaucoup de chances. Du coup j’ai toujours dû montrer ma motivation et j’ai dû être prête à me battre pour exercer mon métier.

J’ai commencé dans un salon qui me permettait de me former pour être à jour de leurs techniques. J’ai accepté de signer un contrat d’insertion et formation pour l’emploi. Alors j’ai travaillé gratuitement pendant des mois, mais le papier de la convention que j’avais signé avec eux n’est jamais arrivé à Pôle emploi... ça n’a servi à rien mis à part le fait de me faire travailler sans salaire.
Cette entreprise prend beaucoup d’étrangers comme moi, et des gens qui ont besoin d’un travail. Ils recrutent chaque semaine des nouvelles personnes en faisant des conventions de 6 mois voire plus, payées à moins de 500 euros par mois.

C’était aussi mon cas. Chaque mois, je devais faire jusqu’à 10 heures par jour, donc 45 heures par semaine avec 1h pour manger, et pas toujours. Mais la question était qu’à la fin de la journée, dans les ordinateurs, on avait seulement déclaré 7h par jour ce qui faisait "35h par semaine".
Je pensais que c’était comme ça la convention, mais apparemment dans un stage tu n’as pas trop le droit de poser des questions. Finalement, j’ai passé 4 mois, avec mon contrat d’apprentissage, à travailler dans un salon avec des objectifs de ventes que je devais atteindre et des chiffres d’affaires par jour. Pendant le période de fêtes de décembre, on n’avait même pas de temps pour aller aux toilettes.
Les chefs nous mettaient la pression et on se faisait harceler constamment pour aller de plus en plus vite. Une fois que j’ai eu un contrat comme salarié, les heures n’étaient pas déclarées et c’était juste marqué « contrat pour 35h », avec un salaire à la hauteur du SMIC.
J’ai trouvé beaucoup d’abus et une fatigue intenable, je rentrais juste pour dormir, je n’avais même pas envie de manger et la pression, chaque jour, me faisait avancer vers une dépression assurée. Avec ce rythme-là, je ne pouvais même pas avoir une vie personnelle car je commençais à 7h du matin, quand je me levais pour me préparer pour être sur mon lieu de travail avant 9h, pour finir des fois après 20h lorsqu’on fermait le salon. La responsabilité de caisse, de stock, mais surtout d’être effective chaque jour avec les missions demandées chaque matin, étaient un casse-tête.

Á la fin de la période d’essai, au bout de 7 mois travaillés dans l’entreprise, pendant la période des fêtes, on m’a dit que mon contrat ne pouvait pas être reconduit car je n’étais pas assez productive pour le salon.
Je suis allée me renseigner sur le droit du travail mais on m’a expliqué que les conventions collectives de travail dans la coiffure sont comme ça et que les salariés ne peuvent rien y faire.

Mes heures de travail faites en plus, vu qu’elles n’étaient pas déclarées, l’entreprise avait raison et comme le salon fait partie d’une grande chaîne, cela ne valait pas le coup de faire des démarches aux prud’hommes.
J’ai perdu les heures travaillées et pas payées. J’étais dépressive à cause de ce système et toutes mes envies d’être une bonne travailleuse, enthousiaste et motivée, sont parties au fur et à mesure que je faisais des salons, là où j’ai toujours gagné le smic et où je devais en plus acheter mon matériel (environ 800euros) et investir pour les vêtements de « code dressing » qu’exigeait la boite.

Tout ça pour à chaque fois signer des contrats à durée déterminée en période d’essai, sans droit à une mutuelle et limite dans le cumul d’heures pour demander une formation.
Ce qui me reste à dire, c’est que je me sentais vraiment une esclave, une machine à produire, que je n’avais même pas le droit de manger ou prendre de pauses pour respirer et soulager le corps des tensions quotidiennes, d’y être constamment mise en question par rapport à mes compétences, harcelée et obligée d’être soumise.


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