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Guerre en Ukraine

Sanctions renforcées, base militaire bombardée à 20 km de la Pologne : la crainte d’une escalade OTAN-Russie

Le bombardement par les troupes russes dimanche d’une base militaire proche de la frontière polonaise fait ressurgir le spectre inquiétant d’une escalade militaire avec l’OTAN, alors que Moscou entend viser les convois occidentaux acheminant des armes vers l’Ukraine.

Jade Ruiz

14 mars 2022

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Dimanche 13 mars à l’aube, des frappes russes ont bombardé la base militaire de Yaroviv dans l’ouest de l’Ukraine, à seulement 20 km de la frontière polonaise. Le site servait à la formation de volontaires étrangers venus combattre côté ukrainien, ainsi que de plateforme de livraison d’armes. Ce « Centre international pour le maintien de la paix et de la sécurité » abritait avant la guerre un centre d’entraînement de l’OTAN servant à former les militaires ukrainiens, explique notamment Le Point via l’AFP

Une base militaire ukrainienne bombardée à quelques kilomètres de la frontière polonaise

Selon le gouverneur de la région, Maxim Kozitsky, 35 personnes ont été tuées et 134 blessées par l’attaque, lors de laquelle « plus de trente missiles » auraient été tirés, et la plupart abattus. On ne connaît à l’heure actuelle la nationalité des personnes décédées, les autorités ukrainiennes assurant ne pas avoir recensé de citoyens étrangers parmi les victimes. De leur côté, les autorités russes ont affirmé que « jusqu’à 180 mercenaires étrangers et un important lot d’armes étrangères [avaient] été détruits », rapporte Le Monde.

Alors que la base militaire de Yaroviv se trouve à une vingtaine de kilomètres de la frontière polonaise, jamais une frappe aérienne russe n’avait depuis le début de l’invasion touché une cible aussi proche d’un pays membre de l’OTAN. Une attaque qui survient alors que le 10 mars, déjà, Serguei Lavrov, le chef de la diplomatie russe avait dénoncé l’envoi d’armes par l’Alliance atlantique. Certaines de ces expéditions transitaient par la base militaire de Yaroviv. De son côté, le porte-parole du ministère russe de la défense Igor Konachenkov a déclaré à la suite de l’attaque que « l’élimination des mercenaires étrangers qui sont arrivés sur le territoire ukrainien se poursuivra », selon plusieurs médias tels qu’Europe 1 via l’AFP

Alors que Moscou fait face au durcissement des sanctions économiques, le bombardement s’inscrit dans une volonté de s’en prendre au soutien occidental à l’Ukraine. En parallèle de ce bombardement qui a fait la une de la presse, l’armée russe poursuit l’encerclement des principales villes du pays, s’en prenant directement à la population civile victime des bombardements et des pénuries d’eau et de nourriture. L’étau se resserre sur Kiev, encerclée par l’ouest et l’est. Lundi matin, des tirs d’artillerie visant un immeuble ont fait un mort.

Du côté de la ville portuaire assiégée de Marioupol où une maternité a été attaquée ces derniers jours, les autorités locales parlent de près de « 2200 morts » dans l’ensemble de la ville et dénoncent le fait que « les occupants frappent cyniquement et délibérément des bâtiments résidentiels, des zones densément peuplées, détruisent des hôpitaux pour enfants et des infrastructures urbaines ». Ces derniers jours, les images de Mykolaiv, ville portuaire du sud de l’Ukraine, ont également montré une ville ravagée par les bombardements de l’armée russe, et des populations à bout de nerf qui tentent de fuire.

L’Otan renforce ses sanctions envers la Russie : la crainte d’une escalade

De son côté, l’OTAN continue d’éviter une confrontation directe avec la Russie, privilégiant le durcissement des sanctions économiques, qui frappe d’abord la population russe, ainsi que l’envoi de troupes dans les pays de l’OTAN frontaliers à l’Ukraine et dans les pays baltes et le renforcement des aides financières destinées à la livraison d’armes à l’armée ukrainienne. Samedi 12 mars, les Etats-Unis ont ainsi annoncé l’envoi de 200 millions de dollars d’assistance militaire

Réunie en sommet à Versailles les 10 et 11 mars, l’Union européenne a de son côté décidé de doubler l’enveloppe consacrée au financement d’armes létales à destination de l’Ukraine, passant à 1 milliard d’euros. Bruxelles examine également un nouveau paquet de sanctions contre la Russie. Bruno Lemaire a annoncé ce lundi matin qu’elles viseraient des oligarques, des exportations de produits de luxe ainsi que des « biens nécessaires à l’exploitation des carburants, du pétrole et du gaz ».

Si le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg a exclu la création d’une zone d’exclusion aérienne impliquant les forces de l’OTAN début mars, les dirigeants occidentaux sont cependant soumis à une pression des autorités ukrainiennes à s’impliquer plus directement dans le conflit. Ces dernières ont ainsi réitéré dimanche leur appel à « fermer le ciel ukrainien » à la suite de l’attaque de la base militaire de Yaroviv, rapporte Le Monde.

Largement écartée, l’idée n’est pas sans convaincre des secteurs de l’appareil d’Etat américain comme en témoigne une lettre ouverte, publiée mardi 8 mars, dans laquelle 27 experts dont d’anciens hauts responsables du Pentagone et du département d’État ainsi qu’un ancien haut commandant militaire de l’OTAN, appellent l’administration Biden et l’OTAN à mettre en place une telle mesure. Cette décision impliquerait cependant d’abattre les avions russes, et ouvrirait la voie à une escalade militaire aux conséquences imprévisibles mais probablement dramatiques.

Outre cette pression, chaque journée supplémentaire de guerre ouvre la voie à des erreurs qui pourraient conduire à une escalade. Dans un article du 4 mars, l’agence de stratégie américaine Stratfor évoquait ainsi différents scénarios qui pourraient « déclencher une confrontation Russie – OTAN plus large » Parmi ceux-ci, l’éventualité d’une tentative de « bloquer physiquement les convois d’armes à la frontières de la Pologne et de l’Ukraine » était perçue comme « augmentant le risque d’un conflit direct avec les membres de l’OTAN », de même qu’une « potentielle activité militaire russe le long de la frontière qui pourrait créer un point de rupture, au cas où un missile, l’artillerie ou une autre frappe touche le territoire d’un Etat-membre de l’OTAN, ou si un avion russe pénétrait dans un territoire frontalier de l’Ukraine ». Ou encore par la mobilisation par la Russie « des minorités ethniques russes dans des Etats baltes (membres de l’OTAN) pour affaiblir leurs gouvernements » en réplique aux sanctions occidentales. Des scénarios multiples, qui montrent les dangers réels d’escalade dans le cadre de la guerre actuelle.

Face à la situation dramatique et au risque d’une généralisation du conflit, ce sont évidemment les travailleurs et les populations qui sont en première ligne. Qu’il s’agisse des réfugiés d’Ukraine, de ceux qui subissent les bombardements de Poutine ou des populations russes qui font face aux conséquences des sanctions, la guerre réactionnaire initiée par la Russie frappe des millions de personnes.

Dans cette situation dramatique, on ne saurait être dupe du rôle de l’OTAN, qui cherche à profiter de la guerre pour s’afficher comme « le camp de la paix et de la sécurité » et mettre en scène une guerre entre « démocratie » et « autocratie », mais dont la stratégie à l’Est a poussé à la guerre, alors que ses sanctions frappent le peuple russe. Face à cette spirale infernale, ce sont les travailleurs et les peuples qui peuvent faire la guerre à la guerre, en Ukraine, en Russie et dans le monde entier : non à la guerre ! Troupes russes hors d’Ukraine ! OTAN hors d’Europe de l’Est ! A bas le réarmement impérialiste !


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