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Réforme des retraites

Retraites : Macron et Berger main dans la main, la division des dates à l’horizon

Repoussé de plusieurs mois début 2018 dans un contexte de mobilisation des Gilets jaunes, le lancement du projet de loi qui vise à augmenter la durée de travail sous couvert d’unifier le système de retraites inquiète l’exécutif qui, conscient de son caractère explosif, multiplie les annonces pour faire passer la pilule.

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Opération déminage de la réforme des retraites

Si Emmanuel Macron tient à cette mesure, qui s’inscrit dans son projet de réforme néo-libérale du système français et doit marquer son quinquennat, il a bien conscience des risques qui l’attendent. Aussi, après qu’Agnès Buzyn ait annoncé la mise en place d’une concertation citoyenne sur la réforme, Macron a expliqué lundi soir qu’il entendait renoncer à la mise en œuvre d’un âge-pivot au profit de l’allongement de la durée de cotisations.

Par-delà les différences de modalités d’une telle option, qui favorise sur le papier ceux qui ont commencé à travailler plus tôt et sans interruption, ce choix se situe sur un terrain inchangé : celui de la remise en cause profonde du système de retraite par répartition, ainsi que la baisse du niveau des pensions. Et c’est au moyen de la contrainte budgétaire que le niveau des pensions s’alignera sur la « conjoncture économique », l’espérance de vie et d’autres facteurs... Faire travailler plus longtemps mais surtout baisser en définitive les pensions de retraites : voilà l’objectif central du gouvernement Macron d’un plan à long terme pour privatiser une partie toujours plus importante des retraites au travers de la généralisation des retraites complémentaires privées.

Ce coup de comm’, changement de position par rapport aux conclusions du rapport Delevoye, vise donc en premier lieu à éliminer du débat un enjeu récurrent de tensions, l’âge de départ, et constitue une ouverture claire en direction de la CFDT pour qui l’âge-pivot constituait une ligne rouge. Une démarche parallèle à la réception à Matignon mardi matin des organisations à l’origine du « Pacte du pouvoir de vivre » initié par Laurent Berger. Pour le gouvernement et pour Macron, l’heure est à la concertation et à l’ouverture vers la société civile et les « corps intermédiaires ». « Cela s’appelle « l’acte 2 » du quinquennat, et le gouvernement devient un club de ministres démineurs. » résume ainsi Cécile Cornudet. Le problème, cependant, c’est que le changement de pied opéré par le gouvernement n’est pas non plus sans contradiction comme l’illustre la sortie du grand patronat sur la nécessité d’un recul de l’âge de la retraite, menaçant même de ne pas soutenir la réforme.

Les limites de l’Acte 2 : une situation qui reste tendue pour Macron

Pourtant, si Macron a réussi à obtenir l’appui de la CFDT, après avoir régulièrement repoussé ses mains tendues au long de la crise des Gilets jaunes, ce soutien semble relativement insuffisant pour prémunir le gouvernement des tensions sociales encore vives.

Macron en est bien conscient, lui qui expliquait lundi « il y a certaines professions qui – si on fait les choses mécaniquement – seraient lésées : infirmières, aides-soignants, enseignants ». (…) Il n’y aura pas de réforme des retraites tant qu’on n’aura pas bâti une vraie transformation de ces professions. » Une préoccupation logique à quelques mois de la grève du bac et alors que la lutte des services d’urgences se poursuit et s’étend. Du côté des enseignants, Jean-Michel Blanquer a ainsi annoncé l’ouverture d’« un vrai chantier de rénovation de la rémunération dans la fonction publique. » afin de temporiser et d’éviter la mise en mouvement de ce secteur.

Pourtant, en dépit du potentiel de contestation fort, alors que la colère qui a généré le mouvement des Gilets jaunes est à même de resurgir à la moindre étincelle, le « plan de bataille » proposée par les directions syndicales, de la CGT à FO, est une caricature de la stratégie des journées d’action saute-mouton sans lendemain qui a démontré toute son inefficience lors des précédents combats. Et le comble, c’est que face à l’une des contre-réformes les plus importantes du quinquennat, la CGT comme FO n’a pas réussi à déterminer ne serait-ce qu’une journée de grève nationale commune.

Au menu donc, la participation très probable aux négociations bilatérales les 5 et 6 septembre, journées éclatées par secteurs (santé le 11, retraités le 13, professions libérales le 16) et par syndicats (FO le 21, CGT et SUD-Rail le 24), c’est à une nouvelle rentrée avec un nouveau record battu dans la division des dates que veulent nous préparer les directions des syndicats dits « contestataires ».

Si le gouvernement met autant de pincettes pour tenter de faire passer la pilule, c’est qu’il a pris conscience que la moindre étincelle peut remettre en scène les irruptions de colères des Gilets jaunes qui durant 6 mois ont fait trembler le pouvoir, notamment en novembre et décembre. Une colère qui pourrait irriguer le monde du travail, et les secteurs qui aujourd’hui se mobilisent avec une radicalité nouvelle comme le secteur hospitalier et la santé, ou encore à un moindre niveau les enseignants.

Si le spectre des Gilets jaunes hante les classes dominantes, les directions syndicales de leur côté œuvrent à la division syndicale et alimentent le corporatisme, divisant les différents secteurs et jouant de fait le jeu de Macron qui tentent de « satisfaire » - ou de ménager - certains secteurs avec notamment son changement de pied sur l’âge de départ à la retraite.

Contre les stratégies de la défaite que nous proposent les directions syndicales, y compris la CGT, nous devons nous battre partout pour un plan de bataille partant de l’exigence du retrait pur et simple de la réforme, du refus de négocier la régression et donc de faire le jeu de l’Acte 2 de Macron, et revendiquant le retour du départ maximal à la retraite à 60 ans pour tous et toutes, sans notion d’annuités à valider. Les précaires, les femmes, et tous ceux qui ont eu des carrières courtes ne sont-ils pas déjà suffisamment pénalisés ?

Ce mouvement peut permettre de commencer à poser le problème du partage du temps de travail, alors que certains se tuent au travail de plus en plus tard pendant que d’autres meurent à force d’en chercher ! Une telle lutte, « tous ensemble », pourrait en s’inscrivant dans la colère et en jonction avec les Gilets jaunes et avec l’ensemble du monde du travail et la jeunesse, remettre de la vapeur pour obtenir une première victoire contre la réforme des retraites, comme un premier pas d’un grand mouvement d’ensemble remettant en cause Macron et son monde.


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