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La garde rapprochée de Macron de retour

Remaniement : Le président face à sa première crise gouvernementale

Pour la première fois, Macron semble ne pas avoir été le maitre du temps. Pressé par les affaires à répétition qui touchent son gouvernement, c’est la démission Sylvie Goulard, ministre des Amées, qui a mis le feu aux poudres. Ce sont coup sur coup quatre ministres qui ont été démissionnés, au lendemain, pourtant, du raz-de-marée Macron à l’Assemblée. Une première dans l’histoire de la Vème République qui en dit long sur la crise plus globale qui couve.

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Crédits photo : Philippe Wojazer / AFP

Tant annoncé, le remaniement annoncé comme « technique » est finalement devenu éminemment politique. Entre lundi et mercredi, quatre ministres sur les dix-huit que compte le gouvernement ont remis leur démission à Edouard Philippe. Deux des ministres, qui ont été les pierres angulaires de la stratégie En Marche pour conquérir le trône présidentiel, ont été soit exfiltrés soit déminés pour tenter de résorber la première crise gouvernementale auquel fait face Macron.

Premièrement, Richard Ferrand, l’une des pièces centrales de LREM, a trouvé un refuge parlementaire en prenant la direction du groupe LREM à l’Assemblée nationale. Un hochet qui cache mal la disgrâce. Deuxièmement, François Bayrou, l’une des pièces maitresse de l’alliance avec le centre, placé au ministère régalien de la Justice, a purement et simplement été liquidé. Sous la pression des affaires et de la démission volontaire de Sylvie Goulard, occupant le très stratégique ministère des Armées, Macron ne lui a pas laissé d’autre choix que de suivre le mouvement.

Ainsi, après avoir laissé passer l’orage, Macron est confronté à la première crise gouvernementale de son quinquennat. Quatre départs du gouvernement en moins de cinq semaines, « cela ne s’est jamais vu dans l’histoire de la République, en tout cas de la Vème République » affirmait Hortefeux, LR. Et cela est d’autant plus préjudiciable que ces démissions font suite à des soupçons d’emploi fictifs, des conflits d’intérêts, alors même que la moralisation de la vie politique était au cœur de la campagne de Macron.

Sous la pression des affaires et de la nécessité de maintenir un équilibre cohérent , Macron a préféré nommer sa garde rapprochée sans grande personnalité. Il a à la fois pioché chez LR pour rabattre les « constructifs », ou encore en nommant des ministres ex-PS pour tenter d’équilibrer son gouvernement. Pour essayer de contenir la colère de Bayrou, deux ministres MoDem ont été nommés.

Annoncé avec plus d’une heure de retard, le fait le plus notable de ce remaniement est la montée en puissance des compagnons de route d’Emmanuel Macron. Stéphane Travert, qui avait participé à En Marche dès son lancement, est nommé ministre de l’Agriculture à la place de Jacques Mézard, qui, de son côté, remplace Richard Ferrand. Proche parmi les proches de Macron, Julien Denormandie, secrétaire général adjoint d’En Marche, devient secrétaire d’Etat auprès de Mézard.

Pour piocher à gauche, Macron et Philippe ont recruté Nicole Belloubet, juriste et membre du Conseil Constitutionnel depuis début 2013 pour remplacer François Bayrou. La ministre aura pour charge de porter le projet de loi sur la moralisation de la vie publique, l’un des textes phare du début du quinquennat et des plus emblématiques au vu des affaires à répétition. Elle a notamment été élue sur une liste socialiste au Conseil Régional de Midi Pyrénées en 2010.

Aux Armées, à la place de Sylvie Goulard, Macron a nommé Florence Parly, ancienne secrétaire d’Etat au Budget sous le gouvernement Lionel Jospin, figure de la haute administration et cadre dirigeante à la SNCF. La nouvelle ministre fait partie elle aussi de cette ouverture à « gauche ». Le poste aurait été initialement proposé mais refusé par Jean-Pierre Raffarin et Arnaud Danjean. Elle sera secondée par la secrétaire d’Etat, Geneviève Darrieussecq, l’une des deux élues MoDem à rejoindre le gouvernement.

L’ouverture à droite se poursuit, avec Sébastien Lecornu, secrétaires d’Etat auprès du ministre d’Etat, et Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’Etat auprès du ministre de l’Europe et des Affaires étrangères. Le premier est proche de Bruno Le Maire et le second, sénateur de l’Yonne, a été le premier élu LR à rejoindre Emmanuel Macron pendant la campagne. Nathalie Loiseau, actuelle directrice de l’ENA, remplacera Marielle de Sarnez en tant que ministre chargée des Affaires européennes.

Avec la nomination de ce gouvernement, Macron cède pour la première fois à la pression des affaires à laquelle il semblait pourtant hermétique. On se rappelle la règle claire qu’il exprimait : pas de démission tant qu’il n’y a pas de mise en examen. Mais ce coup tactique lui permet de se débarrasser à moindre coût d’un allié devenu très encombrant à savoir Bayrou, le MoDem et l’ensemble des affaires qui vont avec. Macron cède ainsi préventivement à la pression pour déminer le terrain d’un gouvernement « amené à durer ».

Mais la leçon fondamentale de cet épisode inattendu, c’est qu’en définitive cette crise au niveau gouvernemental illustre que même si le patronat semblait avoir réussi à régler, au niveau conjoncturel, la crise de régime de la Vème république, mise à nu par les affaires de la droite, et la mort clinique du PS, au travers de l’élection de Macron et de sa majorité absolue au Parlement, les contradictions de la situation restent saillantes : les démissions de 4 ministres au lendemain d’une victoire écrasante aux législatives révèlent que c’est bien la crise structurelle qui continue à marquer les rythmes de la conjoncture politique immédiate, indépendamment du « sans-faute » de Macron jusqu’à présent et des succès qu’il a su engranger.


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