Dans son témoignage, le père de Pavlos Fyssas a assuré que l’assassinat de son fils par le membre d’Aube Dorée, Giorgios Roupakias, était un acte prémédité, suivant les ordres donnés par la direction du parti. Panagiotis Fyssas a également confirmé le fait que le coup de couteau fatal était l’œuvre d’un professionnel, et son exécution anticipée et préparée. Il a aussi souligné le caractère manifestement politique de cet assassinat, véritable représailles aux paroles utilisées dans les chansons de son fils contre le fascisme et, par extension, contre Aube Dorée.
Durant le procès, c’est avant tout la responsabilité du parti néo-nazi Aube Dorée qui était en jeu. Premier témoin reçu à la barre, le père de Fyssas raconte, tremblant :
« À l’hôpital où ils ont emmené Pavlos, j’ai demandé au médecin si la mort était liée au retard de l’ambulance. Il m’a répondu que le coup qui avait été asséné à Pavlos était l’œuvre d’un professionnel. [Roupakias] l’a poignardé et a tourné le couteau pour que l’hémorragie soit fulgurante. Mon fils a survécu pendant quatre minutes, dont il a profité pour dénoncer son agresseur. Il a dit à la police « c’est lui qui m’a tué ».
« Cette organisation veut bâillonner tous ceux qui s’opposent à elle. Les chansons de Pavlos, parce qu’elles dénonçaient le fascisme, les dérangeaient ». Avant d’ajouter : « Ils ne font rien sans en recevoir l’ordre. Ils ont besoin de recevoir des ordres y compris pour se lever d’une chaise ».
Panagiotis Fyssas n’a pas manqué de faire également référence aux propos employées par le dirigeant d’Aube Dorée, Michalloliakos, qui, durant la campagne électorale a affirmé que son organisation reconnaissait la responsabilité politique du crime du musicien, sans toutefois en reconnaître la responsabilité pénale.
Pour l’assassinat de Pavlos, Roupakias affirme quant à lui être disposé à accepter les charges d’« homicide involontaire », sans accepter le fait d’appartenir à la moindre organisation criminelle, maintenant sa version selon laquelle il a poignardé Fyssas par « légitime défense ».
La juge accuse Aube Dorée d’agir comme une organisation criminelle de type militaire, en incitant à la violence et à l’exécution d’immigrés et d’opposants politiques. Jusqu’à aujourd’hui, les dirigeants d’Aube Dorée ont malgré tout réussi, grâce à diverses manœuvres, à retarder et à empêcher la bonne tenue de ce procès.
Chaque séance et déclaration sont suivies avec beaucoup d’attention de la part de la jeunesse grecque. En effet, Pavlos Fyssas était un chanteur de hip-hop de 34 ans, issu du quartier populaire du Pirée, une zone qui a longtemps été le cœur industriel de la Grèce. Pavlos, comme ses parents avant lui, a travaillé plusieurs années dans le port, sur le chantier naval de Perama. Sous-produit de la crise économique, cette zone s’est transformée en vitrine du chômage de masse, avec ses boutiques closes et son désespoir. Au même moment, l’influence d’Aube Dorée s’est progressivement accrue dans le quartier.
Dans la nuit du 17 au 18 septembre 2013, Pavlos s’est rendu dans un bar du quartier de Kerastsini avec son amie et un groupe de copains pour voir un match disputé par le PSG et Olympiakos. Selon plusieurs témoins, entre eux et le patron du bar, tout allait bien jusqu’à ce qu’ils sortent.
Des dizaines de néo-nazis les attendaient sur le trottoir d’en face, avec leurs flots d’insultes et de menaces. Quelque-uns se sont rapprochés de Pavlos et l’ont empoigné, mais le coup mortel est venu d’un homme de 45 ans qui est descendu d’une voiture et qui a frappé Pavlos de deux coups à la poitrine.
La première version des faits enregistrée par la police a été celle de la bagarre entre deux bandes, une version difficilement acceptée pour la majorité. Une fois le téléphone de l’assassin inspecté, la police a découvert qu’il avait appelé des dirigeants d’Aube Dorée juste avant de commettre le meurtre. L’assassin est arrivé sur les lieux de la bagarre en voiture, peu de temps après avoir reçu un coup de fil.
La famille de Pavlos n’a cessé de dénoncer la passivité de la police pendant les faits, un laxisme qui a probablement contribué à la mise en œuvre de l’opération néo-nazi.
Durant cette même nuit, les rues des quartiers aux alentours et du centre d’Athènes ont été envahies par des jeunes réclamant justice pour la mort de Pavlos. D’autres affrontements de rue entre néo-nazis et antifascistes ont eu lieu cette nuit-là. Depuis cette nuit, Pavlos Fyssas est devenu un symbole de la lutte de la jeunesse contre les néo-nazis. Au deuxième anniversaire de sa mort, il y a quelques jours, des manifestations se sont tenues, exigeant la justice pour ce crime resté impuni, dans les rues d’Athènes comme dans d’autres villes grecques.
