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And the winner is… (pas celui que l’on croit)

Prix Charlemagne. Macron décoré par Merkel, tout un symbole

Le président français a reçu le prix Charlemagne à Aix-la-Chapelle, ce jeudi. Récompensant sa « vision » de l’Union Européenne, il s’agit en réalité d’une médaille qui met davantage en avant ses postures qu’un bilan politique réel. Derrière cette remise de prix se cache en fait le retour en puissance de l’Allemagne et une tentative de refonte d’un « couple franco-allemand » dont le barycentre penche toujours du côté de Berlin.

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Ce jeudi 10 mai Emmanuel Macron recevait le prix Charlemagne « récompensant les mérites pour l’unification européenne » à Aix-la-Chapelle, en Allemagne. Ce prix reçu des mains de la chancelière allemande Angela Merkel récompense la « vision forte de l’Europe » développée lors de sa campagne présidentielle. Entre Brexit et montée des populismes européens, à l’Est comme au Sud, l’élite politique européenne sacre donc Macron comme son champion face aux eurosceptiques de tous bords qui sont actuellement un frein à la construction d’une Union Européenne forte au service de la bourgeoisie.

Il faut cependant noter que le président a été récompensé pour des promesses et des discours davantage que pour des actes. Cette récompense pour la posture consacre aussi et surtout celle qui la lui a remise : Angela Merkel. Celle-ci n’a pas hésité à vanter la « vision » de Macron pour une Europe renouvelée. En effet, avec les difficultés de Theresa May post-Brexit, la crise politique et institutionnelle en Italie, la position de retrait de Madrid, focalisé sur la question catalane, ou encore la percée des populismes en Europe de l’Est, Macron est l’un des derniers interlocuteurs de poids pour la Chancelière au sein de l’UE.

Mais pour ce qui est des idées phares de Macron pour l’UE, que ce soit la question d’un budget européen ou la création d’un poste de super-ministre des Finances, c’est toujours « nein ! », de même que sur la question de l’excédent commercial allemand, qui se réalise au détriment de ses partenaires européens. Merkel a réaffirmé que c’était toujours elle, et seulement elle, qui donnait le tempo. Avec la mise en place d’un gouvernement de grande coalition à Berlin après des mois d’incertitude, il y aura bien un « nouveau départ » pour l’Europe, mais uniquement parce que Merkel en a décidé ainsi. Ainsi, même si elle insiste sur le rôle novateur des idées de Macron, l’application de ses idées ne se fera que dans le cadre d’un binôme franco-allemand où l’Allemagne aura plus que jamais la préséance.

L’attribution du Prix a également mis en lumière l’échec complet de la visite de Macron à Donald Trump. Le président français a resservi ses phrases toute-faites sur le « multilatéralisme », il n’en reste pas moins qu’il a servi de « caution multilatérale » à Trump pour remettre en cause le traité sur le nucléaire iranien dont la conséquence directe est l’escalade actuelle entre Téhéran et Tel-Aviv. Il aura beau avoir appelé à un apaisement au Proche-Orient, on devinait le sourire de Merkel face à cet allié qui joue au De Gaulle sans en avoir la carrure et les moyens.

Mais la remise du prix Charlemagne à Macron sert aussi aux dirigeants allemands à renforcer leur dernier interlocuteur fiable du continent. Encore une fois, Macron va user de sa posture internationale pour essayer de capitaliser en interne. Cette consécration va être mise au service de 2019, Macron ayant bien l’intention de transformer, aux européennes, l’essai double des présidentielles et des législatives de 2017. Il reste, néanmoins, un petit souci, pour La République en Marche. Il ne s’agira pas seulement de cliver entre pro et anti-européen (pour aller ratisser large, d’Alain Juppé au centre voire à des morceaux du PS). LREM n’a toujours pas de groupe parlementaire défini au sein duquel il pourrait siéger à Strasbourg : ni PSE, ni PPE, ni quoi que ce soit. Compliqué, de cette façon de « peser sur le destin de l’Europe ».

Tout cela, Merkel le sait pertinemment. Avec l’attribution du prix, elle laisse aux médias français le soin de transmettre en boucle des images de leur champion. Elle sait qu’en dernière instance, c’est elle qui continuera à tirer les ficelles. C’est ce que souligne la presse allemande : on y parle de « partenariat » et de « collaboration » entre Berlin et Paris, mais ce sera sous la houlette de la Kanzlerin.


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