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Mort à l'APC !

Pourquoi il est nécessaire que la grève à Derichebourg aéro soit massive ce 12 juin

La direction de Derichebourg Aéro entend imposer, avec l'appui de la direction de FO, un accord de performance collective promettant une précarisation massive des travailleurs. Marquer un coup de force par la grève et le rassemblement ce vendredi 12 juin est à l’ordre du jour.

Julian Vadis

11 juin 2020

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La direction entend passer en force, avec l’appui de FO : seul un rapport de force conséquent permettra de remettre en cause l’APC

Depuis mardi dernier, les travailleurs de Derichebourg ont entamé une grève reconductible courant, au minimum, jusqu’à ce vendredi. C’est précisément ce 12 juin que la direction entend signer l’Accord de Performance Collective (APC) massivement rejeté par les grévistes. Dans ce contexte, et comme le réaffirmait le délégué syndical FO Jean-Marc Moreau devant les grévistes ce mercredi, la direction du syndicat majoritaire Force Ouvrière entend signer coûte que coûte.

Pourtant, cet APC est une véritable saignée pour les travailleurs. Non seulement, le spectre de licenciements n’est absolument pas écarté sur le moyen terme, mais il est aussi question d’une détérioration immédiate sur les salaires des travailleurs. Comme l’expliquent plusieurs travailleurs, « l’emploi sans salaire, n’est plus un emploi ». En effet, l’APC vise à rogner sur une grande partie des primes et au maintien du système du chômage partiel. Pour nombre de travailleurs, cela se traduit déjà par une perte sèche pouvant dépasser les 500€ net par mois ! Une précarisation XXL qui aura les conséquences que l’on imagine sur la vie des salariés et de leur famille, qui plus est dans un contexte de crise économique et sanitaire.

Face à la détermination de la direction, qui bénéficie de l’appui de la direction du syndicat Force Ouvrière, il n’y a qu’un rapport de force conséquent qui peut permettre d’obtenir, à minima, le report de l’APC. Au contraire de ce que voudrait faire croire le délégué syndical de FO, les travailleurs ne sont pas obligés de choisir « le moindre mal » de l’alternative imposée par la direction : les licenciements ou une baisse de salaire. Si de très nombreux travailleurs sont contre cet accord, le fait qu’une grande partie d’entre eux soit en chômage partiel, subisse des pressions de leur hiérarchie (voir cet article pour tout savoir sur le droit de grève et faire face aux pressions) ou n’ait pas accès à toute les informations sont tout autant de freins objectifs à la massification de la grève. Pour cette journée cruciale du vendredi 12 juin, il est pourtant indispensable que la grève à Derichebourg soit massive et active pour se rendre devant le siège lors de la réunion qui doit entériner l’APC. C’est à cette condition qu’il sera possible d’arracher une première victoire dans le cadre de la lutte contre les licenciements et la précarisation des conditions de travail.

L’APC aujourd’hui, les licenciements demain : la direction ne s’arrêtera pas !

Fin mars, le PDG de Derichebourg Aeronautics Services, Pascal Lannette, déclarait qu’il fallait choisir entre mourir de faim ou mourir du virus. Une prise de position visant à faire repartir la production coûte que coûte. Le 4 juin dernier, à l’occasion d’un rassemblement des travailleurs en colère, Lannette avait alors maintenu ses propos. Des prises de positions qui donnent un aperçu assez saisissant de la détermination de la direction de Derichebourg pour imposer ses attaques.

Il ne faut pas s’y tromper, comme on le voit dans la période, cette attaque ne sera pas un cas isolé. Déjà parce que la possibilité de licenciements pour l’après-APC ne peut pas être écartée, mais aussi parce que le déroulement de la crise et la quête de rentabilité à tout prix pourrait déboucher sur d’autres attaques, alors que Derichebourg Aéro a engrangé des centaines de millions de bénéfices nets sur les dernières années sans parler de l’ensemble du groupe Derichebourg, où les bénéfices se comptent en milliards. A ce titre, les exemples de la crise de 2008, comme celui de Continental, sont criants. Alors que les ouvriers avaient accepté de travailleurs 39h payé 35 dans le but de garder leur emploi pendant 5 ans de plus comme promis par la direction, la boite a purement et simplement fermé un an plus tard, plongeant les ouvriers dans un chômage de long terme voire poussant à des suicides. D’autres exemples peuvent être cités comme à Mahle Behr en Moselle où l’accord a été suivi de trois plans sociaux de 2013 à 2019 ou à Smart Hambach.

La lutte contre les APC aujourd’hui est donc une bataille qui s’inscrit dans un cadre plus large et de plus long terme. L’instauration d’un rapport de force conséquent, l’unité des travailleurs syndiqués et non syndiqués, que l’APC soit signé ou non, sont autant d’éléments déterminants pour la suite. Si la grève de demain est largement suivie et si tous les soutiens extérieurs apportent leur solidarité lors du rassemblement, ce sera un coup dur pour la direction et un élément de pression sur la direction de Force Ouvrière. Mais aussi une expérience de lutte, comme l’ont été la fondation du collectif des salariés ou l’assemblée du 8 juin qui a voté la grève. Toutes ces expériences sont des points d’appui pour mieux frapper lors des combats à venir.

L’unité des travailleurs, seule parade face aux pressions de la direction

Mais ce n’est pas que sur le plan de l’APC, des licenciements et des salaires que la direction se montre féroce. La dynamique ascendante de la mobilisation, avec la constitution d’un collectif de salariés, syndiqués ou non, qui rassemble 400 travailleurs, et les rassemblements réussis de ces derniers jours ont obligé la direction à reporter de deux jours la date de la signature de l’accord. Mais dans le même temps que la direction a cherché à gagner du temps, elle a aussi multiplié les coups de pression, voire d’intimidation, à l’intérieur de l’entreprise. Une situation que décrit Romain, syndiqué à l’UNSA, et qui rappelle que la grève est un droit.

Bien entendu, cet aspect de coup de pression pour limiter au maximum l’extension de la grève est une politique consciente de la direction visant à diviser les rangs ouvriers. Il est aussi symptomatique de la peur bleue qui secoue Lannette et consorts face à la perspective d’un conflit social d’ampleur chez Derichebourg. Là encore, la solidarité et l’unité des travailleurs est la seule arme sérieuse permettant de faire face. En « tête à tête » avec le chef, il est clair que le rapport de force est en défaveur de l’ouvrier. C’est donc en étant massivement mobilisés ce vendredi qu’il sera possible de mettre un stop à ces pratiques d’intimidations au sein de l’entreprise, en faisant la démonstration qu’aucun travailleur ne laissera l’un de ses collègues sur le côté s’il doit faire face à n’importe quel coup de pression. Un fait d’autant plus important que la direction entend faire un exemple pour la suite des événements, en frappant un grand coup pour imposer l’APC, mais aussi d’éventuelles attaques à venir.

Derichebourg est une première bataille dans l’aéronautique qui peut donner le ton à toutes les autres

On l’a vu, les premières annonces de licenciements n’ont pas tardé à venir dans l’aéronautique, avec bien sûr le cas de Derichebourg mais aussi de Daher. Dans l’automobile, l’exemple de Renault, qui va bénéficier d’aides de l’Etat et qui va supprimer près de 15 000 emplois dans le monde et 5 000 en France, montrent l’état d’esprit du patronat face à la crise : la faire payer intégralement aux travailleurs !

En ce sens, la lutte des Derichebourg est d’ores et déjà un exemple à suivre pour l’ensemble des travailleurs, au delà même de la filière aéronautique. Le fait de relever la tête, de s’organiser en collectif regroupant syndiqués et non-syndiqués, de décider collectivement en assemblée est un signal fort envoyé à l’ensemble du mouvement ouvrier.

C’est pourquoi il est important que le rassemblement de demain soit massif, avec les travailleurs de Derichebourg mais aussi un maximum de soutien des différents secteurs populaires et ouvriers. En ce sens, la lutte des Derichebourg peut être une première bataille conditionnant toute les autres. Le gouvernement et le patronat se préparent à faire payer la crise sanitaire et économique aux travailleurs, montrons tous ensemble qu’on n’acceptera ni licenciement ni baisse de salaire !


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