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Qui paiera la crise ?

Pour la secrétaire d’État, il faudra « probablement travailler plus » pour « rattraper » la perte d’activité

A la suite du MEDEF, la secrétaire d’État au ministère de l’Économie et des Finances assume vouloir faire payer la crise aux travailleurs en les faisant « travailler plus ». Une position qui créé des dissensions dans la majorité et attise la colère des classes populaires...

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Alors que le Covid-19 a déjà causé plus de 114 500 morts dans le monde dont presque 15 000 en France, la crise est loin de se refermer, avec des pays qui connaissent aujourd’hui une deuxième vague de contamination, à l’instar de la Chine ou de Singapour. Conséquence de ce désastre sanitaire, la crise économique s’annonce déjà, posant dès à présent la question de l’après-crise sanitaire, de l’après-confinement, et de la gestion économique des suites du virus. Avec des pronostics comparables à la crise de 1929 au moins, une question s’impose : qui paiera la crise ? Aujourd’hui en première ligne de la lutte face au virus, pour le patronat – largement appuyé par le gouvernement - les travailleurs sont évidemment les candidats tout trouvés pour payer la crise de demain.

Derrière le MEDEF, le gouvernement veut faire payer la crise aux travailleurs

Dans une interview donnée samedi 11 avril au Figaro, Geoffroy Roux de Bézieux, déclarait vouloir « poser la question tôt ou tard du temps de travail, des jours fériés et des congés payés pour accompagner la reprise et faciliter, en travaillant un peu plus, la création de croissance supplémentaire ». Ainsi, pour le n°1 du MEDEF, ce sont ceux qui payent le plus cher la crise sanitaire en cours, forcés de travailler au risque de leur vie, qui devront, une fois le gros de la pandémie passée, continuer de servir de chair à canon, cette fois pour le redressement de l’économie. On reconnaît bien là ce patronat meurtrier qui, n’ayant en vue que ses profits, appelle de ses vœux un déconfinement hâtif, « prêts à accepter les morts qui vont avec » une stratégie de l’immunité collective.

Et c’est avec empressement que le gouvernement, par la bouche d’Agnès Pannier-Runacher, a abondé dans le sens du patron des patrons. « Il faudra probablement travailler plus que nous ne l’avons fait avant. » a-t-elle déclaré au micro de France Info. « L’enjeu est de donner de l’oxygène aux entreprises pour qu’elles survivent et passent le cap, mais derrière, il faudra mettre les bouchées doubles pour créer de la richesse collective. » Dans la continuité des mesures prises depuis le début, c’est dans une gestion pro-patronale assumée de la crise que continue ainsi de s’engager le gouvernement, offrant des milliards aux patrons et sacrifiant les travailleurs. Bien loin de la « création de richesse collective » c’est, plus que jamais avec la crise qui se prépare, sur l’autel des profits des grands capitalistes que seront sacrifiés conditions et droit du travail pour l’ensemble des travailleurs.

Pris entre dissensions au sein de LREM et pressions contradictoires, une attaque frontale contre les travailleurs risquée pour le gouvernement

Bien qu’entre patrons et salariés, le gouvernement a sans doute possible fait son choix, il se trouve en ce moment dans une position pour le moins délicate. Au plus bas dans le baromètre de la confiance de la population en raison de sa gestion absolument désastreuse de la crise, des scandales et des mensonges sur les masques et autres pénuries de matériel indispensable, gérer la sortie de crise apparaît très compliqué.

D’un coté, il y a les risques évidents d’un déconfinement précoce à l’heure où la deuxième vague du virus déferle sur plusieurs pays, et où en France le nombre de mort, le premier plateau atteint, se maintient à plusieurs centaines par jour. De l’autre coté, c’est le patronat qui presse à la reprise immédiate de la production pour sauver au plus vite l’économie. C’est donc, pris en étau entre ces deux pressions contradictoires, que le gouvernement se perd dans un double discours permanent, et a fini par annoncer ce lundi soir, après avoir reporté son allocution de quelques jours, le prolongement du confinement pour un mois supplémentaire, jusqu’au lundi 11 mai. Un prolongement du confinement qui ne concerne pas les milliers de travailleurs dont les usines ont d’ores et déjà fait reprendre la production.

A l’heure où les travailleurs apparaissent, sinon comme des héros, au moins comme les premiers combattants face au virus, annoncer si ouvertement leur faire payer la crise qu’ils subissent de plein fouet est une position pour le moins périlleuse. Tant et si bien qu’au sein même des rangs LREM des voix dissidentes se font entendre, proclamant que « ce n’est pas aux travailleurs de payer la crise ». C’est ce que déclarait Laurent Saint Martin, député LREM du Val-de-Marne et rapporteur général de la commission des finances à l’Assemblée nationale. Celui-ci, bien que ne développant pas comment l’économie devra rattraper cette dette sur un temps long, exclue ainsi toute éventuelle hausse de la fiscalité. Dans le même sens, sur la droite, Xavier Bertrand a lâché un « On veut rendre fous les Français ? », soulevant la contradiction d’annoncer à ceux qui subissent le plus fort la crise aujourd’hui, qu’ils devront la payer demain ! Des contradictions dont n’est pas exempte la CFDT, Laurent Berger déclarant « indécente » cette volonté de faire « travailler plus » les travailleurs pour rattraper la crise, alors que la CFDT signe déjà des accords de reprise dans plusieurs entreprises...

A ces attaques, les travailleurs doivent se préparer à répondre : nous ne paierons pas la crise !

Alors même que l’épidémie sévit toujours avec force et que les travailleurs sont au cœur de la tornade, c’est sans aucune honte que le patronat et le gouvernement menacent déjà notre camp social de nouvelles attaques. Augmentation du temps de travail, réduction des congés, des jours fériés, ne sont les premières annonces de ces futures attaques contre les travailleurs et le code du travail.

Mais alors que le patronat se prépare à faire payer la crise à ses premières victimes, l’autre camp se prépare et doit se préparer à une riposte. Du coté des soignants, mais aussi de nombreux travailleurs, la grogne monte depuis des semaines, n’attendant que la fin de l’épidémie pour s’exprimer dans la rue. De plus, le Covid-19 est arrivé dans un moment brûlant de la lutte des classes en France, après un an de Gilets jaunes, mais surtout en pleine lutte contre la réforme des retraites. Aujourd’hui, au premier rang des soldats envoyés au front contre le virus, on retrouve les mêmes travailleurs qui se battaient depuis des mois contre le gouvernement, notamment ceux des transports et de la santé. La colère contre ceux qui, après avoir détruit le service publie et voulu précariser les retraites, jouent à présent avec leurs vies n’est que d’autant plus forte. Et avec cette colère, un message clair : « Nous ne sommes pas de la chair à canon » et en conséquence : on ne paiera pas la crise !


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