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Crise des dettes

Pour la 9eme fois de son histoire, l’Argentine face à un défaut de paiement

L'Argentine est entrée ce vendredi dans une situation de “défaut technique” de paiement de près de 500 millions de dollars que le pays se voit dans l'impossibilité de rembourser aux fonds spéculatifs. Une situation désastreuse pour la population et qui rappelle une nouvelle fois que cette dette n'est qu'un mécanisme supplémentaire pour enchaîner le pays aux intérêts des impérialistes.

Julien Anchaing

26 mai 2020

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Crédits photo : JUAN MABROMATA / AFP

L’Argentine se retrouve pour la 9ème fois dans son histoire dans une situation de défaut de paiement, après s’être vue dans l’impossibilité de rembourser aux spéculateurs et fonds privés près de 500 millions de dollars. Dans cette séquence, le gouvernement tente encore de renégocier les conditions du remboursement d’une dette de plus de 66 milliards de dollars desquels les 500 millions en question arrivaient à expiration ce vendredi. Une situation désastreuse pour la majorité de la population qui se retrouvait déjà face à un niveau d’inflation sans précédent depuis la crise de 2001 (plus de 53%) ainsi qu’un taux record de pauvreté (plus de 33% de la population).

Cette fois ci, comme indiqué, c’est avec les fonds “buitres” (vautours) de Wall Street que le gouvernement d’Alberto Fernandez tente une négociation après un premier échec. En effet, la proposition du ministre de l’économie Martin Guzman, s’est vu refuser sa proposition d’échange contre de nouveaux titres avec un moratoire de trois ans sur les intérêts de la dette, une réduction de 5,4 % sur le capital et de 62 % sur les intérêts. De leur côté, les fonds privés, parmi lesquelles on compte notamment Black Rock, ont présenté leurs propres propositions (qui restent pour le moment de la négociation confidentielles), que le gouvernement examine. Un plan criminel d’endettement à long terme du pays sous les conditions de débloquer des fonds dans l’ensemble des budgets de l’Etat quant à l’éducation, les retraites ou encore les services publics et qui pourrait avoir pour conséquence l’agravement sans précédent des conditions du pays pour faire face à la crise sanitaire et à l’augmentation de la pauvreté. Une manoeuvre directe pour que ces organisations et entreprises puissent décider et dicter de la politique budgétaire du pays selon leurs intérêts.

Une situation qui prend d’autant plus d’importance au milieu de la crise sanitaire, alors même que l’activité économique ne fait que ralentir du fait du confinement mis en place le 20 mars dernier et qui laisse d’importantes sequelles sur l’économie Argentine et en crise de la dette externe depuis la gouvernance de Macri en 2017. Cependant, en mars de cette année, une telle situation aurait été synonyme de catastrophe absolue pour l’économie argentine. L’impossibilité de payer la dette pour la majorité des économistes proches des fonds spéculatifs, voire de certains proches du gouvernement était vue comme une chute de laquelle il serait très difficile de se relever. Mais avec la crise sanitaire, difficile de faire une telle annonce alors qu’une grande partie de la production mondiale reste bloquée. Cela a permis au gouvernement d’anoncer que ce défaut était avant tout un défaut “virtuel”, “technique” et qui lui permettrait cependant de repartir vers les négociations d’ici le 2 juin. Pourtant, si l’on suit notamment les analyses de Esteban Mercatante publiées dans La Izquierda Diario, cette prétendue renégociation sous l’égide des fonds de spéculateurs n’annonce rien qui vaille pour la majorité de la population argentine.

En effet, comme il le rappelle dans son article, la cessation de paiements par l’Argentine posée telle quelle signifie notamment des conséquences face auxquelles le pays ne semble pas être préparé et dont le gouvernement d’Alberto Fernandez est responsable. En effet, bien que la grande majorité dela dette contractée par le pays soit avant tout du fait de la politique de Mauricio Macri pendant son mandat d’ouverture du pays aux investisseurs étrangers et d’une politique directe de baisse d’impôts et régulations sur les grandes entreprises (qui aura eu pour conséquences une accumulation sans précédent de dettes avec des fonds spéculatifs privés), le gouvernement a cherché à faire des preuves de “bonne foie” en offrant plus de 5 milliards de dollars récupérés par la Banque Centrale Argentine pour payer la dette. Une situation donc qui laisserait le pays sans défense à court terme.

De plus, cette situation rappelle la crise de 2001 du fait de l’explosion possible d’une crise de la dette et des intérêts que portent dans le pays le FMI ainsi que d’autres organismes financiers internationaux. Les gouvernements des pays centraux ainsi que les fonds spéculatifs prives qui se ruent sur la crise économique du pays pour y affirmer leurs intérêts et le soumettre aux mécanismes d’exploitation impérialistes pour dicter au pays les politiques nécessaires à leurs intérêts économiques.

Dans ce cadre, la possibilité avancée d’une restructuration de la dette, notamment proposée par certains économistes ne fait que rappeler la crise connue 20 ans auparavant, après laquelle le défaut de paiement avait tout de même abouti à un réenchainement du pays de nouveau à la dette, sous la pression des capitalistes locaux tout comme étrangers afin de remettre la main sur les investissements étrangers juteux. Pas étonnant, notamment, que le FMI soutienne le pays dans cette perspective, alors que celui ci est l’un des principaux créanciers du pays.

Encore une fois, il faut rappeler qu’il est impossible de sortir de la crise de la dette sous le diktat des spéculateurs de Wall Street et du FMI qui ne cherchent qu’à enchaîner le pays selon leurs intérêts tout en lu idemandant toujours plus de mesures austéritaires sur la population afin de rembourser la dette de l’Etat. Ce mécanisme d’expoliation constante des richesses du pays a de plus vu réellement le jour sous la dictature de la junte militaire en 1976. Celle ci avait été responsable du très fort endettement du pays dans l’intérêt des grandes entreprises alors même que la Banque Mondiale affirme que plus de 40% de la dette contractée pendant cette période servait à la fuite de capitaux, 30% à l’achat non déclaré d’armements et d’importations et que le reste n’avait servi qu’a payé la dette elle même.

En ce sens, la dette externe Argentine est encore une fois un mécanisme d’exploitation du pays et de ces richesses par les grandes puissances (dont la France) et plus particulièrement les Etats-Unis, le FMI (qui il y a peu était dirigée par Christine Lagarde elle même, information qui n’est pas la moindre) ainsi que de nombreuses entreprises privées qui s’enrichissent sur l’appauvrissement de la population. Pour cette dette odieuse, plusieurs fois décrite par de nombreux juges et économistes tout comme par le Front de Gauche Unité comme frauduleuse, illégale et illégitime, la seule solution n’est autre que son rejet souverain de part des travailleurs et de l’ensemble des classes populaires. Le pays a besoin de mesures urgentes pour attaquer les manœuvres des spéculateurs, notamment en refusant de payer le moindre dollar de cette dette pour investir les richesses nationales dans les véritables nécessités de la population, en nationalisant les banques et en construisant une banque d’Etat unique, qui puisse assurer la survie des économies des petits-épargnants et qui puisse permettre l’accès au crédit pour tous ainsi qu’en imposant un monopole d’Etat du commerce extérieur qui aujourd’hui est sous le contrôle d’une cinquantaine d’entreprises qui vivent du chantage du pays. C’est la seule et unique facon de mettre fin à la décadence et le retard provoqué par le capitalisme argentin dépendant de l’impérialisme.


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