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SNCF-CP : mêmes patrons même combat !

Portugal : grève massive des cheminots contre la dégradation du service public

Au Portugal aussi les cheminots luttent contre les logiques de rentabilité au détriment de leurs conditions de travail et de la sécurité des passagers. Après avoir effectué une première grève qui a mis 90% des trains voyageurs et du fret à l’arrêt le 4 juin dernier, ils viennent à nouveau de faire grève deux jours de suite les 12 et 13 juin derniers, et se préparent à remettre le couvert les 23 et 24 juin prochain.

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Une forte mobilisation des cheminots contre la suppression des agents de bord

En ce début de saison touristique au Portugal, les grèves des cheminots portugais ont de quoi taper dans le portefeuille et mettre la pression sur le gouvernement PS. 90% de trains à l’arrêt le 4 juin, 100% à Lisbonne, coûtant 1,3 millions d’euros à la Combois de Portugal (la CP), la « SNCF » portugaise. Près de la moitié des trains à l’arrêt les 12 et 13 juin, faisant perdre près de 700000 euros au total. Bien évidemment, les interviews d’usagers et de touristes mécontents vont bon train. On connaît bien ce genre de reportages « objectifs » aux abords des quais des gares en France. Décidément, les médias dominants sont les mêmes dans tous les pays.

Les cheminots luttent contre le gouvernement qui souhaite donner la possibilité aux compagnies ferroviaires le choix de supprimer l’agent de bord. Or, la réglementation actuelle exige que chaque train roule avec deux agents à bord minimum : le conducteur et un chef de train responsable de la sécurité des passagers et des marchandises, et de la liaison avec le conducteur en cas d’urgence. Pas besoin d’être expert en chemin de fer pour comprendre que ce « choix » a pour but de devenir la norme, réduisant de moitié le coût des agents présents à bord des trains. Une énième occasion de faire des économies pour les compagnies au nom de la rentabilité, contre la sécurité des passagers et la sécurisation des trains transportant des marchandises dangereuses notamment. Comment croire sur parole la CP qui exploite les trains voyageurs, lorsqu’elle prétend garantir, suite à la grève du 4 juin, que « les trains continueraient à fonctionner avec deux agents » ? Du côté du fret, comme en France, il est déjà ouvert à la concurrence depuis 2015 au Portugal, avec deux compagnies privées qui se partagent le marché : Takargot, et le Medway, qui dominent 90% du marché du fret portugais, filiale de la multinationale suisse Mediterranean Shipping Company. On serait tout autant enclin à ne pas faire confiance aux entreprises privées de ne pas être tentées par ce « choix » économique. Mais la grève a été forte dans les trois compagnies, même au fret.

Un gouvernement PS contre les travailleurs et au service du patronat : quelle surprise ! 

Alors même que les chemins de fer portugais nécessitent des investissements publics massifs pour leur entretien, leur rénovation et leur uniformisation avec le reste des voies européennes pour que les rails soient de la même largeur, le gouvernement préfère s’attaquer aux cheminots et à la sécurité des passagers. Les cheminots s’étaient déjà mobilisés depuis plusieurs mois afin d’exiger une augmentation de leurs salaires bloqués depuis près de dix ans à cause des politiques austéritaires, tout comme les enseignants se sont aussi fortement mobilisés cette année pour les mêmes raisons. Cette grève prend place dans un regain des luttes contre le gouvernement PS, alors que récemment ont éclaté des grèves chez les infirmières ou les ouvriers de Volkswagen contre le travail obligatoire le samedi.

Si le PS a donné quelques miettes de redistribution, notamment une augmentation ridicule du SMIC à 580 euros, son rôle principal a été de maintenir les principales réformes austéritaires violentes menées par le gouvernement de droite précédent. Désormais le gouvernement affiche un visage de plus en plus libéral en s’attaquant aux cheminots. Ceux qui ont permis la mise en place de ce gouvernement PS, et le soutiennent, même de manière « critique », à savoir le Bloco et le PCP, devront eux aussi rendre des comptes aux travailleurs et classes populaires portugais.
 

Cheminots portugais et français : même combat !

En France, les cheminots en lutte depuis 3 mois contre la privatisation de la SNCF et les suppressions des petites lignes, ne sont donc pas seuls ! Ce sont les mêmes logiques qui sont à l’œuvre dans tous les pays, à des rythmes différents. D’ailleurs la suppression des agents de bord existe déjà en France depuis plusieurs années dans des trains régionaux, comme en Indre et Loire, PACA, Nord, Occitanie, Rhône Alpes,…selon le dispositif EAS, Equipement Agent Seul, c’est-à-dire un seul agent à bord du train : le conducteur. Tout est dans le titre. Le conducteur hérite donc des missions des agents de bord, rendant ses responsabilités quasiment impossibles à assurer en cas d’urgence. S’il est amené à descendre de sa cabine pour sécuriser des voies par exemple, les passagers se retrouvent livrés à eux-mêmes dans le train, sans personne pour les empêcher de sortir sur les voies. Que faire seul pour rassurer des centaines de passagers en colère ou en stress ? Outre sa tâche de contrôle des billets, qui est la facette principale qu’on connait du contrôleur en tant que passager, le contrôleur assure surtout des missions de sécurisation du train au départ, des passagers en cas d’urgence, d’information diverses et d’aide aux personnes à mobilité réduite. Le conducteur seul ne peut donc pas assurer ces misions tout en conduisant le train. Les cheminots portugais ont donc raison de lutter contre la suppression de l’agent de bord.

Par ailleurs, ils vont eux aussi devoir faire face au processus d’ouverture à la concurrence et privatisation comme celui qui avance à grand pas en France actuellement. Bien que ce processus soit déjà l’œuvre depuis 1991 à l’échelle européenne notamment dans le fret, il s’accélère ces dernières années avec l’adoption des paquets ferroviaires au niveau de l’UE : possibilité des appels d’offre à partir de 2019 pour les lignes régionales, c’est-à-dire l’ouverture à la concurrence avec l’arrivée de compagnies privées pour gérer les lignes voyageurs. Cette ouverture est obligatoire en 2023, dans le but d’une libéralisation totale du rail européen en 2030. Plusieurs pays ont déjà pris les devants depuis longtemps : l’Allemagne depuis 1994, l’Italie depuis 2000, et bien sûr l’Angleterre depuis les années 1980 sous Thatcher avec les bienfaits de la privatisation qu’on connaît : explosion des incidents, des accidents mortels, et envolée des prix des billets. 

Les cheminots français et portugais mobilisés en ce moment auraient donc tout intérêt à se mettre en lien et se soutenir mutuellement pour défendre ensemble l’annulation des dettes ferroviaires et un service public du rail de qualité contre nos deux gouvernements qui, avec d’autres, se sont mis d’accord pour privatiser le rail européen et mettre les cheminots en concurrence entre eux à l’échelle de l’UE.


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