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Après le drame de Conflans, refusons l'instrumentalisation !

Omar Slaouti : « Le gouvernement a voulu récupérer notre émoi en pointant du doigt une partie de la population »

Nous retranscrivons ci-dessous l'intervention d'Omar Slaouti, membre du front uni des immigrations et des quartier populaire (FUIQP), professeur des écoles à Argenteuil et conseiller municipal, dans le cadre du live "Après le drame de Conflans, refusons l'instrumentalisation !" animé par Anasse Kazib jeudi dernier.

24 octobre 2020

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L’émotion elle est largement partagée, après la mort de Samuel Paty, ce crime odieux, inqualifiable, et, il faut le dire, injustifiable. Je le dis pour tout ce qui circule encore sur les réseaux sociaux auquel il faut définitivement tordre le cou : rien, absolument rien ne peut justifier ce qu’a subi Samuel Paty. Et c’est condamné de la part des quartiers populaires, il y a zéro ambiguïté. Fondamentalement tous ceux et toutes celles qui vivent dans ce pays-là, et sans doute au-delà, sont en totale empathie à l’endroit de la famille, avec les élèves, avec les collègues de Samuel Paty : là-dessus il n’y a pas débat. Là où ça devient grave c’est que le gouvernement a voulu nationaliser nos émotions, a voulu nationaliser notre émoi. Nous avons tellement été saisis que le gouvernement a souhaité faire justement une récupération politique. D’ailleurs, si j’ai choisi de m’exprimer alors que le temps du deuil n’est pas terminé c’est que la rentrée va arriver. Et il va falloir dire clairement que les élèves et parents refusent d’être pris en étau entre un crime odieux et une récupération qui les pointe du doigt.

Le gouvernement à son sommet, Darmanin en premier, lieu assume pleinement de montrer du doigt certaines catégories de la population, c’est là que ça devient particulièrement scandaleux. Un arrêt sur image s’impose : il y a un crime odieux qui nous met tous par terre et, là-dessus, il y en a qui se relèvent plus vite que d’autres et qui décident de montrer du doigt certaines catégories de la population. Mardi soir sur BFM, en conférence de presse, Darmanin a clairement dit : « nous allons faire des perquisitions, y compris des perquisitions chez des personnes qui n’ont strictement aucun lien avec le terrorisme » et il ajoute « simplement pour envoyer des messages ». Mais ça veut dire quoi ? Ça veut dire que chez mon pote ce matin à Argenteuil, à 7h du matin, à 7h05 précisément, ils l’ont soulevé lui, sa femme, ses enfants. Une dizaine d’hommes armées, casqués, cagoulés ont pénétré dans les chambres de personnes qui n’ont strictement rien à voir ni de près ni de loin avec le drame.

Ce n’est pas sans nous rappeler qu’après 2015 il y a eu plus de 4000 perquisitions qui n’ont strictement rien donné. Il y a eu 12 personnes qui ont été suivies ensuite pour des choses qui pourraient avoir un lien avec le terrorisme éventuellement, mais dans les faits rien ! En fait, ce qui s’est passé en 2015 Darmanin le fait maintenant avec ce qu’on appelle la loi CIP, parce que l’état d’urgence est rentré aujourd’hui dans le droit commun. Cette loi, depuis 2017, permet à Darmanin avec sa police administrative, j’ai envie de dire avec sa police politique, de montrer du doigt certaines catégories de la population. Alors oui, il ne peut pas y avoir d’union nationale, à la fois pour les raisons sociales qui ont été évoquées précédemment, mais aussi pour des raisons liées au racisme structurel parce qu’il faut comprendre que dans ce pays-là on n’en a pas fini encore avec des réflexes coloniaux ou néo coloniaux. »

Anasse Kazib : Que penses-tu de cette récupération politique qu’est en train de faire Blanquer autour de l’unité nationale et le fait, que certaines organisations, notamment des organisations syndicales, tombent dans le panneau de faire l’unité nationale avec ce même gouvernement qui supprime des classes, des lits dans les hôpitaux, qui réforme le système des retraites etc ? Que penses-tu de ces organisations-là qui ne voient pas le loup rentrer dans la bergerie ?

Dans les faits, les syndiqués, les syndicalistes, le voient clairement, ils comprennent bien. Ils savent avec qui ils partagent les repas dans la boîte, ils comprennent où est ce qu’ils font les courses et avec qui ils les font, ils sont dans les mêmes cités, ils vivent dans cette périphérie de la France où ils ont occupé il n’y a pas très longtemps les ronds-points. Autrement dit il y a un certain nombre qui, dans les organisations syndicales voient à peu près clair dans cette affaire-là. Et heureusement, certains ont le courage de se démarquer de Blanquer et consorts. On a vu un texte inter-syndical juste magnifique contre la loi sur le séparatisme. Un texte qui dénonce cette loi, qui dit qu’il y a une catégorie de la population qui pose problème. Macron il peut prendre toutes les précautions oratoires en disant « attention pas d’amalgames » bien sûr, mais une fois qu’il a dit « pas d’amalgames » tout le monde a compris que cette loi sur le séparatisme vise uniquement les musulmans et les musulmanes. Evidemment les écoles intégristes catholiques on n’en parle pas. Pire que ça Darmanin donne le mode d’emploi : il dit que si on n’arrive pas à dissoudre des organisations autonomes comme Baraka City, le CCIF et autre, ça veut dire que les lois ne sont pas adaptées et qu’il faut donc en changer, d’où l’intérêt de la loi sur le séparatisme. Le mode d’emploi est donné : c’est-à-dire qu’on arrive de plus en plus à un Etat de non droit en ciblant certaines catégories de la population. Il ne faut rien lâcher, et nous on a comme perspective de batailler contre la loi sur le séparatisme.

Il y a un an, on a organisé une mobilisation magnifique contre l’islamophobie, et on peut le dire contre l’islamophobie d’Etat. A cette mobilisation était présents les premiers et les premières concerné.e.s, il faut rappeler le fameux collectif du 10 novembre, dont faisait partie le CCIF et il a eu raison d’en faire partie. Se sont ralliés aussi un certain nombre d’organisations syndicales : CGT, solidaire, FSU etc, mais aussi des partis politques comme le NPA, la France Insoumise, le Parti communiste français, bref cette gauche radicale comme on dit, en plus de toutes les associations culturelles et laïques. Toutes ces organisations dites de gauche étaient au rendez-vous. Aujourd’hui nous leur disons : il y a la loi sur le séparatisme qui est là pour défaire encore davantage l’Etat de droit et pour mettre encore plus dos au mur ceux et celles qui sont les premières victimes du système néo-libérale capitaliste et patriarcal, spécialement dans la situation de crise sanitaire, ceux et celles qui vivent dans les quartiers populaires dont une partie d’entre elle est musulmane. Il va falloir que ces organisations, et on le dit très calmement, soient au rendez-vous dans les prochaines mobilisations contre la loi sur le séparatisme. Cette loi sur le séparatisme encore une fois ça va être une attaque de plein fouet contre les communautés musulmanes. Pour tous ceux qui se revendiquent de la gauche on va se donner rendez-vous pour l’ensemble des droits de la population. Il y a des grands rendez-vous démocratiques, notamment la grande mobilisation le 21 novembre pour les droits des femmes, il y aura d’autres mobilisations contre le racisme et bien évidemment il faut qu’il y ait des jonctions dans tout ça. En tout cas nous on sera dans la rue, et on comptera ceux qui ne sont pas présents. À très bientôt dans les luttes parce que c’est dans les luttes et l’espace social que les choses vont se passer.


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