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Réforme des retraites

Macron à Rodez : le pari du « dialogue », du temps et de la division

A Rodez ce 3 octobre, Macron a joué le retour du Grand Débat. Après un mois de septembre marqué par la grève inédite de la RATP, Macron lance son opération déminage. Sur la base du bilan du mouvement des Gilets jaunes, Macron joue la prévention et installe « le dialogue » pour éviter que ne se cristallise une opposition sur le terrain des grèves et des manifestations.

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Un Macron « ouvert à la discussion »

Macron repart en tournée. Il était à Rodez dans l’Aveyron ce jeudi 3 octobre pour discuter de la réforme des retraites avec près de 500 personnes. Il y a tout juste six mois au milieu de la tourmente, en pleine crise des Gilets Jaunes, il a lancé le Grand Débat, en urgence, comme un sas de décompression à la colère spontanée des Gilets jaunes qui avaient remis en question le maintien de l’ordre. Si cette tentative du gouvernement visait à refermer la crise ouverte, cette fois-ci Macron inverse l’ordre des opérations : il démine avant qu’une crise potentielle se cristallise face à l’énorme chantier que représente la réforme des retraites, après notamment la grève massive le 13 septembre à la RATP. Pour cela, il tente de répondre aux problèmes d’explicabilité de la réforme. Fort de l’expérience des Gilets Jaunes, Macron en passant à l’acte II du quinquennat, a changé de ton et l’objectif de ce débat était clairement de rassurer, avec promesse d’ouverture et de discussion.

Changement de ton et main tendue aux directions syndicales

Cette promesse d’ouverture se manifeste notamment le fait qu’une autorité indépendante où « siégeraient aussi les syndicats » fixe la valeur du point de retraite et que « les fonds des régimes des professions libérales (médecins, avocats) ne serviraient pas à équilibrer l’ensemble du système ». Ces points sur lesquels le gouvernement a changé de discours, correspondent à des demandes des directions syndicales. Un changement de ton qui n’est rien de moins qu’une main tendue vers le « dialogue », alors même que l’ensemble des dirigeants syndicaux ont été rencontrés par Macron, de la CFDT à l’UNSA, jusqu’à FO et la CGT désormais. Quand Macron affirme qu’il n’a « pas purgé le débat », son objectif est de démontrer que les débats restent ouverts tout en allongeant le plus possible. En effet comme il l’a rappelé tout au long du débat, la question des retraites il veut la « discuter » jusqu’en juin prochain, tout en repoussant sa mise en place effective à l’horizon 2025.

Le pari de la division et de l’isolement du secteur public

Il a aussi profité de son passage dans l’Aveyron pour rappeler que les actuels retraités et une partie de ceux qui vont partir à la retraite prochainement ne seront pas visés par la réforme, en ajoutant que « quand on est à cinq ans de la retraite on n’est pas touché ». Une tentative pour rendre le problème plus lointain mais également un moyen de diviser la population, de faire croire qu’il existe des concernés et des non concernés.

C’est aussi en s’attaquant directement au service public tout en cherchant à rassurer les secteurs des professions libérales que Macron cherche à empêcher que les différentes colères ne s’unissent. En effet, il a d’un côté affirmé qu’il n’était pas question de toucher à ce qu’il y a déjà dans les caisses autonomes, en s’adressant ainsi aux avocats, médecins et aux autres professions libérales qui sont descendus dans la rue. D’un autre côté, il a ouvert les hostilités envers le service public en mettant au cœur du débat la question de salaires, carrière et vacances des enseignants. En s’appuyant sur l’échec actuel du système, il promet la fin du système de retraite actuel, par le biais de ce qu’il appelle une « refondation totale ». Une attaque supplémentaire qui pourrait servir au gouvernement à diviser en mettant en avant les enjeux « spécifiques » du secteur public pour éviter ainsi qu’il rejoigne la colère générale et viennent renforcer le possible tous ensemble contre les retraites.

Macron et Castaner divisés sur la question du régime spécial des policiers

Ce débat était aussi l’occasion pour Macron de reprendre la main, en déjugeant Castaner, et en disant, contrairement à lui, qu’il n’était pas question de garder le régime spécial des policiers. « Il n’y aura pas de régime spécial pour les policiers, a affirmé M. Macron. Mais (…) ceux qui ont des risques, sont exposés au risque d’intervention, aux heures de nuit, à la patrouille, à l’ordre public, au terrorisme, ceux qui sont sur le terrain (…), on doit les valoriser. » Immédiatement, la déclaration a provoqué la colère des « syndicats » policiers. Pour Macron, l’objectif est d’éviter d’ouvrir la boite de pandore de l’ouverture des exceptions qui pourrait donner des idées à d’autres secteurs. C’est une contradiction supplémentaire que le gouvernement doit gérer dans le contexte où les forces de police ont aujourd’hui pignon sur rue moyennant manifestations et coups de pression.

La prudence du gouvernement face à la menace d’un « Tous ensemble »

Ce retour du grand débat illustre la peur de voir la question des retraites jouer le rôle unificateur, alors qu’un certain nombre de front sont ouverts, et que la perspective d’un « tous ensemble » emmené par un secteur d’avant-garde comme la RATP, avec sa grève illimitée le 5 décembre, peut commencer à s’installer dans les esprits. Toutes les précautions prises par le gouvernement montrent bel et bien la difficulté du macronisme à faire passer ses réformes dans le climat de défiance et de délégitimation auquel il tente de répondre.


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Philomène Rozan

Etudiante à l’Université Paris Cité , élue pour Le Poing Levé au Conseil d’Administration

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