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Mouvement étudiant

« Le 7 mars, il faut durcir le mouvement » : à Sciences po Grenoble, la mobilisation s’organise

A Sciences Po Grenoble, la lutte contre la réforme des retraites s'organise. Assemblées générales, blocage du site : rencontre avec Clara, étudiante à l'institut d'études politiques qui nous raconte les dessous de la mobilisation.

14 février 2023

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[Crédits photo : Sciences Po Grenoble mobilisé]

 Comment s’est organisée la mobilisation contre la réforme des retraites à Grenoble ? 

A Science Po Grenoble, comme dans beaucoup d’autres écoles, on s’organise en assemblées générales, ouvertes à toutes et tous, avec le personnel. On a la chance d’être souvent aux alentours de 150 ce qui est assez conséquent. Durant ces assemblées il y a des propositions qui émergent et qui sont votées. Le vote est fermé aux membres qui ne sont pas étudiants. Et ensuite on applique les actions. Le premier blocage, qui s’est fait le 31 janvier, a été reconduit, pendant 4 jours.
Nos motivations étaient sur le fait d’alerter sur l’urgence qu’il y avait à se mobiliser. On a été très surpris de l’écart entre les deux dates de mobilisations, 10 jours entre les deux pour nous c’était beaucoup trop. C’est pour ça qu’on a pris cette initiative pour accélérer un peu le mouvement. La réponse de l’IEP a été la mise en distanciel, et donc le blocage n’a pas eu l’écho qu’on attendait. C’est une réponse assez intolérable qu’on a dénoncé collectivement.

Tu répondrais quoi aux médias et au gouvernement qui dit que les jeunes ne devraient pas se préoccuper de la retraite ?

C’est absurde de penser que la réforme des retraites ne concerne pas les jeunes. Notre modèle social repose sur les liens intergénérationnels, on sait très bien qu’on a besoin, et que notre système repose sur les cotisations des actifs d’hier. Nos sociétés sont très liées entre les générations, et tant mieux. Contrairement à ce que pourrait penser la majorité gouvernementale, nous ne sommes pas des entités autonomes et détachées du monde. On a des liens avec nos grands-parents, nos parents, on voit leur épuisement, la pénibilité au travail, les problèmes de santé, on le voit, que ça atteint nos proches. Rien que par solidarité on doit se mobiliser, ça nous touche complètement.

De manière plus directe, ça pose la question aux jeunes du monde dans lequel on veut vivre. On le sait que cette réforme est idéologique, c’est un choix et non une fatalité. On le sait, la jeunesse est au courant de ce qui se passe et c’est pour ça qu’elle se mobilise. Ce n’est pas le monde dans lequel on veut vivre, un monde où c’est le travail qui prime et la vie qui passe après. On veut faire savoir que ce n’est pas le projet qu’on veut pour notre avenir. Il est évident que ce combat nous concerne aussi car on va être plus touchés par le chômage, puisqu’ils veulent faire travailler nos aînés plus longtemps. On se bat pour nos aînés, mais aussi pour nous.

 Au delà de la retraite, quelles sont les raisons de la colère ? Y-a-t-il d’autres revendications qui émergent ? 

Je crois qu’il y a une énorme colère visible depuis plus longtemps, avec Nuit Debout, les Gilets jaunes ou plus récemment les grèves des raffineurs ou des cheminots qui étaient restés isolés. Mais la réforme des retraites permet de faire le lien avec toutes ses colères, ensemble. Nous les jeunes, on a énormément de colère, je le sais. Sur l’écologie la jeunesse ne comprend pas l’inaction du gouvernement, et ça crée beaucoup de colère. Il y a aussi la question de la précarité. Aucun étudiant ne vit au-dessus du seuil de pauvreté, puisqu’on n’a pas le droit à des allocations, de salaire ni rien, et donc on doit travailler à côté. 

Il y a aussi la sélection, qui va être encore accentuée. Globalement on est sélectionné depuis tout petit. Parce qu’il n’y a jamais de place nulle part, les places sont attribuées de manière très peu transparente, ou par des aléas qui ne viennent pas de nous. Écologie précarité et sélection, ce sont des points qui nous touchent au quotidien. Et qui font partie d’un cadre capitaliste, néolibéral de mise à mort de l’État social, qui fait partie de nos revendications.

Le gouvernement dit que c’est une réforme urgente est nécessaire, on nous vend un système productiviste consumériste, capitaliste, mais on nous propose rien d’autre et je crois que c’est ça qu’on veut aussi, un autre système. 

Comment vois-tu la suite de la mobilisation ?

A Grenoble comme ailleurs en France il y a eu 2000 jeunes dans la rue, c’est assez rare. Il y a eu un ralentissement, mais on ne s’en inquiète pas car ce sont les vacances. Les vacances n’arrêtent pas la mobilisation, mais permettent de rebondir mieux, et préparer la journée du 7 mars qui va arriver.

Le but, pour le 7 mars, va être de durcir le mouvement, puisque le gouvernement reste dur. Il va falloir mettre le paquet, et que ce soit le début de l’attaque ! Il va falloir prolonger le mouvement, le durcir et le massifier.
Nous, on est 2000 jeunes à Grenoble pour le moment dans les rues, mais on est 50 000 sur le campus, donc massifier va faire partie du durcissement. Le comité de mobilisation va se réunir pour continuer la suite, organiser des collages d’affiches etc.
Mais il faut savoir qu’il y a une forte répression des activités de collage. Sur un de nos collages, la police est intervenue. Or, pour venir sur le campus, la police a besoin de l’accord d’une des instances du campus, et ici l’accord est donné systématiquement, puisque c’est en aval. Mais le fait que la police intervienne sur un campus n’est pas anodin, ailleurs en France, à l’EHESS, il y a eu des sanctions disciplinaires, de la répression des forces de l’ordre. A chaque fois ce sont des risques, qui sont pris pour des choses ridicules, pour des collages et des occupations pacifiques, c’est assez démesuré.

On a pas le droit de grève, mais on a le pouvoir du nombre, et c’est sur ce pouvoir qu’on veut s’appuyer. Il faut utiliser ce nombre ! Historiquement, les étudiants ont été le coup d’envoi de mai 68. On voit que le gouvernement a peur, car on n’est pas tous et toutes dans les rues pour le moment, mais si on est les 50 000 étudiants de Grenoble dans les rues, et partout dans le pays, la France va trembler ! 


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