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Pour leurs profits

Latécoère planifie la délocalisation de 150 postes, les salariés organisent la riposte

La direction du sous-traitant aéronautique Latécoère a annoncé délocaliser 150 postes issus des sites de Montredon et Labège. Cette nouvelle restructuration est dans la droite lignée de la politique initiée par le groupe depuis quelques années : gagner en compétitivité en délocalisant et en restructurant les unités de production dès que possible, utilisant les salariés comme variable d’ajustement pour son profit.

Violette Renée

9 février 2023

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Crédits photo : Latécoère/Arnaud Spani

Déjà en 2016, la direction de Latécoère annonçait un violent PSE qui visait à démanteler en partie l’usine de production historique de Latécoère à Toulouse, rue Périole. Par ce processus de suppression des emplois industriels en France puis de délocalisation, le groupe souhaite augmenter ses marges en allant chercher une main d’œuvre bon marché, un droit du travail moins contraignant et des exonérations d’impôts. Qu’importe la région du monde, la politique du groupe vers la course aux gains de compétitivité s’abonne aux PSE comme cela a été le cas en 2021 en Tunisie, avec le licenciement violent de 365 ouvrières, mais aussi en France (246 suppressions de postes), au Brésil et en République-Tchèque.

Cette fois ce sont les sites de Labège (filiale Latélec) et de Montredon qui vont être pour l’un fermé et pour l’autre délocalisé en Tchéquie ou au Mexique. Quant au site de Colomiers, la location va être rendue. Cette annonce sonne comme un PSE déguisé pour les salariés. « La direction dit qu’elle ne veut licencier personne et qu’elle veut reclasser tout le monde. Ok, très bien, c’est très gentil de sa part. Sauf qu’elle nous indique aujourd’hui qu’il y a 63 postes ouverts dans la région toulousaine et dans l’usine de Gimont. Reclasser 150 personnes sur 63 postes, ça nous semble un exercice très acrobatique  » ironise Florent Coste, secrétaire du comité économique et social (CSE) de l’entreprise et élu CGT. Selon les plans de la direction, seuls les sites de Montredon (réorienté vers une partie des activités de Colomiers qui vont y être transférées), Gimont et rue Périole subsisteraient fin 2024.

La direction de Latécoère justifie cette nouvelle restructuration en la plaçant sur le dos de la crise Covid et de la crise que connaît le constructeur Boeing, un de ses principaux clients avec Airbus. La pilule a d’autant plus de mal à passer dans un contexte où le trafic aérien a atteint 84,1% en 2022 par rapport au niveau d’avant Covid et que la reprise à 100% sera atteinte en 2025 selon les précisions d’Eurocontrol. Cela s’observe sur les comptes de l’entreprise qui a réalisé, au premier semestre 2022, un chiffre d’affaire «  en hausse de 18,8% à taux de change et périmètre constant à 242,3 millions d’euros, contre 181,1 millions au premier semestre 2021  » selon ZoneBourse.

D’autant que les salariés avaient vu d’avance l’échec du projet Montredon dans la production de pièces élémentaires, comme nous l’explique Florent Coste « c’était immanquable l’échec de l’usine du futur, ça n’avait pas de sens. Ce qu’on disait à l’époque c’est que ce projet permettait de justifier le démantèlement de l’usine Périole qui était alors le vaisseau amiral du groupe. On disait que c’était complètement con de faire une usine spécialisée dans la production de pièces élémentaires alors que c’est un secteur très compétitif où il y a beaucoup d’acteurs spécialisés et très bons dans le domaine  ». Et cela n’a pas manqué, six années plus tard la direction annonce sa volonté de délocaliser cette « usine du futur » ou « usine 4.0 » qui a été lancée en grande pompe en 2017 « ils viennent aujourd’hui nous expliquer que c’est un tas de merde et qu’il faut la délocaliser : c’est encore plus se foutre de notre gueule ! » poursuit Florent Coste. Ceci alors même que la construction de ce site a probablement bénéficié d’importants fonds publics.

Les salariés commencent à s’organiser en assemblée générale contre ce projet : « On a eu une assemblée générale hier à l’initiative des salariés qui a duré plus de deux heures. Le message qu’ils nous donnent aujourd’hui c’est que la délocalisation ils n’en veulent pas. C’est très clair. Ils nous disent qu’aucune machine ne sortira du site Montredon !  ». Cette ligne qui vise à refuser en bloc le projet de délocalisation de Montredon s’alimente probablement d’un contexte de mobilisation historique à Latécoère contre la réforme des retraites. Le jour de la première manifestation contre les retraites, à l’usine de Gimont le taux de grévistes était de 75% quant, rue Périole, seuls deux intérimaires étaient présents sur une cinquantaine de salariés. « C’est du jamais vu chez nous !  ».

La simultanéité du mouvement contre les retraites qui révèle une forte solidarité au sein de notre classe et cette annonce terrible montre l’importance d’élargir nos revendications à l’ensemble des attaques contre notre camp, non seulement les salaires qui sont une question centrale face à l’inflation, contre toutes suppressions d’emplois qui seront de plus en plus intenses face à la récession mais aussi à l’encontre des contre-réformes qui attaquent notre camp. Sans cela, chaque entreprise se concentre sur des réalités locales, amenant à une segmentation des luttes au lieu d’utiliser pleinement les forces convergentes de ces mouvements pour faire reculer Macron.


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