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États-Unis

La police qui a laissé faire l’intrusion au Capitole est la même qui a réprimé Black Lives Matter

Des centaines de partisans de Trump ont pris d’assaut le Capitole sans rencontrer beaucoup de résistance de la part des forces de répression. Un fait très dérangeant lorsque l’on voit la férocité avec laquelle le mouvement Black Lives Matter a été réprimé.

Sadek Basnacki

8 janvier 2021

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Crédit photo : montage / à.g. capture d’écran CNN manifestation Black Lives Matter 02/06 / à.g. Julio Cortez, AP

L’intrusion des pro-Trump dans le Capitole a été plutôt facile. La police ayant elle-même ouvert des barrières et plusieurs militants d’extrême droite se seraient pris en selfie avec des flics. Un contraste fracassant avec la façon dont les manifestants de Black Lives Matter ont été réprimés par la police, et cette extrême droite blanche pro-Trump semblant accéder avec facilité à l’un des principaux centres du pouvoir des États-Unis.

Il était relativement probable qu’une action d’envahissement de ce type, et notamment après le maintien de Donald Trump dans ses positions contre les résultats électoraux, ait lieu ce mercredi. La garde nationale n’a pas été déployée alors qu’il y a plusieurs semaines lors des manifestations Black Lives Matter après l’assassinat de George Floyd, les forces de l’ordre fédéral mais aussi la garde nationale avaient été déployées devant le Lincoln Memorial.

La répression était toute autre, entre l’important dispositif policier et militaire et les matraquages, gazages massifs il aurait été impossible aux manifestants Black Lives Matter de ne serait-ce que marcher sur la première marche du Capitole.

Dans le Washington Post, Lezley McSpadden, mère de Michael Brown, abattue par un policier à l’âge de 18 ans en 2014 à Ferguson, dans le Missouri, et qui a lancé le mouvement Black Lives Matter, a déclaré que l’absence de réponse de la police était “stupéfiante”. « Il n’y a pas eu de coups de feu, pas de balles en caoutchouc, pas de gaz lacrymogène », "On avait jamais vu ça !".

Systématiquement, les manifestations Black Lives Matter ont été accueillies par des troupes de la Garde nationale ou des policiers avec des fusils d’assaut, ici il a fallu attendre plusieurs heures avant d’en arriver là. Si des militants noirs avaient réussi à envahir le Capitole, la répression aurait été beaucoup plus forte. C’est ce que souligne au micro de Washington Post, Gregory McKelvey réprimé devant un tribunal lors d’une manifestation pacifiste après l’assassinat de George Floyd « Nous n’avons jamais essayé une seule fois d’entrer dans le bâtiment fédéral », « Nous avons affronté des gens qui ressemblaient à des soldats. Ils étaient habillés pour la guerre. Ils étaient dans des véhicules blindés. Et aujourd’hui, je regarde les flics à vélo monter. »

Si une femme a été abattue par la police hier et qu’on compte trois autres morts, il ne faut pas s’y tromper, le bilan aurait été bien plus lourd si la couleur de peau des manifestants aurait été différentes. Il n’y a qu’à voir le nombre d’arrestations.

DeRay Mckesson, l’une des principales voix du mouvement Black Lives Matter a expliqué au Washington Post que « Des personnes racisées ont été abattues et arrêtés pour beaucoup moins que ça. » « Ces personnes sont entrées par effraction dans le Capitole et étaient assises sur le bureau du président de la Chambre aujourd’hui », « Les Noirs ne seraient même pas entrés dans le bâtiment. Ils auraient commencé à leur tirer dessus dès qu’ils auraient commencé à se précipiter sur la police ».

Avec la reprise de la NBA, cette différence de traitement entre le mouvement Black Lives Matter et les pro-Trump, a fait réagir le monde du ballon orange. Des joueurs équipes ont mis un genou à terre pour dénoncer l’intrusion dans le Capitole et la différence de traitement avec le mouvement Black Lives Matter et certains ont pris position dans les médias.

Doc Rivers, le coach de Philadelphie, a réagi : « Durant l’été, il y avait des manifestations et des émeutes, avec la police, la garde nationale et l’armée, et là, il n’y avait rien… Ça prouve qu’il y a des privilèges dans la vie, de différentes manières. Et je vais le dire parce que beaucoup ne veulent pas l’entendre. Mais imaginez que les hommes qui sont entrés dans le Capitole aujourd’hui aient été noirs. Qu’est-ce qu’il se serait passé  ? Pour moi, ce qu’on a vu veut tout dire. »

Bill Russell, légende de la NBA et des Celtics a quant à lui déclaré « Pouvez-vous imaginer aujourd’hui, si c’étaient tous des Noirs prenant d’assaut le Capitole, ce qui se serait passé  ? Combien de temps aurait-il fallu pour déployer la Garde nationale s’ils avaient été noirs et combien auraient été morts  ? Ce n’est PAS l’Amérique  ! »

C’est la conséquence évidente de l’incitation de Trump : cela montre clairement que la police, qui s’est tenue à l’écart et a laissé faire, se trouve du côté de l’extrême droite. Une nouvelle expression du contraste frappant entre la façon dont les manifestants blancs d’extrême droite sont traités par la police et les manifestants de Black Lives Matter. Et surtout, c’est une démonstration de plus qui montre que l’on ne peut pas battre le trumpisme ou l’extrême droite par les urnes - on ne peut les battre que dans la rue.

La gestion de la manifestation des pro-trump, la non-action voir la collusion entre forces de répression et extrême-droite a choqué les États-Unis en particulier la communauté noire qui fait face à un racisme d’État et structurel. Le mouvement social noir est constamment criminalisé tandis qu’on laisse l’extrême-droite entrer dans le capitole. Ce qu’il s’est passé ce mercredi 6 janvier est à l’image du mandat de Trump qui a cristallisé les tensions raciales dans un pays déjà très marqué par elles.

Voici quelques photos qui montrent la différence de traitement des manifestants et qui soulignent le fait que les forces de répression qui ont laissé l’extrême droite entrer dans le Capitole est la même qui a réprimé les manifestations Black Lives Matter.

AFP/Roberto Schmidt

Capture d’écran ABC News

Timothy Burke (Twitter)

DR


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