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Un peu d'histoire...

Journée tricolore ? Nous c’est rouge !

Pierre Reip En cette journée de commémoration des attentats de Paris, Hollande invite tous les bons citoyens à pavoiser leurs façades de drapeaux bleu-blanc-rouge. Mais quelles sont les origines et l’histoire des couleurs nationales ? Pourquoi leur préférons-nous le drapeau rouge ?

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Sous l’Ancien Régime, l’étendard du Royaume de France est blanc, surmonté de fleurs de lys, symboles de la monarchie. Cela remontrait à Henri IV et à son fameux « panache blanc », choisi pour différencier les armées royales, de celles, rouges, des Espagnols.

Un symbole de la Monarchie Constitutionnelle

Le 12 juillet 1789, Camille Desmoulins harangue la foule dans les jardins du Palais Royal. Il saisit une feuille verte et la porte à son chapeau en signe de mobilisation générale. Après la prise de la Bastille, les sans culottes arborent une cocarde rouge et bleue, aux couleurs de la ville de Paris. Le Marquis de la Fayette a l’idée d’intercaler du blanc entre le rouge et le bleu pour symboliser l’alliance du peuple de Paris avec la royauté. Le 17 juillet 1789, Louis XVI se rend à l’Hôtel de Ville et on lui remet une cocarde tricolore. La monarchie constitutionnelle qui se met en place à partir de 1790 adopte les trois couleurs qui sont un symbole de l’unité du roi et de la nation. Le 14 juillet 1790 lors de la fête de la Fédération, qui célèbre l’anniversaire de la Bastille et le nouveau régime, on prête serment à la Nation et au Roi sur un Champ de Mars pavoisé de banderoles tricolores.

La Convention, le Directoire et l’Empire conservent les trois couleurs, mais la Restauration rétablit le drapeau blanc, de 1815 à 1830. Les 27, 28 et 29 juillet 1830, le peuple de Paris s’insurge et, face à l’hésitation des députés libéraux, une monarchie constitutionnelle est instaurée, avec à sa tête « Louis-Philippe », libéral et « roi bourgeois » qui reprend le drapeau tricolore. Lors de l’insurrection républicaine de 1832, surgissent de nombreux drapeaux rouges, brandis notamment par des polytechniciens. Sur l’un d’eux, la devise : « La liberté ou la mort ! ». À sa vue, le général Exelmans s’écrie « Pas de drapeau rouge ! Nous ne voulons que le drapeau tricolore ! ».

Rouge ou tricolore ? République sociale ou République bourgeoise ?

Le 25 février 1848, c’est le tumulte dans Paris, une nouvelle insurrection a vu le jour, avec pour objectif d’en finir définitivement avec la monarchie et d’instaurer une république. Place de l’Hôtel de ville, on crie : « Le drapeau rouge, le drapeau rouge ! ». Lamartine, poète et républicain libéral, aurait alors prononcé ces mots qui seront conservés par la postérité :

« Je vous ai parlé en citoyen tout à l’heure, eh bien ! maintenant écoutez en moi votre ministre des Affaires étrangères. Si vous m’enlevez le drapeau tricolore, sachez-le bien, vous m’enlèverez la moitié de la force extérieure de la France ! car l’Europe ne connaît que le drapeau de ses défaites et de nos victoires dans le drapeau de la République et de l’Empire. En voyant le drapeau rouge elle ne croira voir que le drapeau d’un parti ! C’est le drapeau de la France, c’est le drapeau de nos armées victorieuses, c’est le drapeau de nos triomphes qu’il faut relever devant l’Europe. La France et le drapeau tricolore c’est une même pensée, un même prestige, une même terreur, au besoin, pour nos ennemis !

Songez combien de sang il vous faudrait pour faire la renommée d’un autre drapeau !

Citoyens, pour ma part, le drapeau rouge, je ne l’adopterai jamais, et je vais vous dire pourquoi je m’y oppose de toute la force de mon patriotisme. C’est que le drapeau tricolore a fait le tour du monde avec la République et l’Empire, avec vos libertés et vos gloires, et que le drapeau rouge n’a fait que le tour du Champ-de-Mars, traîné dans le sang du peuple. »

On l’aura compris, le bellicisme forcené de l’Empire et « ses victoires » sont évoqués pour justifier l’emploi du drapeau bleu-blanc-rouge. Symbole de la patrie conquérante, objet de terreur, selon les mots même de Lamartine, voilà le fameux drapeau tricolore ! À partir du massacre des ouvriers parisiens de juin 1848, la rupture est consommée entre socialistes et républicains. La République bourgeoise et tricolore se met en place et mènera droit au Second Empire. Le drapeau rouge sera celui de la République sociale.

Internationalisme vs repli national

La Commune de Paris reprend le drapeau rouge et les troupes de la jeune Troisième République l’écraseront dans le sang. Le nouveau régime se consolide et se lance dans de multiples aventures outre-mer, plantant sur tous les continents un drapeau devenu symbole de l’oppression coloniale. La révolution russe qui se place dans la continuité de la Commune, adopte après Octobre 1917 le drapeau rouge, qui deviendra de par le monde un symbole du communisme et de l’union des prolétaires de tous les pays, contre l’impérialisme et le fascisme.

Utilisé par Vichy comme instrument de propagande, notamment dans des tracts antisémites contre les communistes, le drapeau tricolore est aujourd’hui emblème du FN, comme des Républicains. LE PCF, dans sa période stalinienne, reprend les couleurs bleu-blanc-rouge et se met à défendre « l’intérêt national ». Le PS a depuis longtemps perdu toute coloration socialisante et il poursuit avec l’Etat d’urgence une dérive ultra-patriotique, marchant dans les pas du Gaullisme.

Non, nous n’arborerons pas ces trois couleurs synonymes de chauvinisme, nationalisme belliqueux, et néo-colonialisme. Plus que jamais, face à l’Etat d’urgence et la guerre impérialiste, osons revendiquer, tous ensembles, le drapeau rouge !


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